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Ma véritable chance

Ma plus grande chance dans la vie, je la connais. Ma plus grande chance n’a pas été monétaire. Elle n’a pas été de vivre dans l’extravagance, de faire le tour du monde ou de gagner quelconque tirage ou concours. Non, rien de tout cela ne m’est arrivé. Dans les standards du monde d’aujourd’hui, j’ai eu une vie singulière oui, mais rien d’extraordinaire. Ma plus grande chance est bien anodine pour certains. Pour moi, elle est ce qu’il y a de plus significatif. Ma plus grande chance a été d’avoir de bons parents. Oui, avoir de bons parents. Ça peut sembler un peu banal pour la plupart des gens, mais je réalise que la vie qu’ils m’ont offerte a forgé le reste de mon existence. Ils ne sont pas parfaits, mais si j’avais à choisir des parents, ce sont eux que je choisirais. Je sais, ça fait cliché, mais je ne changerais rien. Ils ont fait ce que je suis, avec ce qu’ils avaient. Sans eux, je ne suis pas là. Sans eux, mon chemin aurait été différent.

Vous ne connaissez pas mes parents, ils ne sont pas les descendants d’une richissime famille ou issus d’un club d’élite intellectuelle ou artistique. Mon grand-père travaillait dans une usine de bronze et avait un autre emploi à temps partiel pour nourrir 13 enfants. Mon autre grand-père a travaillé 51 ans dans une manufacture de coton. Juste à y penser : 51 ans pour la même entreprise à quêter des augmentations de salaire à coup de cennes. Pour un francophone, il avait réussi à être « p’tit boss », le niveau hiérarchique le plus prestigieux pour son existence dans un Québec qui l’empêchait d’aspirer à plus. Il a perdu sa femme trop jeune, avec les années, je réalise tout le poids que ma mère a dû prendre sur ses épaules à un âge bien prématuré.

Voilà, j’en reviens à mes parents. Vous comprenez d’où ils viennent. Mes parents, c’est la générosité même. En fait, ils sont si généreux de leur temps et de leur vie que certains trouvent ça louche. Les gens autour ne peuvent pas comprendre que deux personnes dédient leur temps et leurs ressources au bien-être des autres. Parce qu’en 2017, être généreux avec les autres sans rien attendre en retour, ce n’est pas considéré comme logique.

Mes parents sont à la retraite, mais je n’ai jamais été aussi fier d’eux. Même retraités, ils se donnent aux autres. Leur retraite n’est pas basée sur des voyages en série, des croisières ou de la consommation à outrance. Non, mes parents trouvent leur bonheur dans le bénévolat et l’entraide dans leur communauté.

Personne ne sait tout ce que mes parents ont fait pour les autres. Ils ne s’en vantent pas sur Facebook, ils ne reçoivent pas de prix, ils n’ont parfois même pas un merci. Non, ils aident pour aider. Ils aident pour la seule bonne raison : pour le désir d’aider et de donner un sens à leur vie.

Je me souviens d’un hiver, près de la période de Noël, il y a plus de 20 ans de cela. Nous sommes à l’épicerie avec ma mère. Nous ramassons de tout : pain, pâtes, conserves, légumes, etc. Ma mère nous demande si nous avons envie d’ajouter un 10$ à la commande. Nous acceptons pour ajouter de la crème glacée et une boîte de biscuits. Puis, nous allons cogner à une porte. Une dame ouvre, ma mère demeure cachée dans la voiture. Nous livrons une commande d’épicerie à la mère d’un élève de l’école où ma mère travaille. Cette même mère est un cas à gérer à l’école. .

Nous sortons de là avec vraiment peu de reconnaissance et c’était bien correct. Vous savez ce que ma mère a fait ? Elle a fait croire à la dame que l’épicerie provenait d’un organisme. Cette journée-là, ma mère m’a donné une leçon de vie : donner sans attendre de reconnaissance. Elle venait de donner à une personne qui lui causait des problèmes au travail. Qui plus est, ce n’était pas une période faste au niveau financier à la maison. Ma mère venait de se priver pour quelqu’un d’autre.

En somme, j’ai eu la chance d’avoir des parents aimants et généreux. Voilà ce que je considère le plus bel héritage que j’ai reçu. Louise et Yves, je sais que vous ne cherchez pas les reconnaissances publiques pour tout ce que vous faites, mais je tenais à vous dire à quel point je suis fier d’être votre fils. Que dans ce monde de fou où le chacun pour soi est de plus en plus de mise, vous luttez à maintenir l’esprit d’entraide et de communauté. Tout cela, au-delà du jugement envers ceux que vous aidez. Oui, ma véritable chance dans la vie est d’être votre fils et d’avoir des souvenirs de vous bien plus tangibles que des selfies sur Instagram.