Musique

Le choc Savage

Chouette soirée à la Casa del Popolo hier avec Caroline Keating, Sean Nicholas Savage et Philémon
Chante
, assurément trois des auteurs-compositeurs locaux les plus
intéressants du moment.

Il s'agissait probablement du dernier concert de Caroline
Keating, le pendant anglophone de Cœur de pirate, en tant que Montréalaise,
puisqu'elle déménage à Halifax dès cette semaine. On peut déplorer les chansons
un peu faiblardes de la demoiselle – qui s'approprie le style vibrant de Fiona
Apple sans la finesse mélodique -, mais elle a une présence agréable, chaleureuse,
délicate, quoiqu'assurée. Elle n'a pas hésité à gentiment invectiver son public
lorsque quelques rires se sont fait entendre durant une pièce menée en duo avec
Sean Nicholas Savage. «Vous êtes tous: ‘'non, non, je ne veux rien sentir, je
veux juste faire le party!''» Mais bon, c'était une heure à peine après la game fatidique et il y avait du festoiement
dans la place.

En lever de rideau, Philémon Chante – en solo pour
l'occasion – a adroitement installé l'ambiance avec ses chansons aériennes,
tout aussi solides lorsqu'ainsi mises à nu. Elles passent bien devant un public
principalement anglophone et il le sait. Il me disait par après se produire
presque plus souvent devant ce genre de public depuis un an.

Le gros coup est toutefois arrivé avec Sean Nicholas Savage.
On vous parle à répétition de son excellent album gratuit (toujours disponible
via le site d'Arbutus Records),
mais je ne m'attendais pas à ce que j'ai vu. Savage est monté sur scène avec un
gros manteau et une guitare douze cordes, deux choristes (Jane des Silly Kissers et Raphaelle de Braids), un batteur (Thom des Silly
Kissers) et un violoniste. Il a tenu la salle en respect pendant une trentaine
de minutes sans microphone, sans amplification aucune, avec un charisme plutôt époustouflant.
Gentiment, prestement, il incitait le public à se taire avant de commencer
chaque pièce et s'animait d'une espèce de ferveur à la limite du théâtral, qui
n'avait cependant rien de forcé, et donnait à chaque pièce une vie propre, un
impact plus fort encore que si le monsieur était passé par une puissante sono.
Très particulier, comme dégaine. Très classique, mais en même temps très à
propos. Savage semble posséder naturellement une candeur, une fougue et une
spontanéité que bien des indie-rockeurs ne peuvent que simuler. Un bien
précieux moment.