Les livres s'empilent autour de moi. On en trouve sur le plancher, sous le lit, dans les sacs à dos, sur la table de la cuisine, entre les coussins du divan. Ils se rassemblent ici à un rythme presque épidémique. En fait, il n'y en a pas tant que ça, mais ils s'accumulent tout de même plus vite que je ne parviens à les lire. C'est une partie perdue d'avance.
Parfois, j'ai envie d'arrêter ma lecture en plein milieu d'un chapitre et de ranger le livre pour en prendre un autre plus intéressant. Il semble naturel, lorsqu'on lutte en permanence contre le retard, de ne pas perdre son temps avec un ouvrage qui ne nous plaît pas. Pourtant, je me permets assez rarement d'interrompre ma lecture. À partir du moment où je me donnerai cette liberté, on trouvera plus de livres non terminés que de livre non lus, dans cette maison.
Moi, c’est exactement le contraire.
Je suis en panique lorsque j’ai presque fini un livre et que je n’ai rien d’autre à lire d’intéressant après.
J’ai bien une réserve d’urgence (une boite pleine de vieux livres d’horreur des années 70-80 que j’ai gracieusement dépouillée d’un sous-sol en plein ménage du printemps) mais honnêtement, j’attends toujours le prochain livre d’un auteur qui a écrit un roman qui raconte l’histoire un peu bizarre de trois personnes qui, à prime abord, n’auraient jamais du se retrouver dans le même livre.
Qui que vous soyez, (quitte à vous offenser, j’opte pour la franchise, vous avouant que je ne vous connais pas !) je vous comprends. Mes livres entamés me harcèlent, voilà pourquoi j’en restreint le nommbre à trois, maximum. Trois enfants qui réclament leur mère lectrice, plus que ce nombre c’est l’éclatement de ma cellule familiale ! Je deviens dingue, allant d’un à l’autre, dépendamment de leurs besoins, de la lumière du jour, de mon humeur ou pour les impératifs de la vie quotidienne.
En ce moment, je me tape (j’en suis à l’avant dernier chapitre depuis belle lurette), « La génération lyrique », cet essai très intelligent sur le baby boomer de François Ricard. Cette lecture a été constamment (lisez plutôt allègrement) trahie par d’autres plus légères, distrayantes, étonnantes. Je l’ai abandonné très souvent à son sort de bec clos, un signet le baillonnant. Pourquoi ne pas l’avoir abandonner une fois pour toutes ? Pourquoi ne l’ai-je pas proposé en adoption ? Mais comment puis-je abandonner un enfant que j’ai désiré ? Et qui plus est un enfant intelligent qui pose des questions qui font réfléchir, brossant un présent à grands coups de couleurs du passé ? Autant dire s’exposer à mourir de culpabilité. Je tiens à la vie pour cela.
Quel beau sujet! Dans ma bibliothèque, tous les livres qui y sont rangés sont lus, sauf qu’il y a une étagère où ne se trouvent que les livres non lus (ou en cours de lecture). Il y a certains livres qui y sont depuis des années et je crois bien qu’ils y resteront, avant d’aboutir dans un magasin de livres d’occasion. Le record absolu dans ce domaine revient à Élie Faure et son essai « D’autres terre en vue ». Quand vais-je le lire? Cela semble de plus en plus improbable. Et plus longtemps un livre est livré à l’abandon, plus la possibilité de le lire diminue. Il y a là-dedans une probabilité mathématique qui se confirme à mesure que les jours s’écoulent.
J’ai longtemps essayé moi aussi de terminer la lecture d’un livre avant de passer à un autre. Maintenant, je préfère en mener trois ou quatre de front, façon de suivre un peu mes caprices et de lutter contre la tyrannie des livres…
Je peux tellement comprendre la situation. On prend des livres à la librairie, on en emprunte, mais on finit jamais par tous les lire. Non pas qu’on ne veut pas, mais il est parfois si difficil de vraiment rentrer dans l’histoire que ça décourage.
Combien de fois je me suis retrouvée en train d’essayer de me motiver? Je ne peux pas arrêter de lire tant que le chapitre n’est pas terminé, mais j’ai l’impression qu’il ne finira jamais. Une fois mon objectif d’atteint, je regarde le nombre de pages dans le prochain et je me dit que je devrais faire un effort pour le lire. De cette façon, il m’en restera un de moins à lire. Le but n’est plus vraiment la lecture, c’est d’en finir au plus vite.
Le problème, d’après moi, se trouve justement dans le fait qu’on se décourage avant même d’avoir ouvert le livre. La journée où la lecture ne sera pas vue comme une obligation, notre relation avec celle-ci prendra une toute autre tournure.
En effet, j’ai découvert il y a un an un auteur extraordinaire. Pour la première fois, j’ai lu un roman complet pour moi, en un temps record, et il avait plus de 400 pages. Rien m’obligeais à le commencer et encore moins à le finir. Quelle différence! Je lisais enfin pour moi, parce que je le voulais et parce que j’avais enfin trouver un auteur accrocheur. Preuve qu’il ne faut pas perdre espoir.
Vous touchez là cher Nicolas, l’un de mes principaux problèmes de conscience, le livre abandonné en cours de lecture. Il y a quelques années, jamais je ne m’autorisais à ne pas compléter un livre dont je débutais la lecture. Maintenant, mes goûts se diversifient, ma liste de titres « plein de promesses » ne cesse de s’allonger et mon nombre d’années à vivre de diminuer. En conséquence, sans faire de speed-dating, il faut que l’oeuvre me séduise ou m’intéresse dans les cinquante premières pages, sinon, tant pis. Je n’en suis pas fier mais j’ai appris à m’assumer. En conséquence, des livres non terminés, avec quelque fois l’espoir de poursuivre, il commence a y en avoir un certain nombre sur ma conscience. Mais ne vous inquiétez pas, je survis.
