Dans un article publié il y a deux semaines par l'hebdomadaire Ici, le rappeur Sans Pression s'attaquait à la formation Gatineau qui a remporté le Félix de l'Album hip-hop de l'année au dernier gala de l'ADISQ. Répondant lui-même à une citation malhabile de Gatineau sur les ondes de Musique Plus – le groupe aurait insinué être plus "québécois" que SP -, le vétéran, aussi en lice à l'ADISQ, a fait dévier le débat sur le glissant terrain du racisme, en plus de ramener par la bande une question de puriste: Gatineau, hip-hop ou non?
Il ne faut rien enlever à Sans Pression. Soldat du hip-hop québécois, il a fait de grandes choses pour le mouvement, et les Loco Locass – eux aussi victimes d'attaques des puristes – ont fort bien agi lorsqu'ils lui ont remis leur Félix reçu pour le CD-ROM interactif In-Vivo, alors que Réplique aux offusqués de SP, aussi en nomination, était nettement supérieur.
Or, se demander, en 2008, si Gatineau est bel et bien un groupe hip-hop relève d'un conservatisme nuisible à l'art. De tous les albums hip-hop en nomination à l'ADISQ, incluant La tendance se maintient de Sans Pression, le disque éponyme de Gatineau était le moins linéaire, le plus novateur et original quant à ses arrangements empruntant à la musique soul, électro, funk, jazz et rock. Faudrait-il que les groupes se contentent d'imiter Run DMC ou Notorious B.I.G. pour être considérés hip-hop?
Journaliste, animateur radio et grand observateur de scène urbaine d'ici, Goofy Welldone compare la situation à celle vécue il y a quelques années lorsque Damien, L'Assemblée, Boogat et les Deux Tom sont débarqués dans le milieu rap avec leurs guitares acoustiques. "C'était identique, les puristes ont chialé en disant que c'était pas du vrai hip-hop. En 2008, la cible est devenue la vague champ gauche électro. J'aime pas Gatineau, j'écouterais jamais ça chez nous, mais le gars rappe. C'est du hip-hop. Pour rester vivante, une musique doit évoluer. Si t'es déçu d'avoir perdu, arrête de chialer et retrousse tes manches. Un black a été élu président des États-Unis, il n'y a rien que tu ne peux pas faire."
Comme le propose le rappeur Maître J, qui a blogué récemment sur le sujet, l'ADISQ pourrait rebaptiser la catégorie "Album rap" pour ne froisser personne, rappelant que le terme hip-hop fait davantage référence à une culture, un mode de vie. All Music Guide classe d'ailleurs le hip-hop comme un sous-ensemble de la musique rap. Mais gageons que les puristes ne seront jamais contents.
Débat suivant: non, ce n'est pas du punk, Simple Plan!
GALA MDA
Organisé par la télé web MDJA.TV, le gala MDA vise à récompenser les meilleurs DJ montréalais. Les DJ Shortcut, Manifeste et Crowd partent favoris avec deux nominations chacun. En plus de remettre 14 prix, l'événement intronisera DJ Shortcut et DJ Champion au tout nouveau temple de la renommée des DJ de MDA. Le 8 décembre, au Bain Mathieu (2915, rue Ontario Est), dès 19 h.
CONSEILS CONCERTS /
– Navet Confit soulignera la réédition de ses deux premiers maxis, dorénavant réunis sur un même compact grâce à la maison de disques La Confiserie, le jeudi 4 décembre à L'Escogriffe.
– Le duo Orange Orange se produira gratuitement au Savoy du Métropolis, le 6, à 22 h.
– À défaut de lancer son troisième disque, dont la sortie a été repoussée au printemps 2009, Pawa up First présentera ses nouvelles pièces sur la scène du Cabaret du Musée Juste pour rire le 6. aKido assurera la première partie.
– Les formations rock anglophones Villa Borghese et Darling Demaes monteront sur les planches du Divan Orange le 7.
– Menée par le chanteur Fredric Gary Comeau, la formation planante Atréal lancera son nouvel album, Hiver nordique, le 10, lors d'un 5 à 7, au Divan Orange.
