Il y a Winnipeg et il y a St-Boniface. Deux entités, une ville, mais l’un ne va pas sans l’autre. Un pont sépare deux cultures, l’une anglophone de quelques 600 000 personnes et l’autre francophone qui doit totaliser environ 50 000 à 60 000 personnes, soit à peine 10% de toute la population de la capitale du Manitoba. Reste que, depuis quelques années déjà, le fait franco devient de plus en plus important à Winnipeg et le Festival du voyageur, qui célèbrait sa 43e année d’existence, est là pour le prouver.
Cet événement, qui s’étend sur 10 jours en février (du 17 au 26 février cette année), met surtout en lumière les artistes francophones locaux. Des quelques 80 groupes à l’affiche, 70 proviennent de la région. Preuve que le Manitoba a une culture francophone bel et bien vivante et vibrante. Une culture qui gagne à être découverte car bien honnêtement, je ne connaissais presque aucun des artistes locaux au programme, c’est pour dire à quel point nous avons beau parler la même langue et venir du même pays, on est loin de la réalité manitobaine dans notre petit Québec nombriliste… Parce que c’est ce qui te saute en plein visage quand tu débarques à Winnipeg. Toute cette culture francophone qui ne survit pas mais qui vit! Une culture qui aurait eu toutes les chances de disparaître si ce n’était de la passion et de la détermination des franco-manitobains. Cette culture, c’est un peu aussi la fierté de toute une ville dont la grande majorité parle anglais.
Le Festival du voyageur donc… L’événement se déroule sur une dizaine de sites mais principalement au parc du Voyageur, justement. Entre les sculptures de glace disséminées sur le site et le Fort Gibraltar qui domine l’ensemble de son imposante structure de bois rond, on retrouve plusieurs lieux de spectacles, des tentes assez chaudes pour ne pas se les geler sur place car d’ordinaire il fait froid à “Winterpeg” et y’a tellement de monde sur les lieux qu’on doit faire souvent la file. Mais pour ce premier weekend de l’édition 2012, il faisait exceptionnellement “chaud” (le mercure oscillait autour de –5 à +3, donc moins froid qu’à Montréal). C’est cette température clémente qui a aidé à faire de cette 43e édition une des plus populaire de l’histoire du festival (on parle d’environ 110 000 visiteurs). Ça et une programmation plus variée et audacieuse. Car il faut bien l’admettre, le festival a souvent des airs un peu folklorique, un peu figé dans le temps, surtout quand la majorité des festivaliers se déguise comme à l’époque des Voyageurs et porte des ceintures flèchées… Ça n’empêche pas le public de se presser pour entendre Jimmy Hunt, les Dales Hawerchuk (un peu normal puisque le Dale en question vient de Winnipeg), Orange Orange -qui a déchaîné les passions des jeunes filles présentes selon les dires du coloré duo croisé récemment après une petite perfo acoustique au Quai des brumes- et les nombreux autres DJ, groupes rock, électro, pop, indie, folk et autres présents sur le site ou ailleurs en ville. Un festival qui se modernise mais dont le charme reste suranné pourrait-on dire. Vous en saurez plus là: festivalvoyageur.mb.ca
Pour un soir seulement
En parallèle au Festival du voyageur, Radio-Canada et ARTV accueillaient l’émission Pour un soir seulement à St-Boniface. Ce projet, mené par le toujours passionné Jim Corcoran est un bel hommage à la musique et aux créateurs. Pas un truc tendance, pas un show de blabla inutile, non… un show de Musique, point barre!
Le principe est de coupler deux artistes ou groupes qui à priori ne viennent pas nécéssairement du même milieu musical mais qui ont des affinités sonores, les sortir de leur zone de confort, les mettre un peu en péril et leur faire partager la scène et leurs chansons tous ensembles, pour un soir seulement. Ça donne des rencontres aussi folles qu’inusités, telle que Galaxie qui rocke le monde de Yann Perreau et le Yann qui nous fait voir que Galaxie avec un type aussi charismatique que lui au lead vocals ben c’est pas mal du tout. Ou encore les mêmes Galaxie qui cadraient parfaitement avec l’univers de la rockeuse du Manitoba Romi Mayes, C’est aussi la symbiose totale entre Isabeau et les chercheurs d’or et les Barr Brothers, les deux sirènes que sont Ariane Moffatt et Katie Moore, Damien Robitaille qui trouve son alter ego en la personne de Daniel Roa, fantasque chanteur manitobain, et j’en passe, notamment ceux dont je n’ai pu voir les performances mais qui s’annonçaient fort prometteuses, entre autres Jimmy Hunt qui rencontre tout naturellement Philippe B, les exotiques Alejandra Ribeira et Bïa, Ian Kelly et Patrice Michaud ou Mathieu Lippé et Jérôme Minière par n’en nommer que quelques-uns. Mais tous ça serait sans doute moins vivant sans la présence du public. Ça donne un côté plus “concert” qu’”enregistrement de show télé”.
Quand on déplore la disparition de Studio 12, on peut à la limite se consoler en se disant que Pour un soir seulement existe encore. Outre l’émission diffusée en direct le 17 février dernier, on pourra voir tout ça sur les ondes d’ARTV cet automne et à Radio-Canada en janvier 2013.