L'acteur Denis Gravereaux s'est éteint
Scène

L’acteur Denis Gravereaux s’est éteint

Décédé subitement d’une crise cardiaque le 15 décembre, le comédien Denis Gravereaux aura laissé des souvenirs vifs dans la mémoire des spectateurs montréalais.

L’acteur, qui répétait ces jours-ci la pièce Les souffleurs de verre (dont les représentations commencent en janvier à l’Espace Libre), est mort d’un arrêt cardiaque en pelletant la neige dans l’entrée de son domicile, dimanche en début d’après-midi.

D’origine française, Denis Gravereaux est né à Argenton-sur-Creuse en 1961. Après des études théâtrales dans différentes institutions françaises (notamment le conservatoire d’Orléans), il a entamé sa carrière sous la direction des metteurs en scène Daniel Mesguich, Pierre Barrat et Jacques Lassalle (entre autres).

Il s’est installé au Québec par la suite. Dès 1998, on le voit sur scène dans de nombreux spectacles. Il développe rapidement une complicité avec Brigitte Haentjens, avec qui il travaille dans les pièces Malina, Électre et Éden cinéma. Il rencontre ensuite Wajdi Mouawad et fait partie de la distribution de Willy Protagoras enfermé dans les toilettes, avant de jouer le père dans Littoral (dans la version qui tournera en France entre 1999 et 2001).

Son plus beau rôle aura certainement été celui de Bachir Lazhar, dans la pièce homonyme d’Evelyne de la Chenelière (rôle repris par Fellag au cinéma dans le long métrage Monsieur Lazhar, de Philippe Falardeau). Dans ce spectacle solo mis en scène par Daniel Brière, Denis Gravereaux devenait un immigrant algérien qui s’improvise enseignant et se heurte aux différences culturelles avec plus de difficultés qu’il ne l’avait imaginé, mais avec une humanité profonde et un attachement senti pour ses élèves. Il donnait à ce personnage beaucoup de dignité dans l’adversité, et mettait bellement en lumière son humour bon enfant et son intelligence vive.

Il a aussi travaillé sous la direction de Martin Faucher, André Melançon, Téo Spychalski et Jean-Marie Papapietro.

Sur la scène du Prospero, dans les mises en scène éclatées de Gregory Hlady (Coeur de chien, La noce et La danse de mort), il pouvait s’amuser dans un tout autre registre de jeu: pulsionnel, légèrement clownesque, mais toujours hyper-précis. Il excellait dans ces interprétations hors de tout psychologisme et a développé au sein de ces productions une complicité palpable avec les comédiens Frédéric Lavallée et Paul Ahmarani.

On l’aura aussi remarqué dans L’Affiche, de Philippe Ducros, dans le rôle d’Abou Salem, qu’il jouait encore tout récemment (la pièce a été présentée à Montréal et à Québec à plusieurs reprises depuis 2009, mais aussi en France aux Francophonies en Limousin). Dans un rôle plus combatif et plus colérique, il imprimait tout de même sa présence tranquille, son regard profond et intelligent. Dans les personnages d’hommes expérimentés que la vie affecte et ébranle mais ne sait jamais vraiment anéantir, Denis Gravereaux n’avait pas son pareil.

Récemment, il jouait aussi, en demi-teintes, l’énigmatique homme recevant chez-lui un vendeur de parapluies dans L’enclos de l’éléphant, d’Etienne Lepage, dans une mise en scène de Sylvain Bélanger.

Qu’il repose en paix.

Il laisse dans le deuil sa femme Marlène Morin, leurs deux garçons Félix et Théo âgés de 14 et 20 ans.