Deux vitesses, la Saint-Jean?, Dibondoko, Gadji-Gadjo, Alex Bellegarde, Plaster, Manouche, Artist of the Year, Kobayashi, Comme un homme libre
Musique

Deux vitesses, la Saint-Jean?, Dibondoko, Gadji-Gadjo, Alex Bellegarde, Plaster, Manouche, Artist of the Year, Kobayashi, Comme un homme libre

Alors, pour ou contre une célébration de la fête nationale où 25 000 Québécois acceptent de payer de 30 à 40 $ pour voir neuf groupes, dont les deux formations engagées de l’heure au Québec? Avant de considérer illico qu’une Saint-Jean à deux vitesses est une aberration, on doit réfléchir à la question.

Les Cowboys fringants et Loco Locass ont voulu organiser un party bien à eux. Un concert nettement plus personnel qu’une simple apparition sur la scène du parc Maisonneuve. Une soirée où nul ne mâcherait ses mots, où personne ne ménagerait Jean Charest sous prétexte que le PLQ finance l’événement. Difficile de s’y opposer, non?

Or, organiser un tel événement coûte extrêmement cher (louer le site, la scène, payer les artistes, les agents de sécurité, l’équipe de production). Sans l’argent gouvernemental, les organisateurs n’ont d’autre choix que de faire payer le spectateur. Vrai qu’un billet à 35 $ n’est pas à la portée de toutes les bourses, mais les promoteurs prenaient tout de même un certain risque en faisant compétition à la multitude de fêtes gratuites en ce 24 juin.

Est-ce que les Cowboys se sont fait la manne grâce à cette Saint-Jean payante? Sans aucun doute. Primo, les fans ont répondu à l’appel, envahissant l’épingle du circuit Gilles-Villeneuve où se déroulait le concert. Deuzio, un fan des Cowboys fringants, par définition, ça achète des tonnes de souvenirs (chandails, affiches, chapeaux, disques).

Mais si le compte bancaire des Cowboys a gonflé depuis les derniers jours, c’est parce que le concert répondait aux besoins d’une jeunesse qui ne se reconnaît pas dans le spectacle organisé au parc Maisonneuve; une soirée qui attire 200 000 personnes, mais qui présente année après année les mêmes artistes interprétant les mêmes classiques du répertoire québécois.

Arrivé à la maison vers 23h30, après le show des Fringants, j’ai ouvert mon téléviseur pour attraper les dernières minutes de la grande Saint-Jean gratuite. Normand Brathwaite, sa fille, Hugo Lapointe, Nicolas Ciccone, France d’Amour et Boom Desjardins y chantaient un medley de Gerry Boulet. La jeunesse qui s’est levée cet hiver pour s’opposer aux politiques de Charest n’a rien contre Gerry, mais elle préfère regarder en avant plutôt qu’en arrière. "Envoyons de l’avant nos gens!" scande Karl Tremblay sur En attendant.

Les vieux nous cassent souvent les oreilles avec leur Saint-Jean historique des années 70 où, sans compromis, les Vigneault, Leclerc et Ferland militaient pour un Québec libre. D’après vous, quelle fête nationale marquera les annales? Celle où France d’Amour est devenue la 200e interprète à reprendre Ayoye ou celle où les Loco et les Cowboys ont soulevé 25 000 Québécois en chantant ensemble Libérez-nous des libéraux (un hymne que les manifestants entonneront encore dans 25 ans si le PLQ est au pouvoir)?

Oui, malheureusement, il fallait débourser 40 $ pour assister à cette Saint-Jean historique où les Zapartistes ont simulé avec émotion une victoire du oui lors d’un prochain référendum sur la souveraineté. Mais tant que le Comité de la fête nationale à Montréal présentera un concert politically correct mettant en vedette une brochette plus au moins intéressante d’artistes phares de l’industrie "baby-boomerienne", les jeunes souverainistes engagés continueront de payer pour vivre une fête qui leur ressemble: mordante et fortement empreinte du rêve indépendantiste.

Que l’on soit pour ou contre les moyens utilisés pour organiser cette célébration, on ne peut ignorer un fait: la jeunesse québécoise cherche à changer les choses. Et si le système en place ne le lui permet pas, elle est encline à la confrontation et à la mobilisation pour façonner l’avenir à sa manière. C’est le frisson émanant d’un éventuel changement politique que retiendront les spectateurs rassemblés au parc Jean-Drapeau le 24 juin dernier, pas les 40 $ dépensés.

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CONSEILS CONCERTS

– En plus des vedettes internationales, le Festival de jazz présente au cours des 11 prochains jours quelques artistes du réseau sous terrain montréalais. Découvrez gratuitement sur une scène extérieure les Dibondoko (le 30 juin), Gadji-Gadjo (les 1, 3 et 9 juillet), Alex Bellegarde (le 2), Plaster (le 2), Manouche (le 8), Artist of the Year (le 8) et Kobayashi (le 10).

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DISQUE LOCAL
Comme un homme libre
Comme un homme libre
(PROXENETT)

Étroitement lié aux Breastfeeders (Johnny Maldoror signe quelques textes alors que Joe martèle la batterie du groupe), Comme un homme libre (CHL) lance son premier véritable maxi contenant les trois pièces déjà envoyées aux radios (L’Amour entre animaux, Our Lips Are Sealed et De dire délire) ainsi que trois nouveaux morceaux dont une reprise francophone de Billy Childish. Suscitant beaucoup d’attention avec son rock pop un tantinet garage (Audiogram aurait le béguin pour le groupe), CHL manque encore d’originalité pour réellement décoller, mais montre qu’il possède les bons outils pour progresser rapidement: les synthétiseurs de AC/JC (Gwenwed), la propension mélodique de la chanteuse Karine Isabel et un dynamisme aussi sincère qu’agréable. 3/5