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Fraude dans le réseau des garderies subventionnées : la preuve mathématique

Le réseau des garderies subventionnées doit être surveillé de très près. Pourquoi? Parce que du côté des garderies privées subventionnées, certains propriétaires peuvent être tentés de jouer avec les règles pour maximiser le rendement et réduire les services dus aux enfants. D’un autre côté, les centres de la petite enfance (CPE) peuvent vivre le problème opposé : dépenser plus qu’il n’en faut pour gérer l’installation et ainsi gaspiller des ressources publiques. En sommes, dans les deux réseaux, on doit appliquer des contrôles de gestion très serrés. Aussi, des groupes de pression protègent les deux réseaux : on doit se prémunir contre de l’information biaisée ou présentée de façon favorable par ceux-ci.

Fraude à Beauport : la pointe de l’iceberg ?

À Beauport, on apprenait, il y a quelques semaines, qu’une garderie privée subventionnée avait perdu son permis. La raison a été gardée secrète par le ministère de la Famille jusqu’à maintenant.  Les employés allèguent que le propriétaire était un prête-nom. Voilà une accusation grave, mais qui donne des réponses sur le silence du ministère. Donc, si la garderie La forêt enchantée a utilisé un prête-nom, cela signifie que les réels propriétaires ont d’autres installations ailleurs. Pourquoi? Le but d’utiliser un tel stratagème est d’obtenir plus de 300 places subventionnées (limite légale permise). Ainsi, si on a utilisé un prête-nom, le nombre total de places détenues par les réels propriétaires était d’au moins 301. Comme la garderie La forêt enchantée compte 61 places subventionnées, il y a au moins 240 places subventionnées détenues par des fraudeurs au Québec. Le 240 est le nombre le plus défensif. Rien n’indique que ce réseau est unique, ni que le nombre concerné n’est pas quintuplé. Si un groupe d’acheteurs sur le marché secondaire a pu frauder, plusieurs ont pu le faire.

Une institution financière impliquée?

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Crédit: Simon Clark (Journal de Québec)

Pour financer une garderie, un propriétaire a généralement besoin d’un prêt. Donc, on se présente à l’institution financière et celle-ci analyse la cote de crédit, le plan d’affaires, la capacité de paiement et les garanties de l’emprunteur. Si un prête-nom est en cause, il faut qu’il y ait quelque part une trace des réels propriétaires dans la transaction. À moins que le prête-nom ait les reins très solides financièrement, le prêteur devrait avoir des suspicions lorsque des gens viennent endosser ou accompagner un emprunteur à une réunion de planification de prêt. Évidemment, on ne doit pas suspecter tous les emprunteurs du milieu des garderies d’être des fraudeurs, mais certains indices pourraient mettre les institutions financières sur la piste.

Le ministère confirme : des enquêtes sont en cours.

Lors d’un appel téléphonique ce matin, la responsable des relations avec les médias du ministère de la Famille confirme que des enquêtes sont en cours. Aucune autre information ne sera divulguée à la population pour ne pas nuire aux enquêtes policières. La question se pose : depuis combien d’années existe-t-il des doutes au ministère de la Famille sur un système de prête-noms dans le réseau des garderies privées subventionnées? Les gens du réseau le savaient, mais pas ceux qui accordent les permis?

Qui tente-t-on de protéger? Pourquoi avoir attendu toutes ces années avant d’agir? Les gouvernements ont passé, mais la patate est demeurée chaude au ministère de la Famille.

On me précise aussi « qu’un permis de garderie, ça ne se vend pas ».  Bien sûr que ça se vend, la preuve, c’est que les institutions financières se sont mises à prêter des sommes sur la valeur du permis. On me répond que le ministère de la Famille ne transfère pas automatiquement le permis lors d’une transaction sur le marché secondaire : on peut leur répondre qu’une clause d’achat conditionnelle au transfert du permis peut s’ajouter à un contrat.

En somme, si dès le départ on avait aidé les parents au lieu de subventionner le réseau, on ne se serait pas retrouvé avec des CPE à sauver, des fraudeurs privés à gérer et des distorsions fiscales incohérentes à assumer.

 

En écoute (vers 3:27) : la deuxième partie de la chronique à l’émission « Puisqu’il faut se lever » sur les ondes du 98,5 FM avec Paul Arcand.