Peter Doig : Nulle terre étrangère en exclusivité au MBAM
Du 25 janvier au 4 mai, le Musée des beaux-arts de Montréal présente en exclusivité l’exposition Nulle terre étrangère de Peter Doig. Il s’agit d’une première rétrospective majeure en Amérique du nord pour ce peintre de renommée mondiale.
Nulle terre étrangère de Peter Doig est la première exposition d’envergure de ce peintre de renommée mondiale en Amérique du Nord depuis sa rétrospective flamboyante de mi‐carrière, exposée à la Tate Britain de Londres, au Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris et à la Schirn Kunsthalle de Francfort, en 2008. Evénement phare, cette exposition s’inscrit dans le cadre d’une saison ambitieuse de rendez‐vous avec l’art contemporain au MBAM. Plus tard cet hiver, le MBAM accueillera des oeuvres du Musée d’art contemporain de Montréal, dans le cadre de l’exposition 1+1=1, célébrant les 50 ans du MACM et les collections d’art contemporain des deux musées.
« Avec son oeuvre profondément inscrite dans une tradition, qui réfère aussi bien à Gauguin, à Bonnard qu’à Munch, Peter Doig propose un regard réfléchi, esthétique et mystérieux sur les arcanes du métier de peintre qui trouve sa juste place dans un Musée des beaux arts », affirme Nathalie Bondil, directrice et conservatrice en chef.
Peter Doig. Nulle terre étrangère est une coproduction du MBAM et des National Galleries of Scotland d’Édimbourg, où elle a connu un immense succès à l’été et à l’automne 2013, un événement que les critiques internationales ont souligné depuis le New York Times jusqu’à The Economist. L’exposition ne fera qu’un seul arrêt en Amérique du Nord, au MBAM. Pour le peintre écossais, la présentation de cette exposition dans les deux villes qui jouèrent un rôle central dans sa vie d’artiste – Édimbourg, son lieu de naissance, et Montréal, où il passa une partie de sa jeunesse et où il retourna en tant qu’adulte – est très riche de sens : « Le fait d’exposer à Montréal, une ville où j’ai vécu et travaillé et que j’aime profondément, compte beaucoup pour moi. Mes années au Québec durant mon enfance, à l’époque de l’Expo, au début de mon adolescence et, plus tard, ma vingtaine passée à Montréal, ont été déterminantes pour l’évolution de ma peinture. J’ai découvert les salles du Musée quand j’étais enfant. À l’idée d’y exposer aujourd’hui, je me sens extrêmement privilégié. », confie l’artiste.
Au long des trois décennies de sa carrière, il a su insuffler une vie nouvelle à un médium qui, pour beaucoup, avait perdu sa raison d’être. Son inventivité formelle, la sensualité unique de sa palette et sa suggestivité romantique le situent en effet bien loin de l’approche conceptuelle qui caractérise l’art contemporain. Sa volonté de relever le défi que pose encore la peinture des Gauguin, Matisse, Bonnard, Marsden Hartley et Edward Hopper le place plutôt dans une longue lignée de grands coloristes, des maîtres de l’expression picturale aux oeuvres richement texturées.
Peter Doig. Nulle terre étrangère est la première exposition consacrée à la production de l’artiste depuis qu’il a découvert La Trinité, en 2000, et qu’il s’y est établi, en 2002 : un tournant dans sa peinture. Comme l’a écrit le poète écossais Robert Louis Stevenson dans Les Squatteurs de Silverado : « Il n’existe nulle terre étrangère. Seul le voyageur est étranger. » Pendant la période qui fait l’objet de cette exposition, Doig, alors établi à la Trinité, a également partagé son temps entre Londres, New York et Düsseldorf. Après avoir quitté Édimbourg à un très jeune âge, cette existence quasi nomade, ses souvenirs d’une enfance vécue en partie au Canada et ses études à Londres, où il a passé une vingtaine d’années, lui ont permis d’accumuler un foisonnant bagage visuel et un vaste répertoire de motifs auxquels il puise en permanence.
« Au fil de ses innombrables arrivées et départs, de ses séjours à la Trinité et à New York entre lesquels il partage son temps, Doig a entrepris un long voyage qui l’a conduit des souks de Tanger à l’abstraction, d’une rêverie peuplée de mondes intérieurs inexplorés à la représentation des décombres laissés par l’histoire sur son sillage. Quels chemins, se demande‐t‐on, peut encore fréquenter le peintre pour qui nulle terre n’est étrangère? », analyse Stéphane Aquin, commissaire de l’exposition.
