Livres

Amazon autorisée à s’installer: les libraires indépendants inquiets

«On est déçu, mais pas surpris. Je le ressens surtout comme un manque de confiance envers les libraires, c'est dommage.» C'est en ces termes que la présidente de l'Association des libraires indépendants du Québec, Marie-Hélène Vaugeois, accueille la nouvelle de l'ouverture prochaine d'un entrepôt Amazon en Ontario.

Le gouvernement canadien a fait savoir hier après-midi qu'il autorisait l'implantation du centre de traitement des commandes qui permettra à l'entreprise américaine de distribuer plus aisément les livres à sa clientèle canadienne. «Notre gouvernement a à cœur de renforcer l'économie canadienne en mettant tous ses secteurs à contribution, particulièrement celui des arts et de la culture», a déclaré le ministre James Moore. «Amazon a fait preuve de volonté à promouvoir les produits culturels canadiens. Nous sommes heureux de constater que l'organisme poursuit sur cette lancée grâce à un nouvel investissement.»

Le gouvernement avance notamment qu'Amazon s'est engagée à investir plus de 20 millions de dollars, dont 1,5 million de dollars pour des activités et des prix culturels au Canada ainsi que pour la promotion des livres d'auteurs canadiens sur les marchés internationaux. On mentionne par ailleurs que l'entreprise d'engage à créer des emplois. «J'ai un peu peur que les emplois gagnés dans les entrepôts soient perdus dans les librairies, note Marie-Hélène Vaugeois. Quant aux fameux investissements, pour le moment c'est un peu obscur.»

La présidente de l'ALQ se dit très septique quant à la promotion de la littérature canadienne, promise par Amazon: «Il existe Amazon.fr, et ça n'a pas du tout permis de faire connaître la littérature française à l'étranger.» Elle parle enfin de son inquiétude face au contrôle que pourrait exercer l'entreprise américaine sur le marché du livre canadien: «J'étais au Salon du livre de Paris la semaine dernière, et je me suis entretenue avec Guillaume Husson, directeur général du syndicat des librairies françaises. Il m'expliquait à quel point en Angleterre, les gros joueurs comme Amazon contrôlent la production, à tel point que les éditeurs ne choisissent plus ce qu'ils publient!»

– Aurore  Lehmann