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Du théâtre numérique pour transcender les frontières

NOTE : Ce texte a d’abord été publié sur une autre version du blogue Parathéâtre

 

Le Festival TransAmériques dévoilait aujourd’hui quatre des spectacles qui composeront la programmation de sa cinquième édition en mai prochain.  Et c’est franchement alléchant: notamment Gardenia, d’Alain Platel (c’est la comédienne transexuelle Vanessa Van Durme sur la photo).  Chaque fois c’est pareil, ce dévoilement partiel suscite chez moi une folle excitation.  C’est que le FTA est presque notre seule chance de voir à Montréal de gros noms de la mise en scène internationale et de garder un oeil sur la foisonnante et avant-gardiste scène européenne.

 

Dans un monde où les frontières se dissipent et où les autres disciplines artistiques ne se contentent jamais de ne se référer qu’à leur seul horizon national, la rareté de nos contacts avec la scène contemporaine internationale rend notre théâtre quelque peu vulnérable, peu habilité à joindre les rangs d’un réseau qui étend maintenant ses ramifications un peu partout.

 

Si la France ou l’Angleterre, par exemple, ne vivent pas cette situation à la même échelle, ils ne sont eux aussi sensibles qu’à une infime partie du théâtre qui se fait sur le globe. En tournée européenne, ce sont toujours les mêmes:  Allemands, Suisses, Flamands, Italiens, Polonais,  occasionnellement quelques New Yorkais, encore plus rarement des Japonais.  Or, l’Europe commence à découvrir qu’il se fait au Moyen-Orient un théâtre digne d’attention.  Le Festival d’Avignon a récemment fait des efforts remarqués en ce sens.  À Londres, sur le blogue théâtre du Guardian, la journaliste Lyn Gardner suggérait récemment à ses lecteurs de faire un tour sur Gulfstage,  une section du site Digital Theatre où l’on peut visionner des spectacles récents du Qatar, de l’Arabie Saoudite ou des Émirats Arabes Unis (entre autres).  Je me permets de l’imiter et de vous envoyer là-bas illico.

 

Et pour nous, pauvres Nord-Américains isolés de toute cette inspirante activité théâtrale, Digital Theatre est en soi une mine d’or.  Le principe?  Six institutions britanniques d’envergure, notamment le Royal Court Theatre et la Royal Shakespeare Company, vous permettent de télécharger des captations de leurs spectacles pour un coût modique.  Je sais, je sais, ce n’est pas toujours la joie, visionner un spectacle sur vidéo.  Mais quand même, on a affaire ici à des réalisateurs de talent, qui ont le souci de vous transporter le mieux possible dans l’ambiance de la représentation.

 

 

Pour ma part, je viens de commander Over There (photo), l’une des plus récentes pièces de Mark Ravenhill, produite par le Royal Court et la Schaubune de Berlin.  Mark Ravenhill, vous vous rappelez? C’est l’auteur de Shopping and Fucking, créée chez nous par Christian Lapointe en 2006. Et aussi l’un des plus intéressants auteurs anglais contemporains.

 

Inutile de dire ici à quel point une telle initiative mériterait d’être reproduite au Québec.  Imaginez, par exemple, une alliance entre l’Espace Go, La Chapelle, le TNM, le Théâtre d’Aujourd’hui et l’Espace Libre.  Peut-être aussi le Trident, le Périscope et Ex Machina, à Québec.  Aidés par le Conseil des Arts ou grâce au soutien de l’ONF, ils engagent une équipe de cinéastes prêts à mettre sur pellicule les spectacles marquants de leurs saisons et mettent ce contenu en ligne à la disposition de tous.  Non seulement cela contribuerait à faire voir un peu de théâtre en dehors de la métropole (dans les régions comme à l’étranger), mais ce serait un formidable outil de mémoire.

 

Ça n’arrivera pas de sitôt, je le crains.  En attendant, je crois que je vais réfléchir à mettre en branle un tel projet pour mes vieux jours