Musique

Francos: Retour soirée d’ouverture

Nous avons assisté hier à la démonstration parfaite de ce que sont devenus Les FrancoFolies depuis quelques années: un seul et même événement divisé en plusieurs micro-festivals pour mieux régner. Alors qu'une foule éclectique assistait à la Grande fête multiculturelle de Marco Calliari devant la grande scène, un public plus homogène, plus jeune, profitait d'un mini festival indé où Chocolat, Orange Orange, Le Roi Poisson, Rudy Caya et Électro Lise se sont produits sur trois scènes isolées à l'Est du site.

Vers 20h, les membres de Chocolat n'ont pas alimenté leur réputation de musiciens brise fer, se contentant de bien jouer leurs chansons comme de vrais gentleman. Leur répertoire francophone teinté par des références à Bob Dylan électrique et au Velvet Undergound fait de Chocolat un groupe à part au Québec. Il ne faudrait pas qu'ils se mettent la province à dos à cause de leur comportement hors scène déplorable. Jimi Hunt possède une voix reconnaissable entre mille, et son groupe a tout compris des bases rock hypnotiques et déglinguées.

On a tout de même dû partir avant la fin pour attraper quelques pièces d'Orange Orange qui se produisait juste en face de la superbe grande roue (surtout lorsqu'elle s'illumine dans la noirceur venue). Aussi aperçu avec Motus 3F et Gatineau, la moitié masculine du duo, Dom HameLLL, est un meneur de foule né. Charismatique et si cabotin qu'on finit par s'y attacher, il a passé la soirée à s'adresser au manège et à son ami, FrancoFolies, qu'il a trouvé très attentif tout au long du concert d'Orange Orange. Il faut dire que l'humour des pièces, ainsi que l'exubérance de la chanteuse Sabrina Sabotage déconcertent plus qu'autre chose. Difficile de prendre le groupe sérieux. Après quatre chansons, nous avions compris la recette et retournions nous rincer les oreilles à Chocolat.

Le Roi Poisson s'est ensuite amusé sur la scène Loto-Québec. Le quintette a invité le rappeur Maître J pour une pièce et nous a même présenté sa mascotte, poisson multicolore arborant une couronne d'argent. Toujours en progression, le groupe peut se lancer dans une pièce prog / funk générique, digne de Cégep en spectacle (dixit Olivier Lalande), mais peut ensuite enchainer avec un bijou de chanson comme Ouvrier qui, après plus de trois heures de musique, me trottait toujours en tête lors de mon retour à la maison. Le talent est là. L'expérience amènera la constance.

Puis Rudy Caya nous a fait sourire grâce aux quelques vieux succès des Vilains Pingouins qu'il a joués hier entouré de ses jeunes loups, dont le guitariste Marc-André Beaudet des Sainte Catherines. Pour le reste, à l'exception peut-être de Guantanamo Bay, ses nouvelles pièces n'égalent pas mélodiquement son vieux répertoire, ce qui a coupé l'efficacité du concert. Les chansons plus douces de son dernier disque, Le Taureau, ont été majoritairement évacuées au profit des morceaux plus énergiques. Heureusement, parce qu'on préfère Rudy Caya le rockeur à Rudy Caya le mélancolique.

En terminant, que dire d'Électro Lise sinon qu'il s'agit d'une véritable blague, d'un pastiche douteux et simpliste de l'électro-club salace de TTC, Omnikrom et autres Yelle. Dans le rôle de «Je veux être calife à la place du calife», Annie Dufresne ne donne pas sa place. Deux ans après la vague rock garage du début du siècle, elle était rockeuse pure et dure sur son premier disque. Trois ans plus tard, elle est devenue cette Lise, personnage full-cool-électro-super-fluo au service d'un jeu de mot facile. Parlez-moi d'une girouette. On a l'impression que si le reggae devenait tendance dans deux ans, elle se rebaptiserait Rasta Girl et se débarrasserait de cet accent français bidon pour prononcer ses R comme des W. On est parti lorsque Pascal Languirand de Trans-X (groupe pionnier de l'électro québécois) est venu joindre Lise pour interpréter le succès Living on video. Visiblement ralenti (par des années d'excès?), le chanteur avait de la misère à suivre la comédienne qui donnait SON show. La scène était pathétique.