Musique

L’oiseau a quitté le nid

C'était écrit dans le ciel. Depuis la déconfiture de sa branche de distribution LOCAL en 2007, la Société pour la promotion de la relève musicale de l'espace francophone (SOPREF) était à l'agonie. "Lors des récentes réunions de ses conseils d'administration et exécutif, la SOPREF a fait le constat qu'elle devait mettre un terme à son existence telle que nous la connaissions jusqu'ici", lit-on depuis vendredi sur la page d'accueil du site de l'association. La lettre est signée par Jean-Robert Bisaillon, vice-président et fondateur de la SOPREF, qui s'est vu remettre les clefs de la structure afin de minimiser les impacts d'une cessation des activités.

Nécessaire lors de sa création en 1999 afin d'aider les groupes émergents à se prendre en main, la SOPREF a tout simplement été victime de son succès. Dès l'instant où elle a prouvé que les formations indépendantes pouvaient être lucratives (on pense aux Trois Accords, à Malajube, à Champion et à Dobacaracol, jadis tous distribués chez LOCAL), d'autres distributeurs et maisons de disques mieux organisés sont venus jouer dans ses plates-bandes, et les gros vendeurs sont partis sous d'autres cieux, emportant avec eux une source de revenus importante pour l'organisme.

Née d'un esprit DIY (do it yourself, ou fais-le toi-même) très fort dans les années 90, la SOPREF offrait aussi des cours de gérance et des ateliers permettant aux musiciens de démarrer leur carrière et de se faire connaître. Or, l'arrivée d'Internet a facilité la diffusion de la musique, et de nombreux soldats du DIY ont aussi profité des années 2000 pour offrir leurs services à la relève. Je pense notamment à Éli Bissonnette, ex-Naked N'Happy et cofondateur de l'étiquette Dare To Care/Grosse Boîte, ainsi qu'à Gourmet Délice (Secrétaires Volantes) et Jean-Christian Aubry (Gwenwed), qui ont lancé Bonsound (maison de gérance, de disques, relation de presse, tourneur et plus).

Dès sa naissance, la SOPREF avait compris que, faute d'appui du circuit mainstream, la relève devait compter sur une structure solide pour l'épauler. Cette structure s'est développée pendant mes six ans de chroniques Scène Locale, de 2003 à 2009. La scène émergente est devenue une mini-industrie du disque capable de success stories. La SOPREF a jeté les bases, et les DTC/Grosse Boîte, Bonsound, Opak, Véga, C4, Youyou.ca, Iconoclastes, Saboteur, Indica, Preste, GAMIQ, P572, HLM, Confiserie, Iro Productions, Slam Disques et autres ont repris le flambeau.

Dans ce contexte, la SOPREF n'était plus indispensable. La scène locale vole aujourd'hui de ses propres ailes. À titre de chroniqueur, assister à cette émergence a été pour moi un profond plaisir, voire un rêve devenu réalité. La SOPREF peut se consoler en se disant que sans les efforts de son personnel acharné, le milieu de la musique émergente ne serait pas en aussi bonne santé aujourd'hui. Reste à Jean-Robert Bisaillon à trouver une autre mission pour l'association. J'ai confiance, il trouvera.

D'UN OLIVIER A L'AUTRE

Adam & The Amethysts se produiront au Parc des Amériques le 30 août, à 19 h, dans le cadre du Kids Pop. - photo: Nicolas CôtéVous l'aurez lu entre les lignes, je quitte la barre de la chronique Scène Locale. Mon poste de chef du pupitre musique chez Voir est extrêmement prenant, et je n'ai plus le temps désiré pour me consacrer corps et âme à la relève musicale. La fin de la SOPREF dans sa forme actuelle m'aura permis de dresser un bilan tout en restant collé sur l'actualité.

Humblement, à titre de simple mélomane, je crois avoir tenu cette chronique au bon moment. Vivre de l'intérieur l'explosion Arcade Fire/Malajube aura été une sensation grisante. La scène a mûri au cours des années, et les fruits ont commencé à tomber sous mes yeux, ébahis. Merci à tous les groupes que j'ai vus en concert pendant ces six années. C'est grâce à vous si je me suis autant amusé en travaillant.

Olivier Lalande prendra le contrôle de la chronique dès la semaine prochaine. Toujours présent dans les salles de concert, il a de bonnes oreilles et une plume fort agréable à lire. Craint par certains groupes, il n'hésite pas à écrire ce que bien des gens pensent tout bas, ce qui me semble un atout pour se différencier. Découvrir la relève musicale est plus facile qu'avant. De nombreux blogues et sites spécialisés se sont ajoutés aux médias traditionnels maintenant plus sensibles aux buzz de la scène. Grâce à ses antennes, Olivier remettra les pendules à l'heure et continuera à vous faire découvrir les groupes de demain.

CONSEILS CONCERTS /

– Du 27 au 30 août, l'équipe du Pop Montréal prendra le Parc des Amériques (coin Rachel et Saint-Laurent) d'assaut pour y présenter 27 concerts en plein air. Présenté sous le nom de Kids Pop, la journée du 30 sera à ne pas manquer puisque Kara Keith, Katie Moore, Lederhosen Lucil, Socalled, Gambletron, Adam & The Amethysts (photo), Mixylodian et Hollerado donneront des concerts pour enfants (!!!) dès 14 h. Plus de détails au www.popmontreal.com .

photo: Nicolas Côté