Olivier Choinière quitte la direction artistique des Écuries
L’auteur et metteur en scène Olivier Choinière, prétextant notamment son désir de voir la roue tourner, se retire de l’équipe de direction artistique du Théâtre Aux Écuries pour laisser la place à Nini Bélanger et au Théâtre du Futur (Guillaume Tremblay, Olivier Morin et Navet Confit).
Dirigé par un collectif de compagnies de théâtre, le Théâtre Aux Écuries fonctionne par collégialité: une approche unique parmi les théâtres institutionnels montréalais. La compagnie L’Activité, d’Olivier Choinière, faisait partie de l’aventure depuis les tous débuts en 2005.
Mûrement réfléchie, la décision de Choinière de quitter ses fonctions au sein du Théâtre Aux Écuries est motivée par ce constat : «J’ai le sentiment d’avoir participé au projet d’une génération que j’ai vu naître et que, bien humblement, j’ai aidé à faire grandir. J’ai envie de laisser ma place à d’autres, avec le souhait que le dialogue que j’ai eu avec mes collègues durant toutes ces années soit nourri par de nouvelles façons de voir et de faire.» C’est avec beaucoup d’émotion qu’il quitte le théâtre qu’il a cofondé et qui a permis l’incubation et la création de pièces marquantes de son répertoire : ParadiXXX, Mommy, Projet blanc et Polyglotte.
Le créateur souligne aussi le chemin parcouru mais également les écueils rencontrés dans ce théâtre dont la mission est vaste et qui n’a peut-être pas été le sauveur attendu. « La fondation du Théâtre Aux Écuries a nourri beaucoup d’espoirs et suscité bien des attentes, parfois démesurées, créant inévitablement des déceptions et bien souvent de la confusion quant au rôle qu’il avait à jouer. Être à la fois un théâtre pour la relève et un théâtre pour ses compagnies résidentes, un centre de création mais aussi un diffuseur, un théâtre ancré dans son quartier qui défend d’un même souffle du théâtre de recherche et des formes alternatives… Nous avons choisi de faire beaucoup avec peu. C’était crucial pour exister. Je souhaite aux directeurs qu’ils en fassent moins, mais mieux. C’est essentiel pour le public comme pour les artistes qu’ils souhaitent réunir. »
Choinière évoque aussi les obstacles dans la cohabitation avec le Théâtre des Deux Mondes, qui ont permis il y a 10 ans la mise en place des Écuries en partageant leur espace de création sur la rue Chabot. « Le Théâtre Aux Écuries et Les Deux Mondes ont été contraints d’entrer dans un processus de médiation long et douloureux, qui a orienté le dialogue vers des jeux de pouvoir et des guerres de territoire. »
Lire le mot de départ d’Olivier Choinière
L’équipe qui l’entourait depuis 2005, Marcelle Dubois, Olivier Ducas, Francis Monty, Marilyn Perreault et Annie Ranger, accepte sa décision qui est dans la droite lignée de la philosophie de réinvention et de brassage d’idées des Écuries. Ils accueillent maintenant au sein de leur collectif la metteure en scène Nini Bélanger (Projet Mû) et les trublions du Théâtre du Futur (Olivier Morin, Guillaume Tremblay et Navet Confit).
«Inviter de nouvelles compagnies à diriger un lieu, c’est aussi se demander quelle est l’essence de ce lieu. Les trois mots qui nous viennent sont : collectif, multiple et structurant. Nous aimons être une meute non uniforme. Nous aimons que les esthétiques, les personnalités, les bagages de chacun colorent nos programmations et, plus largement, la vie du Théâtre Aux Écuries. […] Nous cherchons des semblables différents. Des partenaires de jeu et de fête. Des penseurs qui épouseront notre philosophie autant qu’ils nous remettront en question.»
Lire le mot de bienvenue aux nouvelles compagnies résidentes
Le passage ne se fait pas sans rendre à Choinière l’hommage qu’il mérite. Dans une lettre qu’ils ont fait paraître hier, les directeurs artistiques des Écuries soulignent l’apport inestimable de leur collègue, qui est l’un des artistes les plus importants de sa génération sur la scène montréalaise. « Olivier Choinière a indéniablement influencé et marqué la mission, les murs et la vie du Théâtre Aux Écuries par sa rigueur intellectuelle, sa réelle réinvention des conventions et l’authenticité de sa quête de liberté. À chacune de ses créations, nous étions fiers de voir le théâtre gagner en force, témoignant de la pertinence d’un lieu où la pensée, la jubilation, le choc des idées sont de véritables crédos. Dire. Faire. Oser. Observer. Aller là où ça grince. Ne pas se préserver. Rameuter. Faire la fête. Inviter les autres à la fête. Ça, c’est Choinière.»
Lire le mot d’hommage à Olivier Choinière