La présentation du MBAM lève notamment le voile sur la démarche de composition picturale si singulière de l’artiste, en exposant côte à côte dessins préparatoires et toiles achevées. Elle réunit plus d’une centaine d’oeuvres, dont quarante tableaux majeurs, études, documents personnels et une vaste sélection d’affiches de club de films, le tout réalisé au cours des quatorze dernières années. L’accent est en outre mis sur les images récurrentes de l’artiste. À la fois dépouillées et monumentales, ces oeuvres variées d’une captivante beauté et d’une impressionnante liberté sont l’aboutissement d’une série d’esquisses et d’adaptations dont beaucoup n’ont encore jamais été révélées au public.
Peter Doig. Nulle terre étrangère est organisée par le Musée des beaux‐arts de Montréal et la Scottish National Gallery of Modern Art d’Édimbourg. Le commissariat de l’exposition est assuré conjointement par Stéphane Aquin, conservateur de l’art contemporain au Musée des beaux‐arts de Montréal, et Keith Hartley, conservateur en chef de la Scottish National Gallery of Modern Art.
Parcours de l’exposition
Peu de cadres d’exposition sont aussi propices à l’oeuvre de Peter Doig que les grandes salles classiques du Pavillon Michal et Renata Hornstein. Ces galeries de 1912 ont été dessinées pour un certain type de peinture, celle de la fin du XIXe siècle et du début du XXe, qui est celle, précisément, de laquelle s’inspire ouvertement Peter Doig. C’est à la grande tradition des Bonnard, Matisse, Gauguin, Munch, mais aussi de James Wilson Morrice et de Tom Thomson, peintres canadiens que Doig admire également, ou de Wilfredo Lam ou Armando Reveron, artistes cubain et vénézuélien de renom, que se rattache l’oeuvre de Peter Doig. S’il est un héritier légitime de ces très grands maîtres, tous s’accordent à dire que c’est lui. Le parcours se déroule comme un voyage, comme une plongée à la fois dans les secrets du travail créatif de ce grand peintre et dans l’imaginaire qui peuple ses toiles et les rend si évocatrices. D’une galerie à l’autre, les visiteurs découvriront les grands thèmes qui structurent l’oeuvre de Peter Doig, à commencer par la peinture elle‐même, dont il explore les moyens expressifs, le pouvoir narratif, et l’histoire, avec une virtuosité sans pareille. Scènes arrachées au quotidien, paysages tropicaux, visions d’êtres fantomatiques, figures solitaires, vaisseaux, forêts, murs, il n’est pas de sujet qui ne soit pour Doig l’occasion d’un investissement absolu dans l’acte de peindre. Parfois, il peut prendre des années à terminer une toile, souvent, il revient sur le même sujet. L’exposition comprendra un certain nombre de ces « paires » d’oeuvres qui partagent le même motif sans toutefois appartenir à une série. Ces tandems, dont plusieurs seront présentés au public pour la première fois, témoignent d’une obsession véritable et d’une extraordinaire inventivité.
Un livre d’art
Dans la foulée de l’exposition, le MBAM fait paraître un catalogue scientifique superbement illustré, en versions anglaise et française. Co‐publié sous la direction de Parinaz Mogadassi par Hatje Cantz et les éditions scientifiques du MBAM pour la version française, ce livre d’art réunit des essais de Keith Hartley, conservateur en chef de la Scottish National Gallery of Modern Art ; Stéphane Aquin, conservateur de l’art contemporain au MBAM, et du critique new‐yorkais Hilton Als, illustre auteur et collaborateur au magazine The New Yorker. On y trouve de plus une entrevue de l’artiste réalisée par Angus Cook, artiste écossais. Le catalogue de 224 pages, rehaussé de 230 illustrations, apporte une importante contribution à l’étude de Doig, en jetant un nouvel éclairage sur ses oeuvres récentes.
Programmes éducatifs et culturels
À partir de février 2014, l’équipe de conception de l’exposition et d’autres experts animeront à Montréal une série de conférences et de tables rondes ayant pour thème la place de Doig dans la culture et l’histoire de l’art. Les conférenciers traiteront ainsi de sujets allant du paysage dans l’art contemporain à l’influence du cinéma et de la photographique sur sa peinture, en passant par les notions d’identité et d’appartenance culturelles. Le Musée mettra de plus à l’affiche des films indépendants et d’art et d’essai sélectionnés par Doig lui‐même, dont certains présentés à Port of Spain pendant le StudioFilmClub (SFC). Ce club de cinéphiles, qu’il dirige depuis 2003 avec l’artiste trinidadien Che Lovelace, connaît une popularité telle qu’il réunit depuis 2006 amateurs et invités autour de films choisis, au sein du Trinidad + Tobago Film Festival. Parmi la programmation éducative et culturelle du Musée, mentionnons également des visites guidées, des visites destinées aux groupes et aux groupes scolaires, des ateliers d’art, des ressources pédagogiques en ligne et des ateliers d’art en famille sur l’oeuvre de Doig, tous les week‐ends de l’exposition.