Dans une autre vie, j'étais un grand spectateur d'impro. J'ai
abandonné par la force des choses, non par manque d'intérêt, mais plutôt par
manque de temps.
Ces temps-ci, je discute souvent hockey. Pas que les
frasques du CH me passionnent. C'est plutôt que je me questionne sur mon
désintérêt du hockey. Alors que toute la nation brûle et trépigne devant chaque
coup de patin des joueurs du Tricolore, je demeure impassible. Inerte. Rien à
faire. Impossible d'être au même diapason que ma société. Alors je me suis dit
que peut-être l'improvisation, la discipline la plus proche du hockey dans mon
univers de "théâtreux", allait me réconcilier à petits feux avec le sport
national. Je rêve, sans doute. Mais quoi qu'il en soit, j'ai décidé de faire
une cure, une sorte de thérapie à grands coups d'impro, sous toutes ses formes.
(J'ai aussi promis de lire chaque matin la page sportive du journal mais ça c'est
une autre histoire.)
J'ai commencé par assister à un match de la LIM (ligue d'improvisation montréalaise) dimanche
dernier, dans l'ambiance conviviale et bon chic bon genre du Lion d'Or. Les Verts
affrontaient les Oranges. Le maître de jeu, qui change toutes les semaines,
était la comédienne Eve Landry. Sur le thème de l'enfance, les impros se sont
enchaînées, longues ou courtes, mixtes ou comparées, drôles ou tragiques,
bonnes ou mauvaises. Pas d'arbitre à la LIM, ni de pénalités ou de règles trop
strictes, mais le même esprit de saine compétition qu'à la LNI, et le même
désir de construire des histoires qui se tiennent, des univers cohérents où
chaque joueur travaille avec l'autre pour le plaisir du jeu et du spectacle. On
y fait de l'improvisation intelligente, inventive et variée. La soirée à
laquelle j'ai assisté faisait la part belle aux improvisations longues et
fragmentées, dans lesquelles se rencontrent des univers contrastés autour d'un
même thème. Les impros y étaient la plupart du temps très structurées, tout en
conservant la convivialité et l'absence de prétention qu'on aime tant retrouver
sur l'improvisoire. Ajoutez à ça l'humour pince-sans-rire de l'animateur François
Lachapelle et les ambiances musicales des musiciens maison, et le portrait est
complet. Ouais. Ça y est je pense que je suis fan de la LIM. Mais pas plus
intéressé par le hockey, hélas.
Hier soir (mardi), j'ai poursuivi ma quête en assistant au 5e
anniversaire des Improductifs, dans un Théâtre Plaza rempli à craquer et
totalement survolté. Une toute autre affaire. Les Improductifs (Laurent Paquin,
Simon Boudreault, Nicolas Pinson, Daniel Malenfant, Eric Desranleau et quelques
autres proches collaborateurs) préparent visiblement le terrain d'une future
émission de télé. Tout est là pour séduire les patrons de Québécor: éclairages
pompeux comme dans un show rock, projections d'infographies vidéo à l'esthétique
joyeuse et vitaminée, animateur rieur et débordant d'enthousiasme (Pinson), et
succession d'invités spéciaux, qui, étrangement, sont des personnalités très télévisuelles
(Eric Salvail, Edith Cochrane, Charles Lafortune et Stéphane Archambault). C'est
parfois au détriment de la qualité des impros. Disons qu'Eric Salvail, même s'il
ne prétend pas savoir faire de l'impro et qu'on lui pardonne, n'est pas ici en
territtoire de confiance. N'empêche, le concept des Improductifs est gagnant. Ce
sont des jeux d'impro, parfois proches de certaines catégories d'impro
traditionnelle (on reconnaît le principe des impros «à la manière de», ou
encore la catégorie doublage américain, ou la fusillade), mais sans le cadre de
la LNI, et surtout en laissant toute la place aux excès de toutes sortes. Le
cabotinage n'y est pas proscrit, et semble même y être fortement encouragé. Je
suis moins fan, et la soirée verse facilement dans le très grossier. Mais pas
de doute, ça a le potentiel d'être presqu'aussi rassembleur que le hockey. Ah
oui, et les improvisateurs doivent faire avec les contraintes dictées par les
spectateurs. De l'impro très variée, où la chanson, la marionnette, les objets
et la technologie occupent une place de choix. Si ça vous dit, ils jouent tous les premiers
mardis du mois au Théâtre Plaza.
Je poursuis ma thérapie d'impro et vous en reparle cette
semaine.
Sur les photos:
1. Joëlle Paré et François Gilbert de l'équipe des Verts de la LIM. Crédit Gabriel Fournier
2. Laurent Paquin, Stéphane Archambault, Simon Boudreault et deux marionnettes. Crédit Hugues
Toujours avide d'improvisation, j'ai voulu vivre ce vendredi l'expérience Cinplass . Deux