DISQUE LOCAL /
Les Années Monsieur
(P572)
Voix charismatique des Goules, Keith Kouna profite d'une pause de sa formation pour lancer un premier album solo. Si le rock grinçant et rythmé des pièces Tarentule, La Joyeuse ou Brillantine nous amène à voir la première moitié du compact comme une nouvelle offrande des Goules, Kouna, l'auteur-compositeur-interprète, se dévoile à mesure que défilent les titres. Franchissant ainsi le mur de la chanson avec un grand C, il verse dans un registre intime et touchant sur Labrador (piano-voix), L'Or (teintée de vibraphone) et la mélancolique Marin, où il joue habilement avec les sonorités de la langue française. Son adaptation de Laisse béton de Renaud (rebaptisée Oublie ça) témoigne parfaitement des dualités du projet: le rock vs la chanson, le sérieux vs l'absurde. Au centre du carré, Kouna, et son imagination bien personnelle, tire son épingle du jeu lorsqu'il couche sa voix plus posée sur des musiques atmosphériques, parfois progressives et toujours raffinées. C'est le cas des cinq dernières compositions du CD, une révélation de taille qui, à elle seule, vaut l'achat de Les Années Monsieur. En concert en compagnie d'Avec pas d'casque, au Quai des brumes, le 6 décembre. 4/5
«Toujours pas de Félix pour SP… L’ADISQ est-elle dans le champ encore une fois?
Le Hiphop québécois est mécontent, car Gatineau est reparti avec l’objet doré à l’autre gala de l’ADISQ. De l’avis de plusieurs rappeurs dont Ironik de l’Assemblée, Sp méritait de remporter ce trophée ne serais ce que pour l’ensemble de sa carrière. Je vous rappelle que Sans Pression n’a jamais mis la main sur un Félix hormis la fois où Loco Locass avait décidé de leur remettre leur trophée en 2005. Loco Locass avait bizarrement remporté le trophée alors que leur album était en fait un cd interactif et c’était clairement une erreur de l’ADISQ d’admettre ce projet au scrutin. L’ADISQ est habitué, car chaque année le Hiphop Québécois se soulève et cri au scandale. Le mouvement Hiphop a t-il raison de le faire? L’ADISQ a-t-elle encore fait une erreur, si oui laquelle?
Gatineau a pris beaucoup de monde par surprise, moi y compris en repartant avec le prix. Le problème étant que le groupe Gatineau se trouvait dans une liste aux noms pesant cette année. Assis derrière moi ce soir là, ceux qui auraient pu aussi logiquement repartir gagnants (Radio Radio) ont vite fait de reprendre leur place. Il y avait Imposs, Samian et Sans Pression bien sur, qui ont servi du rap plus conventionnel et convaincant cette année. Pour beaucoup de gens Gatineau reste un projet intéressant, mais Séba (le emcee) est-il vraiment un rappeur de qualité ou encore peut-on le situer dans la catégorie Hiphop? À ce sujet, au lendemain de l’Autre Gala, Alain Brunet de la Presse disait ceci :
«Gatineau est vraiment super, une des révélations québécoises de 2008 en ce qui me concerne, mais la présence de Séba en tant que rapper ne rend pas Gatineau vraiment hip-hop, en ce qui me concerne. Où sont passés les vrais groupes hip-hop ?»
Bien dit monsieur Brunet, mais les vrais groupes HH étaient présents. En musique tous les goûts sont permis, mais encore faut-il en connaître le plus possible pour donner une opinion censée, faire un choix éclairé quand on a le devoir de voté, car la catégorie Hiphop est jugée par un jury d’une trentaine de personnes «spécialisé en culture Hiphop». Je n’ai absolument rien contre ceux qui ont voté pour Gatineau, rien contre ceux qui croient que cet album est le meilleur cette année, mais je pense qu’il est temps qu’on se pose des questions et que des gens répondent. Alors comment l’ADISQ fonctionne avec la catégorie Hiphop?
Voici le fonctionnement de la catégorie Hiphop à l’ADISQ :
Jury Hip-Hop
Ce jury doit évaluer les candidatures du Félix «Album
de l’année – Hip-Hop». Il est composé de représentants
des stations de radio, de journalistes spécialisés, de
représentants d’organismes ou d’événements
musicaux et de disquaires spécialisés.
Description des critères d’évaluation
Album de l’année – Hip-Hop
Qualité de l’interprétation
Qualité de la production
Originalité du répertoire
Impact au Québec (notoriété, reconnaissance, etc.)
