BloguesEn as-tu vraiment besoin ?

L’ami du sac de chips à 25¢

Le véritable ami. Celui en qui tu as confiance. Celui que t’admires et qui te dit tes quatre vérités sans avoir à passer par le chemin de la dentelle. Celui-là est important, même précieux. En avez-vous un ? Moi, oui. Une rencontre bien banale au travail qui a transformé le reste de mon parcours professionnel et personnel du même coup. Pourquoi ? Dans sa grande humilité, il ne s’en vantera pas. Pourtant, parfois, on a besoin de cette petite tape dans le dos ou de ce « reality check » que seul un ami peut faire. Grâce à lui, à ses conseils, à son écoute, j’ai trouvé un chemin qui est le mien. Surtout, j’ai trouvé cette approbation dans le regard de l’autre que peu donnent sincèrement dans ce monde de compétition.

Quand j’ai commencé à travailler chez Ernst & Young (EY), j’avais déjà perdu une grande partie de ma naïveté prématurément. Pourtant, avec une face comme la mienne, pas moyen d’avoir l’air mature à 20 ans, j’avais encore besoin de mes cartes pour acheter du vin. On a fait un mandat d’audit bien banal sur un régime de retraite dans l’Est de l’île. Autour de la machine à chips à 25 cents, on a commencé à jaser de notre perception de la carrière et de la vie. On avait le même âge, mais je le percevais tout de même comme un genre de grand frère. Il avait plus confiance en lui que moi. Chose certaine, si ce n’était pas le cas, il le cachait bien.  J’étais un genre de créatif qui avait besoin de quelqu’un pour le guider. Un genre de « bouncing wall » dans un monde plus stérile. Un regard approbateur sur mon cheminement qui deviendrait un jour atypique. Quelqu’un pour me dire « tu prends un chemin différent des autres, mais je comprends ce chemin ». On aurait pu nous définir comme le rationnel et l’impulsif ou le leader et le créatif. Chose certaine, à deux, on fait tout une équipe. Peu importe le projet.

Nous ne sommes pas toujours d’accord, mais nous évoluons sur une réflexion semblable. À une époque, sa conjointe devait se dire « mais qu’est-ce que tu as à te tenir avec cette bibitte-là? » Honnêtement, je la comprendrais de se dire ça.

Je regarde mon CV, un constat, dans chaque décision, il y avait une trace de cet ami quelque part. Je vous épargne les détails, mais dans chacune de mes décisions professionnelles, il y a eu ce coup de téléphone, cette bière ou cette discussion de corridor avec lui.

Février 2006 : « McSween! Consultant pour décrire des processus de trésorerie, ça t’intéresse? »

Sans cet appel, je ne sais pas si j’aurais osé à l’époque devenir travailleur autonome à 26 ans et quitter mon travail.

Un jour en particulier, un samedi matin, le téléphone sonne.

« McSween, t’as déjà remplacé à Le Bigot? »

« oui… »

« Je pense que tu devrais les appeler pour offrir tes services, genre là, maintenant. »

Un autre moment, je reçois un contrat d’édition. Dans mon enthousiasme, je considère écrire un livre. Je fais une esquisse de mon idée, il me rappelle :

« Je sais que t’es prolifique, mais je pense que tu devrais attendre. D’avoir une idée mûrie, as-tu vraiment le temps d’écrire un livre cette année? »

Résultat ? Retarder le projet m’a permis d’infuser le sujet et de réfléchir à un concept plus abouti.

Ce ne sont que quelques anecdotes, parmi plusieurs. Je retiens toujours son image de la poche de thé qui infuse. Parfois, on doit semer une idée et la laisser infuser dans notre cerveau, sans la brusquer.

L’ami est celui qu’on appelle quand ça ne tourne pas toujours rond. L’ami est celui qui t’offre les clés de sa maison en cas d’effondrement de ton château de cartes. L’ami est celui qui te dit de l’appeler à n’importe quelle heure du jour ou de la nuit au besoin.

Ma vie n’aurait pas été la même sans ce mandat autour d’un sac de chips et d’une boisson gazeuse à 25 cents.

L’ami, je sais que tu te reconnais. Je voulais simplement te dire merci et d’en souhaiter un comme toi à tout un chacun. Dans ce monde un peu individualiste, sentir qu’on n’est pas seul à l’affronter, ça rend plus fort. Je me sens comme dans la conclusion de #lavielavie. Ouais, voilà le 25 cents le plus rentable de ma vie et les bénéfices sont plus que monétaires.