Les 19e Francofolies de Spa se sont terminées dimanche soir avec le (long!) spectacle à grand déploiement du généreux Jean-Louis Aubert. L’ex Téléphone, toujours accompagné de son fidèle complice le batteur Richard Kolinka, a joué pendant deux bonnes heures devant une foule considérable sur la place de l’Hôtel de ville. Des chansons de ses albums mais aussi plusieurs morceaux de Téléphone, au grand bonheur des festivaliers. C’est étonnant de voir à quel point ce chanteur (et son ex groupe) demeure plutôt inconnu au Québec, surtout quand on voit à quel point il est populaire en Europe francophone.
Anglopholies
Entre l’apéro-réveil du fantasque DJ Didjé qui ouvrait le festival au Jardin Elektropedia (lui qui n’a rien mais rien d’électro) le 18 juillet et Aubert qui le clôturait le 22, ces 19e Francos de Spa nous auront encore une fois permis de (re)voir plusieurs artistes dont la réputation n’est plus à faire (Cali, Emily Loizeau, Catherine Ringer, Ours, Balimurphy, Thomas Dutronc, Laurent Voulzy, Benabar, Jean-Louis Murat, Maurane, William Sheller, etc…) et surtout de prendre le poul de la prolifique scène belge avec pas moins de 90 artistes sur les quelques 170 inscrits au programme. À nouveau, nous avons constaté à quel point les groupes belges ne sont pas intéressés à chanter en français. Un débat qui ne date pas d’hier puisque c’est la même constatation que les observateurs québécois présents au festival font à chaque année. Mais pour cette 19e édition, non seulement les Francos de Spa avaient encore plus l’air d’un festivalcomme les autres, mais en programmant Hugh Laurie (Dr. House), Charlie Winston ou Julian Perretta, c’est aux artistes carrément anglo-saxons que le festival ouvre ses portes. Une dérive qui s’explique par un désintérêt du public et des artistes pour la langue de Gainsbourg et par un désir de rentabiliser au maximum en faisant appel à des vedettes anglo-saxonnes. Quand on regarde les programmations des premières années à Spa et à La Rochelle, il n’y avait pas d’artistes qui s’exprimaient en anglais. Aujourd’hui, c’est aisément 50% de la prog de Spa qui est en anglais.
Ceci dit, on fait avec et on laisse de côté ces considérations linguistiques pour se consacrer à la musique. Donc dans le lot des belges présents, on soulignera le duo électro Soldout, totalement dans l’esprit Suicide mais en moins abstrait; l’indie- folk aérienne de Gaétan Streel; le projet prometteur de Surfing Leons avec l’américaine Miss Eaves, un truc dans la lignée MIA-Santigold; le toujours sympathique Saule; la chanson réaliste et vitaminée de Antoine Henaut; l’électro-rock puissant de Superlux; les quasi mythiques Hollywood Pornstar (avec notamment Redboy de MLCD et Anthony Sinatra de Piano Club) qui, à l’instar de Superlux, Subs et Soldout, ressortaient de leur cachette au grand plaisir des fans qui attendaient ce retour avec impatience; la pop franco (on le précise!) classieuse de l’ex Melon Galia Le Yéti; l’indierock habité et lacéré de larsen de Roscoe; l’électro-pop façon Vive La Fête de Mlle Nineteen et le projet déjanté de la mystérieuse Kate BurningBabe et de son complice Joe BillyBoy… Des noms qu’il faudra suivre et si possible revoir tout ça dans un an, quand plusieurs de ces projets auront acquis une certaine maturité. Évidemment, y’en a plein que nous n’avons pas eu la chance de voir et qui méritaient certainement le détour…
Québécofolies
Le Québec, toujours bien présent aux Francos de Spa, était représenté par Bernard Adamus, Chloé Lacasse et Jimmy Hunt. Bon, disons aussi de Lisa Leblanc et du néo-brunswickois Daniel Léger qui sont pas mal proches du Québec. Une belle délégation. Une unité dans le ton et quelques fois dans le son. On aurait espéré par contre les voir sur une scène digne de ce nom plutôt que de les retrouver aux terrasses du circuit des Bars en folies. Une situation un peu ingrate et des conditions plutôt minimales avec lesquelles la délégation québécoise a dû s’adapter. Bernard Adamus et Lisa Leblanc semblent s’en être plutôt bien tirés néanmoins. La vitrine Québécofolies et le showcase organisé par Musicaction et les plus québécois des belges Charles Pirnay et sa compagne Patricia Van de Weghe aide à promouvoir les artistes de chez nous qui sont alors vu par des professionnels de l’industrie présents aux Francos.
On a aimé… Les hypnotiques Konono no1 et les toujours entraînants Amadou et Mariam –dont c’était leur première apparition aux Francos de Spa!-, Selah Sue, icône belge dont le succès ne cesse de croître; le concert pour enfants de Pigalle et celui de Barbara Carlotti, complètement hors du contexte dans lequel on est habitué de la voir; l’intense Carmen Maria Vega, plus rock que jamais; la fête au mythique groupe freak-prog belge Machiavel; La Grande Sophie venue interpréter plusieurs des chansons de sont excellent dernier album La place du fantôme; Eiffel et son rock noir désiresque; le cirque Shaka Ponk; les jeunes rappeurs de 1995 décidement plus devant leur public qu’aux Francos de Montréal et, pourquoi pas, le DJ set des Klaxons au Jardin Elektropedia.
Les prochaines Francofolies de Spa fêteront l’année prochaine leur 20 ans. On imagine que la programmation sera assez imposante et, souaitons-le, plus francophone!