À l’Opéra de Québec, une rare occasion de voir Nabucco
La puissante fresque de Verdi n’a pas été présentée dans la capitale nationale depuis près de 25 ans. Œuvre magistrale, réputée techniquement difficile pour ses interprètes, elle prend vie à l’Opéra de Québec avec le baryton James Westman dans le rôle-titre. Conversation.
«Pour moi, c’est une œuvre de calibre carrément olympique», lance James Westman, saisi d’enthousiasme et de vertige quelques semaines avant d’enfiler les habits autoritaires du roi de Babylone. Écorché par la prise en otage de sa fille par l’ennemi hébreu, puis meurtri par la révolte d’Abigaille, son autre fille présumée, Nabucco est un personnage triplement violenté par le sort, à des niveaux intimes autant qu’à l’échelle politique et spirituelle.
«Certains des airs de cet opéra sont parmi les plus difficiles du répertoire, explique Westman. D’abord en raison de leur intensité, mais surtout parce qu’ils demandent une capacité à interpréter tout à la fois la fragilité et l’autorité, puis, du même coup, la sensibilité émotive du personnage et sa prestance d’homme politique. Il faut embrasser toute cette étendue parfois au cœur d’une seule phrase mélodique.»
Dans cette œuvre de jeunesse, qui a fait vivre à Verdi son premier grand succès international, le compositeur a obéi à ses ambitions les plus folles, façonnant non seulement une partition riche en émotions mais également des chœurs remarquables. Le célèbre chœur Va pensiero, certainement l’un des plus connus du répertoire lyrique, offre de grands moments d’intensité dramatique. On a évidemment hâte de voir ce qu’en fera l’Opéra de Québec! Pour patienter un peu, les amateurs peuvent [youtube href= »https://youtu.be/GS6L_9xUT5E »]visionner cette interprétation passionnante[/youtube] du Metropolitan Opera de New York, de 2002.
James Westman, de retour à l’Opéra de Québec après une interprétation enlevante du rôle de Scarpia, dans Tosca, en 2015, se prépare depuis plusieurs mois à présenter sur scène, en compagnie d’une distribution de haut calibre, cette œuvre marquante qui le fera passer de la souffrance à la délivrance, avec le concours de quelques prières.
C’est aussi selon lui une œuvre sur la «déliquescence de la famille», et par extension celle de la structure sociale: un propos qui résonne fortement avec notre monde de démocratie en crise et de montée des radicalismes. «Heureusement, ajoute-t-il, c’est une œuvre qui oppose à ce chaos un amour vibrant, mettant en lumière cette vieille et belle idée voulant que l’amour triomphe toujours.»
Pour s’y préparer, plutôt que de se concentrer de manière excessive sur la technique, le baryton tente de se connecter au mieux à ce «grand parcours d’émotions».
Nabucco, de Verdi
Mise en scène de Michael Cavanagh
Avec l’Orchestre symphonique de Québec et le Chœur de l’Opéra de Québec sous la direction de maestro Giuseppe Grazioli