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Zones franches municipales : le droit de faire n’importe quoi

On apprenait cette fin de semaine que la Ville de Québec avait réclamé par l’entremise d’un mémoire l’abolition des référendums locaux. Ces derniers constituent « un recours légal qui permet aux citoyens d’accepter ou non les propositions de modification de certains objets des règlements de zonage et de lotissement« . Ainsi, si vous n’êtes pas d’accord avec un nouveau règlement qui transformerait le parc où vos enfants vont jouer avec des seringues souillées en stationnement sur cinq étages, vous pouvez le contester en organisant une pétition afin de forcer la tenue d’un référendum.

Cet exercice démocratique semble nuire aux ambitions de la Ville de Québec et de son maire napoléonien qui voient la chose comme une lourdeur administrative. Il est évident que de telles dispositions empêchent de planter des colisées un peu partout et peuvent être gênantes pour les municipalités dont l’aménagement est guidé par les promoteurs immobiliers.

Le ministère a heureusement refusé cette proposition. Sa solution n’est pas nécessairement mieux puisqu’il veut modifier la loi sur l’aménagement et l’urbanisme pour permettre la définition de zones franches où il serait impossible de demander des référendums.

À plus grande échelle, la mondialisation a permis la création de zones franches par des gouvernements désireux d’attirer les entreprises sur leur territoire. Ces zones permettent à ces entreprises de se soustraire à certaines lois afin d’être plus rentables ou productives. On parle de lois fiscales comme de lois du travail, ce qui peut entraîner certaines dérives quant au traitement des employés.

Évidemment, au niveau municipal, l’impact de ces zones hors-là-loi est moindre et surtout, circonscrit à une seule loi, celle qui permet de demander la tenue de référendums pour bloquer un projet. Pas de maquiladoras en vue dans la région de Mascouche.

L’objectif du projet de loi 47 qui introduit cette nouvelle disposition est de promouvoir une vision plus globale de l’aménagement en réduisant le phénomène NIMBY (not in my backyard, ou pas dans ma cour, mais PDMC ça se dit moins bien à voix haute) qui peut nuire au développement si l’opposition est systématique.

Il entraîne toutefois des effets pervers puisqu’il ne semble pas y avoir de limites à la désignation de zones franches :

« Le problème est qu’il n’existe aucune restriction aux zones franches. Elles peuvent s’appliquer partout, y compris dans des arrondissements historiques et naturels. Cela implique que la Ville de Montréal a dorénavant le feu vert pour faire ce qu’elle veut, y compris privatiser le mont Royal. »

L’Ordre des Urbanistes du Québec estime quant à lui que le gouvernement fait fausse route et propose que les référendums municipaux portent sur les plans d’urbanisme plutôt que les règlements de zonage afin d’assurer une vision plus globale du développement. Ainsi, les citoyens ne pourraient plus s’opposer à des projets uniquement parce qu’ils sont dans leur cour, mais seulement s’opposer à certains objectifs d’aménagement présentés par leur municipalité.

Cette solution semble un bon compromis. Il serait toutefois peut-être difficile de mobiliser la population au sujet de propositions qui ne touchent pas immédiatement et concrètement leur quotidien, leur qualité de vie. Même moi qui suis urbaniste de formation, je n’ai pas le temps de m’impliquer dans la vie municipale tellement je suis occupé à suivre le Canadien.

Dans tous les cas, une plus grande sensibilisation de la population aux enjeux du développement urbain permettrait sans doute des aménagements à l’image de celle-ci, qui après tout, les utilisent au quotidien…