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Promo collective du théâtre – le vaste sujet

Grosse discussion, ce soir (lundi), au Monument-National, alors que le Conseil québécois du théâtre convoquait le milieu théâtral à une réflexion sur la promotion collective du théâtre.

Le Gala des Masques n'existe plus. Le milieu théâtral ne dispose pas d'outil collectif pour affirmer son existence et son rayonnement. Aucune initiative majeure n'est mise en place pour atteindre d'autres spectateurs que les convertis.

Mais la promo collective du théâtre, vraiment, comment diable serait-elle possible?

Hugo Couturier, directeur des communications du festival TransAmériques et panéliste de cette conférence-discussion, a affirmé d'emblée être contre les galas et la formule de la remise de prix. Pas efficace, à son avis, car la chose demande trop d'efforts pour peu de résultats (je paraphrase). Et Paul Lefebvre, dramaturge au CEAD, en a rajouté: "Ça ressemble toujours à des appels désespérés, disait-il, comme si les
salles étaient vides. Elles ne le sont pas. Comme si le théâtre était une
espèce en danger. C'est faux."

En effet. On ne convainc personne d'aller au théâtre en faisant pitié. Les remises de prix, donc, ne devraient pas former l'essence d'une démarche promotionnelle collective. Rappelons nous, de toute façon, les déboires de l'Académie québécoise du théâtre (relire ce billet pour vous rafraîchir la mémoire). Comment pourrions-nous éviter une telle débâcle? Quelle forme pourrait prendre une remise de prix pour qu'elle serve vraiment à promouvoir le théâtre et non à s'autocongratuler sans avoir d'écho chez le téléspectateur? Pas de réponse à cette question pour l'instant, mais il s'est trouvé dans la salle des gens pour souligner que les Masques ont souvent permis à des spectacles d'être repris l'année suivante, et parfois même de tourner. Le gala a permis d'élargir la diffusion de certaines pièces, ce qui est fort bien: c'est l'un des plus gros défis auquel le théâtre québécois doit s'atteler. François Forget, stratège marketing, proposait d'ailleurs qu'un futur gala soit accompagné d'un mécanisme pour s'assurer que les pièces gagnantes soient reprises dans l'année qui vient. Pas inintéressant.

Outre cela? Il fut question des réseaux sociaux, beaucoup. Tout le monde s'entend pour dire qu'il faut occuper le web de fond en comble, et de toutes les manières possibles, avec des bande-annonces, des promos dans les médias web et via les organismes de vente de billets à rabais (comme La Vitrine), des interactions directes avec les internautes. Couturier, ambitieux, a évoqué l'idée d'une campagne publicitaire nationale qui mettrait en relief la diversité des pratiques théâtrales québécoises et transmettrait le plaisir de l'expérience spectatorielle. D'autres, comme Brigitte Haentjens, ont insisté pour que le contenu artistique prime dans toute campagne promotionnelle. Évidemment. Sinon le marketing tue le théâtre (je vous en ai déjà parlé ici).

Promouvoir massivement le théâtre afin d'atteindre un public non-initié ne saurait pourtant être fait sans fournir ensuite à ce nouveau public un accompagnement approprié sous forme de médiation culturelle. Ce qui impose des budgets considérables. La chose fut rapidement discutée. 

Si vous voulez mon avis, la meilleure proposition évoquée dans cette assemblée est celle de construire du neuf à partir d'une matière déjà existante et fort bien menée: le site web montheatre.qc.ca, orchestré avec passion par David Lefebvre depuis plusieurs années. Tout est déjà là, ou presque. Un répertoire théâtral contenant les infos essentielles sur les productions, des archives, du contenu vidéo, des critiques. Si David avait les moyens de s'offrir un salaire, de payer son équipe et de développer le design de son site, d'y ajouter de nouvelles fonctions, de rassembler les photographies et autres contenus visuels entourant les spectacles et de développer une forme d'interactivité avec les visiteurs de son site en les invitant à publier leurs propres critiques ou à écrire des commentaires, il y aurait là un formidable outil. Et la campagne publicitaire nationale à la télé, s'il doit y en avoir une, ne devrait servir qu'à orienter les gens vers montheatre.qc.ca, où ils pourraient vivre une expérience plus profonde de mise en relation avec le théâtre. Ça aurait le mérite de rester très connecté avec les contenus artistiques et d'inviter le téléspectateur à constater lui-même l'étendue de l'offre théâtrale et l'ampleur des possibilités.

Bon, peut-être qu'en se mettant ainsi au service du milieu théâtral, le volet critique de montheatre ne pourrait subsister. Mais Lefebvre n'a jamais caché vouloir faire la promotion du théâtre québécois, et la majeure partie de son site est déjà orientée vers la promo. L'abandon de la critique est peut-être le sacrifice nécessaire pour projeter montheatre vers de nouveaux sommets et mettre en valeur sa base de données. Rien n'empêchera ensuite les collaborateurs du volet critique de montheatre de trouver une niche ailleurs. Les blogues sur le théâtre ne sont pas encore légion et de nouveaux joueurs, s'ils sont pertinents et sérieux, ne seront pas mal accueillis.

Qu'en pensez-vous ?