BloguesLe blogue de Philippe Boucher

YES

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YES. Ce mot prend tout son sens aujourd’hui. Hier, les Écossais n’ont pas voté pour le YES qui leur aurait accordé le statut de pays. Ils ont fait l’autre choix… le même que le nôtre en fait. Celui de voter NO. Pourquoi? Plusieurs risqueront des analyses rapides ou tout simplement iront d’une diatribe émotive pour justifier le choix des Écossais. Par contre, une chose est sûre, les Écossais se sont prononcés sur la base d’une question claire et la démocratie s’est exprimée clairement.

YES. Ce mot prend tout son sens aujourd’hui pour d’autres raisons. Ça fait plus d’une semaine que je croise des Québécois ici à Edinburgh. Des péquistes je veux dire. Vous savez? Ceux qui ont passé près d’un an à nous dire que le nombre de centimètre d’une croix catholique avait une incidence sur l’identité québécoise? Ces mêmes péquistes qui tenaient mordicus à ce qu’aucune fonctionnaire du ministère du Revenu porte un voile au 11ième étage du complexe G? J’en ai rencontré des péquistes cette semaine et j’ai risqué cette question : « Pis? La charte à Drainville? Êtes-vous toujours pour? ». Fermez vos yeux et imaginez le bruit des criquets. Ils ont tous largués le « père de la charte » et sa bébitte. Certains ont utilisé le mot « radioactif » pour qualifier Bernard Drainville. Ça augure mal pour celui qui veut devenir chef du parti…

Revenons aux péquistes. Pauvre eux. Faire des milliers de kilomètres pour venir assister à un référendum basé sur autre chose que sur la question identitaire, mené par des politiciens courageux et qui ont surtout eu assez confiance en leur peuple pour leur poser une question claire. Dans le fond, ils sont venus constater avec leurs yeux et leurs oreilles l’échec de leur propre mouvement. Ils ont pu voir et entendre des hommes et des femmes inébranlables de convictions qui ont surtout compris que la souveraineté d’un peuple, ça ne se fait pas avec une partie du peuple, ça se fait avec tout le monde. Ils ont aussi compris que la langue et l’identité sont des enjeux, certes, mais que sans l’aval et la mobilisation de l’ensemble de la population, il y a de grandes chances qu’ils devront sucer leur pouce en boule dans leur coin une fois de plus lors de la prochaine élection. Espérons seulement pour le PQ que ses militants ont compris ce message et qu’ils reviendront dans leurs assemblées pour y prêcher la bonne nouvelle.

Faire un pays ne se fait pas en claquant des doigts. La démocratie donne ce droit, mais il vient avec une lourde charge de responsabilités. J’ai beaucoup pensé à Lévesque et à Parizeau (parfois à Bouchard aussi) au courant de la semaine. Ces gens qui ont compris que faire un pays n’est pas qu’un ralliement électoral pour des militants fébriles mais bien un projet sérieux qui commande la grandeur et le sens de l’État. J’ai assisté à la démission d’Alex Salmond aujourd’hui et je ne peux pas m’empêcher de penser à Parizeau (déclaration douteuse en moins). Porter son parti à bout de bras avec un seul et unique objectif qui confirme que le reste n’a plus aucun sens : faire un pays. Sans le pays, pourquoi continuer à se battre? C’est un peu ça la grandeur et le sens de l’État. Accepter que nous sommes avant tout des gens qui portent des idéaux, pas des ambitions. Le PQ a manqué cruellement de ce genre de leaders dernièrement : droits, intègres, créatifs, innovateurs et surtout…. amoureux de leur peuple.

Le YES a perdu hier, mais quelque chose est né ici en Écosse sous nos yeux. L’espoir. Non pas l’espoir d’un pays mais l’espoir qu’il reste quelque part des hommes et des femmes politiques pour qui la droiture et le respect du peuple trônent au-dessus de n’importe quel idéal politique. Ces hommes et ces femmes politiques qui veulent tirer le meilleur de nous-mêmes pour voir naître de grands projets, voir émerger une génération et ses ambitions, voir des gens qui ne portent pas le même idéal mais en ressentent tout de même toute l’émotion qui commande qu’on se batte pour l’atteindre. Ici en Écosse, le Québec semble plutôt petit avec les coupures dans les conservatoires de musique de Philippe Couillard et les chicanes de calendrier du Parti Québécois. L’Écosse semble bien grande malgré le résultat car chaque minute passée ici m’a réconcilié avec la politique, la vraie. Celle qui s’écrit avec un grand « P ». Je dis ça mais la politique ne m’a jamais réellement quittée, donc je n’ai pas eu à me réconcilier avec elle. Par contre, j’avais besoin de savoir qu’elle existait toujours.

Merci l’Écosse. Yes.