Les conservateurs ne sont pas les bienvenus à Rouyn-Noranda. Ce n'est pas moi qui le dis, mais le cofondateur du Festival de musique émergente en Abitibi-Témiscamingue, Sandy Boutin. Ancien membre actif du Parti Québécois, Sandy s'est emporté le dimanche 31 août lors de son discours accompagnant le concert de clôture du festival.
Le concert de clôture, c'est le moment tranquille, plus corporatif, du FME. Celui où la foule assise est constituée de commanditaires, de journalistes locaux, de baby-boomers et de politiciens désireux de serrer quelques mains d'électeurs bienveillants. Or, en plein discours, M. Boutin a sacré sans retenue contre les coupures en culture du gouvernement Harper. Faut dire qu'en sabrant dans les programmes d'aide à l'exportation de nos artistes, le premier ministre a affecté directement la business de l'organisateur, aussi gérant de Karkwa: moins d'argent pour les tournées françaises du groupe et moins pour le FME qui invite chaque année des journalistes et programmateurs européens avec qui les musiciens d'ici peuvent établir des relations privilégiées.
"Je n'ai pas la prétention de vous dire pour qui voter, mais il faut les crisser dehors, les tabarnacs", a lancé Sandy en fin de discours. Happée par ce franc-parler, la foule a rapidement acclamé l'orateur. Avec son début de calvitie et sa posture légèrement arquée, on aurait pu foutre une clope au bec de Sandy et reconnaître… Ah puis laissez faire, voulez-vous? Parlons musique parce qu'au fond, aucune forme de conservatisme n'a sa place au FME.
Depuis six ans, les meilleurs concerts du festival sont les plus audacieux, ceux qui en mettent plein la gueule aux Abitibiens. Il y a deux semaines, les gens de la région ont fait connaissance avec Duchess Says au Petit Théâtre. L'agressif quatuor moog-rock s'est taillé une place dans les annales lorsque la chanteuse Annie-Claude a grimpé dans les airs, aidée par la foule, pour pédaler dans le vide sur un tricycle suspendu au plafond. Le moment de folie témoignait du caractère imprévisible de la rockeuse. Fort d'une sono impeccable, supérieure à celle du La Tulipe ou de la Sala Rossa, le clavier d'Ismaël sonnait aussi lourd et noisy que les deux guitares de Sonic Youth.
Ghislain Poirier a fort bien fait le samedi au Cabaret de la dernière chance. En formule trio live (D.J.-batteur-chanteur), le Montréalais a fait bouncer les festivaliers au son des basses fréquences omniprésentes. Originaire de New York, O'Death s'est aussi démarqué en insufflant une bonne dose d'énergie punk à son folk plus traditionnel. Dernière à se produire le dimanche soir, la formation rock-trip-hop Beast est finalement repartie avec la récompense Étoile Galaxie assortie d'une bourse de 3000 $. Non aux conservateurs.
LE SMIM
De nombreuses activités se tiendront cette fin de semaine au Café Campus dans le cadre du Salon de la Musique Indépendante de Montréal (SMIM). En plus des multiples kiosques occupés par divers médias, étiquettes, gérants, musiciens et autres artisans de la scène, plusieurs conférences sont organisées: La Promotion numérique, L'Autobooking, Les Subventions, Musicaction, Démo-critique, Conférence pour musiciens et artisans du secteur de la musique et Retour vers le futur: la SOPREF, 10 ans. Une série de concerts-vitrines se déroulera également tout au long de la semaine. On vous conseille spécialement ceux d'aRTIST oF tHE yEAR et Stern le 11 septembre au Café Campus; Femme, Le Matos, Leo Cruz et DJ Mini le 13 au Campus; O Linea, Kamakazi, Ok Volca et Le Skieur Fluo le 15 au Campus; Mad'Moizèle Giraf le 17 au Divan Orange; Les Prostiputes, Bonne Journée!, Kid Sentiment et plus le 18 à L'Escogriffe; André, Florence, Around Joshua, Les Roturiers et Naila le 19 au Gymnase. Détails et inscriptions au www.salondelamusique.ca.
CONSEILS CONCERTS /
– Philippe B effectue sa première montréalaise depuis le lancement de son album Taxidermie. Le vendredi 12 septembre au Lion d'Or.
– Boogat, Criollo, Cobna et Sans Pression se produiront en première partie des Français de Psy 4 de la Rime le 12 au National.
– En plus d'interpréter ses nouvelles compositions, Polipe reprendra plusieurs pièces des années 60 et 70 le 18 septembre au bar La Rockette. De nombreux invités sont attendus, dont Navet Confit, Deweare, Vincent Blain (L'Indice), Jean-François Fortier et Jimi Hunt.
DISQUE LOCAL /
Band de Garage
Cassette II
(C4/DEP)
Une guitare, un micro, une batterie. La recette a beau être archi-simple, Band de Garage arrive une fois de plus à en extirper un rock aussi raffiné que percutant. Lorsqu'il ne blinde pas sa six cordes d'une distorsion à l'épreuve des balles, le polyvalent guitariste François Lafontaine joue habilement avec des textures plus progressives tout en gardant dans sa mire des structures accrocheuses et efficaces. Cette aptitude se traduit tout autant dans sa voix capable d'osciller entre les deux extrêmes. Précis telle une montre suisse malgré sa redoutable force de frappe, le batteur Marc-André Brazeau suit derrière, en parfaite symbiose avec Lafontaine. Les deux (et le réalisateur Pierre Girard) font la paire. 4/5