Musique

Asexuals: l’origine du fais-le toi-même

La version originale des piliers punk Asexuals (le chanteur et guitariste John Kastner, le guitariste J. Collins, le bassiste Sean Friesen et le batteur Paul Remington) donnera son premier concert en 25 ans le 1er octobre au Cabaret Juste pour rire. Photo: Andi State En 1983, il n'y avait pas de Twitter, pas de MySpace, pas de Pitchfork, pas de blogosphère et encore moins de compagnies de disques intéressées aux bands montréalais… Ça n'a pas empêché un groupe local de se faire connaître à travers le monde et de mettre Montréal en valeur. À échelle restreinte, bien sûr, mais c'était avant la consécration punk des années 90, au moment où les Nils (le next big thing de l'époque) faisaient encore leurs premiers pas… En quatre années (le groupe a poursuivi jusqu'en 2000, mais avec un personnel différent et un son pop-punk allégé), les Asexuals ont fait le tour de l'Amérique et de l'Europe, largué deux albums classiques (Be What You Want, 1984, et Contemporary World, 1985) et inspiré la relève punk d'ici et d'ailleurs, ouvrant au passage pour des groupes comme P.I.L. et D.O.A.

Durant le festival Pop Montréal, le groupe donnera son premier concert sous sa formation originale depuis 25 ans. L'ex-leader John Kastner, qui l'a quitté en 1987 pour fonder les Doughboys (puis éventuellement All Systems Go), retrouvera ses camarades de la polyvalente Beaconsfield High School le temps d'un concert.

"On a fait beaucoup à une époque où c'était difficile d'être un band", résume Kastner, qui vit maintenant à Los Angeles, où il compose des trames sonores. On risque de le voir souvent à Montréal prochainement puisqu'il est de la nouvelle mouture de Bran Van 3000.

"À Montréal, à l'époque, il n'y avait que trois endroits où jouer: le Cargo, le Station 10 et les Foufounes. Une fois que t'avais fait ces trois endroits, soit tu allais jouer à l'extérieur de la ville, soit tu arrêtais de jouer pendant un bout de temps. Nous, tout ce qu'on voulait, c'était jouer!"

Âgé de seulement 16 ans, Kastner empoignera donc sa copie du magazine Maximum Rock'n'roll, section "scene report", puis le téléphone de ses parents pour planifier la première tournée de 50 dates du groupe. Celle-ci mènera à une autre, puis une autre… "J'ai appelé un promoteur, qui m'a donné le numéro de téléphone d'un autre, et ainsi de suite", relate-t-il. Selon lui, Montréal avait déjà un afflux de talents impressionnant, mais sa scène souffrait d'une certaine apathie. "Il y avait une qualité de vie, un confort, mais pas de lutte pour conserver ni accroître tout cela", note-t-il. Venant du West Island, les Asexuals faisaient par ailleurs figure de mouton noir. "Tout le monde pensait qu'on était des gosses de riches, alors que c'était faux! Aussi, on ne savait pas jouer aussi rapidement que tous ces autres groupes, comme Scum, Genetic Control ou Fair Warning…"

Si le monde de la musique a bien changé depuis, Kastner note qu'on est revenu au règne de l'autosuffisance. "Les contrats de disques en or, ça n'arrive juste plus! Plus que jamais, la règle, c'est: fais-le toi-même ou ça n'arrivera pas. C'est pour ça que j'aime un groupe comme Hollerado, qui va jouer avec nous lors de la réunion: ils sautent dans la van et jouent partout où ils peuvent, comme nous faisions!" Le 1er octobre au Cabaret Juste pour rire.

Fin de la chronique Scène locale

Il n'y a pas à dire, la scène locale a bien changé depuis l'époque des Asexuals. Si bien qu'il semble que la présente chronique ait elle aussi fait son temps. Après 16 années de rendez-vous hebdomadaires, cette dernière disparaîtra dès la semaine prochaine pour laisser plus de place au contenu du magazine BangBang, où je continuerai de signer des critiques de disques. Mon temps à la barre de cet espace aura été bref, mais ce fut un honneur et un plaisir de m'y trouver. Salutations et hommages à Patrick Marsolais, Éric Parazelli et Olivier Robillard Laveaux, qui en ont fait un phare pour l'actualité musicale locale, ainsi qu'aux artistes et artisans de la scène, qui font battre le cour musical de cette ville. N'oubliez pas: ceci n'est pas un club école!

À souligner /

– Le Quai des Brumes fête son 25e anniversaire tout au long du mois d'octobre. WD-40, Richard Desjardins, Avec pas d'casque, Vent du Mont Schärr, Jesuslesfilles, Tricot Machine, Chinatown, Canailles et plusieurs autres s'y produiront. Consultez le www.quaidesbrumes.ca pour la programmation.

Alaclair Ensemble

4,99

(Indépendant)

En voici un pour qui désespérait de la qualité du hip-hop franco local, dernièrement: un projet collectif rassemblant KenLo Craqnuques, Maybe Watson, Accrophone, Karma Atchykah, DJ Manifest et une dizaine d'autres. Similaire, en termes d'ambition et d'ouverture, au projet Movèzerbe, paru l'an dernier (qui incluait quelques joueurs communs), le résultat est largement supérieur. En lieu et place des arrangements live de ce précédent chapitre, on a ici une production croustillante et astucieuse, tantôt champ gauche (Moi chu down), tantôt old-school (Piles comprises). Il y a des grosses tounes (Guerre nucléaire, J'tanné d'attendre, Alaclair), de la belle étrangeté, de la haute voltige verbale… Sans conteste le meilleur album hip-hop local depuis des lustres. Le 8 octobre au Café Chaos.