Avec les avant-bras blancs comme la cendre, José Navas a offert une courte performance en guise d'introduction à S, sa plus récente chorégraphie réalisée avec les danseurs de la compagnie Flak, et présentée hier au Théâtre Centennial de Sherbrooke. Par ce solo d'incandescentes vrilles corporelles, il offrait un genre de canevas permettant de décoder la suite; il établissait sa signature qui en est une pleine de douceur et d'esthétisme. Les six minutes de Villanelle furent un hypnotique brasier.
Sous leurs vêtements translucides, les huit danseurs de Flak ont adopté l'étrange géométrie du S de Navas. Ils (quatre hommes) et elles (quatre femmes) jouaient des rôles passablement similaires; les danseurs formaient un tout, un chaud magma d'une beauté claire, voire aveuglante. Les lignes étaient pures, les angles précis, les symétries parfaites. Des tableaux caractérisés par le synchronisme ont tranquillement fait place à des impuretés calculées, des anachronismes dans le mouvement qui captaient le regard. Cette insaisissable mathématique a guidé les danseurs jusqu'à ce que le chaos les envahisse, les torde à ne faire d'eux que des êtres dénudés et meurtris. Au cours de cette chorégraphie, la musique (une pianiste se trouvait sur scène) nous jouait des tours par le contraste qu'elle créait avec l'effervescence scénique. Grâce à la jouissive apathie ressentie à l'écoute des airs d'Érik Satie, la création de Navas nous brûlait les yeux sans que l'on puisse lâcher un cri, manifestation de notre plus grand plaisir.
S et Villanelle: des moments forts de la saison danse.