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Première semaine du FIJM en trois événements marquants pt2

Dos : Seun Kuti et Egypt 80
Le FIJM tenait à célébrer cette année les 10 ans du décès du légendaire Fela Anikulapo Kuti, le père de l'afrobeat. Ce musicien et activiste Nigérien a créé, en mélangeant funk cru à la James Brown, jazz un peu freak et la musique Yoruba, en style totalement inusité. La musique de Fela peut se décrire comme de longues pièces (rarement moins de 10 minutes) hypnotiques qui portent à la transe avec un maximum de cuivres fous, d'une multitude de couches de percussions, de basse pesante et répétitive, de guitares sautillantes et de claviers aux notes bien chaudes. Là-dessus, le chantre africain déclamait, plus ou moins en phase avec le rythme, des textes vindicatifs et revendicateurs qui ne faisaient pas du tout l'affaire des autorités nigériane ou d'autres gouvernements africains.
Tout comme Bob Marley, Fela était une sorte de prophète révolutionnaire en son pays, et tout comme le légendaire rasta, il a aussi fait beaucoup d'enfants. Deux de ceux-ci étaient au FIJM cette année. On connait déjà Femi pour l'avoir vu à quelques reprises à Montréal par le passé mais jamais nous n'avions reçu la visite de son jeune frère Seun, qui était ici accompagné de la formation Egypt 80, celle-là même qui suivait Fela de son vivant (mais dans laquelle on ne retrouve que quelques-uns des membres originaux).
Le FIJM n'a pas eu froid aux yeux en le programmant sur la grande scène de au coin de Ste-Catherine et Jeanne-Mance mardi dernier (3 juillet). Un risque qu'il faut impérativement saluer car l'afrobeat que préconise Seun Kuti est beaucoup plus près de la source originale, beaucoup plus cru et sauvage que celui que propose son frère Femi qui, selon moi, est trop propret et « occidentalisé ». En fait, nous avons eu la joie de découvrir que Seun est le portrait craché de son père, un chanteur possédé par sa musique, charismatique, dégageant une énergie sexuelle et animale et n'ayant, comme son défunt paternel, pas peur des mots.
Cela dit, il me semble que bien que le public fut nombreux, la grande majorité des gens présents n'a pas vraiment embarqué dans la transe et répondait mollement aux sollicitations du chanteur et de sa vingtaine de musiciens. C'était peut-être un peu trop fucké et bizarre pour monsieur et madame tout le monde. Reste que c'est en servant des trucs comme ça au « peuple » qu'on l'éduque, qu'on lui apprend à ouvrir ses oreilles et à élargir ses horizons; c'est avec des spectacles comme celui-ci et comme plusieurs qui ont été présentés dans la rue -autant par le FIJM que biens d'autres événements locaux- que les montréalais sont aujourd'hui plus éduqués, musicalement parlant.