En écoutant cet après-midi le légendaire André Perry parler- entre autres choses- de son tout autant légendaire studio à Morin Heights, ça m’a rappelé quelques bons souvenirs et un autre d’un style un peu différent. Même si ce superbe studio jumelé à une résidence tout aussi superbe n’existe plus aujourd’hui et même si monsieur Perry l’avait auparavant revendu, l’endroit restera toujours dans la mémoire d’artistes québécois et étrangers » le studio Perry » ou « le studio Morin Heights », J’ai moi-même eu l’occasion d’y enregistrer 2 ou 3 disques avec Paul Piché et Beau Dommage. Par contre ma toute dernière visite à cet endroit a plutôt fini en queue de poisson, ou est-ce en eau de boudin?
Tout ça avait commencé par une rencontre mémorable dont je me souviens très peu avec Éric Lapointe, un soir de -bien nommées- Francofolies. Le sympathique Éric, que je ne connaissais pas personnellement avant le soir en question, avait insisté pour m’entraîner dans une virée au légendaire Bistrot À Jojo. Vous me connaissez: trop poli pour refuser.Toujours est-il que quelques heures et le double de breuvages plus tard, j’avais récité à Éric un bout de texte d’une chanson que je n’avais jamais terminée.J’étais persuadé qu’il ne s’en souviendrait pas, vu qu’à cette heure tardive,il ne semblait plus rester la moindre parcelle d’être humain conscient dans la coquille en forme d’Éric Lapointe semi-debout devant moi. Je m’empresse de dire que je valais guère mieux. Fin de la soirée et selon toute vraisemblance, fin de l’histoire.
Quelques semaines plus tard mon portable sonne alors que je m’apprête à quitter en famille un chalet dans le bout de Bromont. Au bout du fil, un sous-fifre (notre mot culturel d’aujourd’hui) d’Éric Lapointe m’apprend que ce dernier aimerait beaucoup que j’aille le rejoindre au studio de Morin-Heights pour qu’on finisse d’écrire la fameuse chanson ensemble. J’accepte, dépose ma famille à Montréal et file à Morin Heights rejoindre l’artiste. J’arrive vers 8 heures du soir. Je me dirige d’abord au studio lui-même: pas un chat. Pas de problème: je me redirige vers la maison du studio, située à quelques centaines de mètres de là. Même si par une fenêtre au rideau entrouvert je peux apercevoir quelques guitares et-ô surprise- des caisses de bière; pas un chat non plus. Imperturbable, je colle un post-it sur chacune des 2 portes à l’intention d’Éric et je pars me louer un motel.
Le lendemain matin, toujours pas de nouvelles. Un peu pas mal de mauvaise humeur je repars pour Montréal et j’arrive à rejoindre au téléphone -ben non, pas Éric, voyons donc!- son gérant, Yves-François Blanchet (notre actuel ministre de l’environnement) qui dans ses petits souliers, m’explique que comme c’était la Saint-Valentin (Saint-Valentin que, vous l’aurez remarqué, je n’ai pas passée avec ma blonde), Éric s’est un peu enfargé les pieds -une fois n’est pas coutume- à Montréal et m’a totalement oublié.
Je n’en veux pas à Éric Lapointe, qui est vraiment un bon garçon. Beaucoup d’eau et d’autres choses ont coulé depuis sous les ponts. Et la fameuse chanson, me direz-vous? Nous l’avons éventuellement terminée; mais ça, c’est pour une autre fois.