Duu & ojo: Naïveté controlée
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Duu & ojo: Naïveté controlée

Après avoir foulé la scène avec de nombreux projets tels que Caltâr-Bateau et Klô Pelgag, le multi-instrumentiste Étienne Dupré nous arrive aujourd’hui en solo avec un tout premier EP sous le pseudonyme Duu, sur lequel il a travaillé avec l’artiste visuel ojo. Discussion croisée avec les deux créateurs.

Alors qu’il peut sembler naturel d’associer Duu et ojo, les deux artistes évoluant côte à côte dans la formation Louize, ce n’est pas une collaboration automatique qui s’est amorcée entre eux avec ce nouveau projet musical d’Étienne Dupré. « C’est la musique qui est venue en premier, mentionne ce dernier. J’avais toujours mis de côté la composition solo, pour moi-même, parce que j’avais peu de temps pis Caltâr-Bateau venait un peu remplir ce besoin là de compo. Quand le groupe a arrêté, j’avais comme le go pour le faire. » Il s’est donc mis à l’oeuvre, flanqué de son ami et collaborateur de longue date JB Pinard à la prise de son et au mixage, tissant la trame musicale qu’il pouvait enfin faire pour nul autre que lui, à son goût. « Je suis extrêmement perfectionniste dans la musique, j’ai des idées bin précises pis je suis pas satisfait tant que c’est pas au moins aussi bon que ce que j’imaginais. JB a été vraiment, vraiment patient sur ce projet-là, j’aurais pas pu faire ça avec un autre. »

Un coup les six morceaux composés et enregistrés, le moment était venu pour Étienne de passer à l’étape suivante: le look du projet. « Dans mon appréciation de la musique en général, le côté visuel a toujours été hyper important, et ça a toujours teinté mon écoute. J’ai toujours trippé sur des artistes musicaux qui avaient des images vraiment fortes. Je me disais que tant qu’à faire ma musique à moi, j’allais pouvoir faire quelque chose de vraiment le fun de ce côté-là. En parlant à des gens pis en me parlant à moi-même, je me suis rendu compte que les dessins d’enfant ça me parlait vraiment. À chaque fois que je vois un gribouillis d’enfant, je suis fasciné de me dire qu’il ne se rendait même pas compte, à ce moment-là, qu’il était en train de faire de l’art. »

Plutôt que de s’arrêter à illustrer son EP avec un dessin d’enfant, Étienne a voulu pousser le concept plus loin. C’est là qu’ojo lui est venu en tête. Ce dernier incorpore effectivement de nombreux éléments plus naïfs à son art. Les deux gars étant amis de longue date, la collaboration allait de soi. « Dans ma recherche créative, explique ojo, c’est un peu ça le jeu. Je dessine avec la mauvaise main, j’installe un pinceau au bout d’une pôle pour me mettre dans la marde, approcher un certain niveau de naïveté. » Lorsque les deux amis se sont mis à réfléchir au concept, ils ont eu comme un flash: intégrer de réels dessins d’enfants dans le processus. Ils ont donc entrepris d’organiser un atelier avec 25 enfants de 6 à 9 ans dans une école alternative. Avec en fond sonore la musique de Duu, les jeunes devaient dessiner, sans contrainte, ce qui leur passait par la tête. Un coup l’écoute finie, ojo s’est mis à l’oeuvre. Il devait repasser en noir, avec une minute par dessin maximum, sur les esquisses enfantines pour en faire ressortir une autre dimension, aller plus loin dans l’esthétique.

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      « C’était hyper intéressant comme exercice, mentionne Étienne, car ça replaçait un peu ojo au même rang que les enfants, vu qu’il avait très peu de temps sur chaque dessin. Le but était d’enlever la notion d’expérience du processus. » Au final, l’art simpliste des jeunes et les prédispositions d’ojo pour ce type d’imagerie ont donné un résultat très fusionnel. « Pour moi, c’était tout un rush, développe ojo. Les enfants n’avaient droit qu’à des couleurs, et moi qu’à du noir. Quand j’ai commencé, je peux te dire que c’était bin intense. Je suais à grosses gouttes pour essayer d’amener chaque image un peu plus loin en 60 secondes, avec les parents qui voulaient voir ce qui se passait par-dessus mon épaule, moi qui garrochait quasiment les dessins finis à terre pour passer à un autre, c’était vraiment une expérience spéciale. »

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      « Étonnament, conclut Étienne, tout ça colle vraiment bien avec la musique, qui est tout sauf naïve. Je suis vraiment très, voire trop, cérébral dans ma composition. Par le clash qu’il y a entre les deux, je trouve qu’il y a quelque chose de parfait à ça. J’avais besoin de quelque chose de plus libre au niveau visuel, alors que la musique est très calculée. »

      Le EP Contre-Cycles sera lancé le dimanche 27 mai au Ministère, où le public pourra également admirer les oeuvres collaboratives en vernissage. Pour suivre ojo, c’est sur son Instagram que ça se passe. Retrouvez plutôt Duu du côté de Facebook.