Chiffres de vente
Les chiffres de ventes comptent pour 40 points sur
100 et le vote de l’Académie ou du jury pour 60 points
sur 100. Le calcul des points pour les ventes se fait
de la façon suivante: pour chaque catégorie, le total
des ventes de cette catégorie représente 40 points;
le pourcentage des ventes du disque par rapport aux
ventes totales exprime le pointage obtenu.
À titre d’exemple:
Pourcentage Pointage
Ventes totales: 200,000 copies 100% 40 points
Disque A: 50,000 copies 25% 10 points
Disque B: 25,000 copies 12.5% 5 points
Julie Gariépy, directrice des communications de l’ADISQ m’a assuré que l’organisme s’assurait des connaissances des juges en faisant des recherches et en trouvant des références au sujet des juges. Il y a quatre ans, lorsqu’ils ont formé le jury spécialisé, j’étais toujours à la barre de l’émission Les 4 Éléments (une émission Hiphop) mais depuis personne ne m’a demandé si j’avais suivi suffisamment la scène Hiphop québécoise pour m’acquitter de ma tâche de juge… Je pourrais donc vivre en Chine depuis trois ans et continuer de voter pour l’ADISQ. Je voulais également obtenir la liste des juges et dans quelle région ils se situent au Québec, mais cette demande a été ignorée…
Selon Patrick Binette, directeur musical de Musique Plus, il serait important de réviser la liste des jurys spécialisés chaque année et de s’assurer qu’il soit diversifié et connaisseur de la culture Hiphop, si ce n’est pas le cas la catégorie s’expose à un manque de direction et de connaissance. Si Gatineau est un phénomène montréalais, et que tous les juges sont basés à Montréal, comment peut-on avoir l’heure juste en région? Qui sait si Gatineau ne sont pas des parfaits inconnus en région? Ironik en a rajouté en disant : «Sp était probablement celui qui avait complété le plus de shows en territoire Québécois, mais si le vote de l’ADISQ demeure Montréalais, l’effet musical à l’extérieur de Montréal est-il représenté adéquatement?» J’ai des doutes moi aussi, en attendant le pilier du rap québécois, Sans Pression n’a toujours pas reçu de reconnaissance de la part de l’ADISQ, de ses juges et ça commence à être drôlement illogique mais ce ne sont pas les trophées qui font les bons albums non plus…»
Je t’offre mon texte qui devait se retrouver sur un autre site car je trouve qu’il complète bien le tient. C’est un débat qui est vraiment bourré d’angle et de chose à penser avant de publier son opinion. Il ne faut pas oublier que Gatineau n’a pas réussi à vendre 2000 copies de son album encore et que Sans Pression est probablement celui qui en a vendu le plus dans la catégorie (près de 8000 copies selon les dires).
Or Gatineau n’est pas un bon rappeur selon plusieurs mais Sir Pathétik est encore pire mais la semaine dernière il a vendu ce que Gatineau a vendu depuis sa sortie.
Sir Pathétik a donc beaucoup de chances de remporter le prochain Félix right? Plusieurs personnes chialeront encore, c’est certain et au risque de me répéter ce ne sont pas les trophées qui font les bons albums!
Bon texte Olivier.
Bon texte à toi également, Tommy
Je suis d’accord avec presque tous tes points, particulièrement ceux sur la composition du jury hip-hop, sauf que L’ADISQ ne remet pas un Félix pour la carrière hip-hop de la décennie, mais bien pour l’album hip-hop de l’année.
Je crois que le jury doit ainsi faire abstraction de la notoriété des artistes pour se concentrer sur le disque, la musique.
Tout le monde sait que l’ADISQ a fait une erreur en remettant le Félix à In Vivo des Loco Locass plutôt qu’à SP pour Réplique aux offusqués, mais je ne crois pas que l’association doit se racheter en donnant un Félix à SP sans se soucier des critères d’évaluation.
Je suis d’accord aussi sur le fait que ce n’est pas la carrière qui est récompensé, je citais surtout Ironik de l’Assemblée là-dessus.
Sauf que l’ADISQ a ce critère au niveau des jury dont nous faisons partie:
Impact au Québec (notoriété, reconnaissance, etc.)
Pour Gatineau au niveau de la reconnaissance on repassera pour l’instant leur carrière est trop jeune pour parler de notoriété si tu veux mon avis.
