Journée mondiale du théâtre : Le CQT célèbre le théâtre québécois
C’est la journée mondiale du théâtre! Pour l’occasion, le comédien, auteur et metteur en scène Alexis Martin signe le message québécois en hommage aux arts de la scène et le Conseil québécois du théâtre vous invite à un 5 à 7 de célébrations.
De 12 h à 13 h 30 et de 16 h à 17 h 30, à l’Espace culturel Georges-Émile-Lapalme de la Place des Arts, les étudiants des écoles professionnelles de théâtre font de courtes prestations théâtrales pour les passants. Plus tard, le Conseil québécois du théâtre vous invite au Bar à vin Place Deschamps pour un événement animé par Dominique Leduc, comédienne et présidente du CQT. Il y aura lecture du message québécois, rédigé par Alexis Martin, ainsi que de sa version anglaise traduite et lue par le dramaturge Michael Mackenzie.
La soirée se poursuvra par la remise des Prix Sentinelle, remis par le Conseil québécois du théâtre, et une célébration des lauréats des divers prix reçus en 2013.
À 19h, il y aura lecture de certaines lettres rédigées dans le cadre de la campagne Si j’étais ministre de la Culture.
Le message québécois de la Journée mondiale du théâtre
Par Alexis Martin
De tous les miroirs que l’homme a inventé, le théâtre est peut-être le plus étonnant : il offre une surface sans tain, qui absorbe autant de lumière qu’elle en réfléchit. Le théâtre est un œil qui regarde l’image inversée de lui-même, une traversée des ombres, où le plus opaque devient soudainement ce qui éblouit : le présent, le contemporain, c’est ce que traque le théâtre dans les paroles et les gestes de ce qui est passé, c’est une machine à répandre l’ombre sur les lumières factices et débusquer les opacités qui parlent.
C’est un acteur ou une actrice qui convoque les fantômes d’une humanité élusive, impalpable et qui pèse pourtant de toute son ombre sur notre vie. Et de cette condensation des ombres, des manteaux de basalte naissent et tombent sur nos épaules, nous devenons les chevaliers errants du poème, nous retournons à l’ombre qui est aussi une éclaircie dans la forêt, là où est tapi l’émerveillement, cet étonnement primordial, cette avenue déchirée où nous nous sentons exister enfin, pour la première fois, distincts et nombreux pourtant, nombreux mais livrés au monde.
Dans le faisceau du projecteur, l’acteur, l’actrice voient danser des mondes, pulvérisation des siècles qui flottent en convois désordonnés, Tatars refluant vers la Mongolie, foule hurlant sa folie de machine dans les rues de Manhattan, germination jaune des nuits d’insomnie, Bamako saignée à blanc, le moutonnement échevelé des mers du Sud, l’émiettement des textes de loi, les flocons de salive de mille oraisons, de dix mille prêches, de milliards de métaphores échouées et transformées en sel piquant par le branle qu’un Désir souverain imprime au monde, unique moteur des astres et des cœurs. Et tout autour de ce faisceau fourmillant, il y a la mince gangue de l’ombre où l’être s’est retiré, attendant que la poussière retombe. Qu’il ou elle se taise, et le silence recompose sa toile, un moment suspendu au-dessus du plancher de scène, et nous sommes pris de vertige, celui de l’être découvrant sa nudité, face à lui-même et au monde.
L’œil se regarde nu et souffrant, peut-être, mais souverain, dans le théâtre d’une opacité éblouissante.