On peut élaborer longuement sur vos propos; on peut émettre nombres d’hypothèses. En voilà quelques-unes.
Rejoignez-vous par vos propos l’éditeur de l’Oie de Cravan qui prétend que l’on publie trop au Québec? Cela justifierait-il l’ennui qui vous prend à lire certains livres mais sûrement pas ceux de Tom Gilling ou Thomas Wharton qui sont des bijoux d’imagination.
En fait, selon plusieurs détracteurs de la littérature, 10% des livres méritent une publication. Ainsi, s’il vous prend l’envie de délaisser la lecture d’un livre en cours, n’est-ce pas parce qu’il ne méritait pas la publication? Cependant, si vous en poursuivez la lecture, peut-être rejoignez-vous un précepte de Gaston Miron qui prétendait que l’on apprend beaucoup à lire de mauvais poèmes?
On prétend que la littérature est un domaine mal médiatisé. On peut se questionner sur l’importance que l’on accorde à notre littérature. Par exemple, lorsqu’on lit les commentaires des internautes, lors des rentrées littéraires, faut-il s’étonner qu’ils concernent des écrivains de « circonstances » occupant surtout le métier de journaliste soit à la télé ou dans les journaux ou encore des gens connus pour être chanteurs, comédiens ou figure du domaine artistique mais pas juste essentiellement un écrivain?
Bref, veut-on faire une surenchère à une littérature qui ne le mérite pas (mais selon quel critère?). Dans le domaine de la chanson, les chanteurs qui s’imposent rejoignent un grand nombre de fans, pourquoi un écrivain qui ne pratique que le métier de la plume n’y parvient-il pas?
Bref, si vous lisez ces romans qui vous embêtent, n’est-ce pas par respect pour vos pairs qui les ont écrits?
J’ai longtemps vécu avec cette obsession d’avoir à terminer un livre que j’avais commencé.Je choisissais donc mes lectures avec circonspection parce que je voulais éviter de me battre avec moi-même pour trouver des raisons pour poursuivre dont la pire était qu’il s’agissait d’un écrivain incontournable.Je fuyais entre autre les romans en forme de brique parce que la bataille aurait duré longtemps et m’aurait démoralisé.
Et puis un jour,je suis tombée sur le livre « Comme un roman » de Daniel Pennac.J’ignore si vous le connaissez mais dans ce court livre sur le thème de la lecture,ce romancier nous partage des réflexions très sensées sur le dogme du livre,le « il faut lire ».Dans de courts chapitres,il nous propose les droits imprescriptibles du lecteur dont celui -magique pour moi- de ne pas terminer un livre ou encore de grapiller.Tellement rafraîchissant qu’à partir de ce moment j’ai décidé d’appliquer ces prin-cipes et mon univers littéraire a changé pour le mieux.Les piles de livres s’empilent mais peu importe puisque je vis la joie de lire ce que je veux quand je le veux.Et bizarrement,je réalise que depuis que je me suis accordé cette liberté,il est rare que j’abandonne un livre puisqu’à la faveur d’un moment particulier,il m’arrive de le reprendre et de finalement le terminer.Paradoxe.
Je vous laisse sur une citation d’un autre auteur que j’aime fréquenter: »C’est quoi la fin d’un livre?C’est quand vous avez trouvé la nourriture qu’il vous fallait,à ce jour,à cette heure,à cette page. » (Christian Bobin)
P.S Je ne connais pas ce qu’est un blogue,le vôtre est le 1er que je fréquente et il m’a attiré parce que je suis une maniaque de littérature.Je formule tout de même le souhait qu’il ne devienne pas trop rébarbatif et intellectuel de façon à empêcher ceux qui ne nagent pas dans les hautes sphères de l’intellect à le visiter.Je suis un peu inquiète après avoir lu la réflexion d’un membre qui pense qu’il faut un CV pour vous côtoyer.
« Comme un roman », un livre de Daniel Pennac que j’ai lu dans le cadre d’un cours à l’université. À la fin de son livre, l’auteur aborde les dix droits du lecteur. À la troisième position nous retrouvons « Le droit de ne pas finir un livre ».Il y a plusieurs raisons pour abandonner un livre, mais Pennac s’arrête sur « le sentiment vague d’une défaite ». Il m’arrive parfois de prendre un livre, de le commencer, de m’arrêter, de reprendre le passage que je viens juste de lire, de continuer, de m’arrêter une, deux ou dix fois et de me dire » c’est moi qui est stupide ou je ne comprends rien de ce qui est écrit ». Je place donc le livre dans ma bibliothèque en me disant qu’un jour j’y reviendrai. Peut-être que je ne suis tout simplement pas prête à lire cet oeuvre. Il arrivera peut-être un moment dans ma vie où je serai assez « mûre » pour mieux apprécier ce livre. Peut-être aussi que je n’arriverai jamais à l’apprécier, mais que je comprendrai enfin pourquoi ce livre ne m’accroche pas. Comme le dit Pennac « Contrairement aux bonnes bouteilles, les bons livres ne vieillissent pas. Ils nous attendent sur nos rayons et c’est nous qui vieillissons ».