Sinon qui juge vraiment selon ces critères? On regarde pas derrière pour confirmer qu’un album rencontre les critères, on est en amour avec un disque et on vote pour et on peut même oublier les autres (l’amour rend aveugle)… On y va avec nos opinions, nos coups de coeur. L’ADISQ essait de faire rentrer de l’objectivité dans un domaine où il y en a absolument pas mais ça c’est une autre histoire! Un peu plus de rigueur pour la sélection des juges, ça ne ferait pas de mal.
Les galas en gros c’est de la grosse mousse de nombril mais si ça aide à des artistes comme Gatineau à se booker, j’imagine que ça vaut la peine d’envoyer nos bulletins de vote.
Sinon, peut être qu’au Québec le rap champ gauche et cie est plus apprécié que tous les autres et ça c’est une réalité avec laquelle les artistes rap plus dans les «normes» devront composés! Et ça, ça enraye tout le débat.
oui Tommy, tu as tout a fait raison sur plusieur points mais je pense que cette situation est plus que juste pour la catégorie hip hop.
Avec l’adisq, c est aussi les producteurs ( membres) qui paient pour être dans une catégorie spécifique, ça revient à plus ou moins 250$, par catégorie, et y a plus d un label qui soumet ses candidatures dans plus d’ une catégorie, et comme beaucoup de labels spécialisés ne sont pas membres donc inéligible…, il y a un effet de remplissage par la productions pop…vers les catégorie plus spécialisées
Exemple similaire pour la catégorie Musique de Monde… Josélito…il a soumis Mikael a la catégorie musique du monde – c est ça qu ils voulaient gagnés…. et le comité officiel a endosser… y a personne qui s’est insurgé pour affimé que c est de la pop chantée dans une langue autre que français ou anglais, …automtiquement, c est de la musique du monde…. moi je n’en vraiement suis pas convaincu… parce que si tout le monde s’accorde pour dire que Tito Puente c est de la musique latine… issue de sa culture nationale ( salsa ) … Mikael, c est du Enrique Iglesias…et pour plusieur, c est pas de world…. c est de la pop en espagnol…. y a une différence mais les jurés ici ne la voient pas… c est idem pour le hip hop…si ça rappe, c est hip hop….
Idem pour le felix interprétation jazz….aucun jury s’est demandé si une reprise de Roxanne de the Police fait à la sauce ballroom lounge, c est du »vrai » jazz , si c est de la pop pouvant contenir et/ou du jazz, c est ok.
Bref, ça arrive dans les catégories dites spécialisées et n’oublions pas que l’adisq a comme rôle de remplir ses galas, ses catégories et de s’en remettre aux votes des membres…. le responsabilité de l’organisation est envers ses membres et pas envers les communautés d’ artistes de chaque catégories, non membres.
ceci dit dans notre micro-marché, la diversité culturelle motive ces inepties fabuleuses …Gatineau…c est du pur hip hop au même titre que Mikael c’est de la world beat…. les définitions sont floues mais les motivations sont claires.
D’accord avec toi sur la catégorie Jazz et Worldbeat aussi! J’ai bien aimé celle là: «les définitions sont floues mais les motivations sont claires.»
Tant qu’à moi les deux devraient être claires dans ma tête de «spécialiste» si on veut que les gens en sachent plus et que la connaissance musicale progresse au Québec. Tsé que le rap à Billy c’est encore une référence pour beaucoup de monde haha ;)
Les puristes chialent…
mais c’est quoi le hip-hop pur?
Lors que l’on purifie quelque chose, on lui retire toutes ses « défauts, impuretés, autres substances… » etc…
et le hip-hop à la base, c’est un mélange!
C’est l’ecclectisme new-yorkais de la fin 70’s : la musique cubaine, le reggae-dub, le funk, le disco.
Et la…des « puristes » pleurent car Gatineau a peut-être trop mélangé et est en train de tout fucker leur beau hip-hop?
Le linge doré de sport, ca donne pas nécessairement les connaissance associé au hip-hop..hey oui le « knowlege est important dans le hip-hop…j’ai entendu dire ca en 1983.
Et, entre vous et moi, qui de Sir Pathetik et Séba connais mieux son hip-hop 101? Je mets mon 5$ sur le 2ièm.
Mais de toute façon on repart l’éternel débat Sacré du hip-hop… un débat sans fin.
Et tant que les personnes concernées( Adisq, artistes…) ne feront pas leurs classes, et n’iront pas puiser à la source, se renseigner sur le pourquoi et le comment des débuts du hip-hop, on ne s’en sortira jamais.