Je suis un habitué du Festival International de Musique
Actuelle de Victoriaville, mais cette année, au lieu d'aller voir un seul show,
je me permets un marathon. Voici donc un
premier retour qui n'a rien de puriste sur le jour #1 de cette 27e
édition.
À mon arrivée, passage obligé au cœur de la ville pour voir
quelques-unes des installations sonores, dont le surprenant corridor bruitiste
de Mériol Lehmann (qui fait sonner
Victo comme une métropole qui ne dort pas la nuit) et le montage de guitares (qu'on
a envie de gratter) & de ficelles (qu'on a envie de tirer) de Thomas Bégin (qui n'a pas à s'inquiéter
car on n'a pas touché à ses belles bébelles). Très bel ajout au festival; on y
retournera car on n'a pas tout vu de ce volet arts visuels.
«Je crois que c'est la plus belle soirée d'ouverture que le
FIMAV ait connue», m'a-t-on dit à la table de presse. Sur papier, il est vrai
que chacun des trois concerts du jeudi propose de la découverte de qualité A+.
«Ça ne sera pas Alain Morisod et Sweet People», badine un
grand-papa à l'entrée du Cinéma Laurier. Il a bien pigé et c'est pourquoi il va plutôt voir
un film américain quelconque alors qu'une belle foule attend la combinaison de
trois musiciens pour le projet Tokyo
Taiga. Sur scène, deux japonais («We
would like to stay here.») et un russe qui débarque de la taïga sibérienne
(comme preuve, il a conservé son casque de poils). Avec leur allure, on dirait
le casting d'un rip-off asiatique de la Matrice, mais la trame sonore est d'un
autre genre. Premier constat : le travail de voix est hallucinant. Koichi Makigami (le meneur) passe du
chant de gorge à des bruits inexplicables et à des sons infiniment aigus avec
une agilité déconcertante. Soto Masaharu
donne la mesure sur une batterie de fortune dont il sait tirer le maximum. Quant
au sibérien, Bolot Bayryshev, armé
de sa guitare à une corde (un kai), il est un loup des steppes qui maitrise l'art
de la transe. Avec quelques moments de grâce, ce concert, malgré quelques
écarts (comme ce duel de flûtes), fut une excellente introduction à mon
week-end de musique actuelle.
Direction Colisée pour The
Ex, groupe néerlandais qui est arrivé avec une section de cuivres dans
leurs valises: Brass Unbound.
Beaucoup de changements depuis la dernière visite de la bande (qui roule sa bosse
depuis 30 ans). Les plus évidents: un nouveau chanteur et l'absence de la basse.
Cela ne ralentie pas la cadence car Arnold
de Boer est parfait à l'avant de la scène (surtout lorsqu'il a fait lever
la foule pour qu'elle prenne d'assaut le parterre) et que le sax baryton se
charge des basses fréquences avec classe. Avant-punk? Peut-être, mais la tout est
souple, sauvage, tribal… et avec leurs chandails assortis, The Ex transforme le
FIMAV en camp de vacances. Seul bémol, les interprétations plus traditionnelles
chantées par la batteuse Katherina
Bornefeld; pourquoi calmer le jeu quand on veut faire la fête comme s'il n'y
avait pas de lendemain?
Si c'était plein pour The Ex, ce l'est aussi pour Kid Koala qui arrive sur scène en
costume de… koala (un pari perdu semblerait-il). Belle mise en scène qui nous
permet de voir le platiniste à l'œuvre, de ne rien rater de sa
rapidité-virtuosité. Le spectacle est hallucinant lorsqu'il s'attaque à ses
compositions-chorégraphies traditionnelles, mais le travail qu'il amorce pour
son projet de blues-scratch n'est pas totalement au point; Kid Koala est le
premier à s'en plaindre (ce qui n'est pas nécessaire). La fantaisie du Kid a
pris la forme d'une bataille d'oreiller entre 2 membres de la foule (qui pensent
alors monter sur scène pour toucher aux platines). Cute, mais il y a overdose
de cute lorsque le DJ offre une
composition faite pour une émission pour enfants… On dirait bien Kid «Papa»
Koala est un peu gaga depuis qu'il a une petite fille qui met des autocollants
de sushis sur son matériel de tournée. Malgré ce dérapage, les bons moments du
spectacle sont assez nombreux pour me satisfaire.
******
Bon… j'y retourne. Je ferai un retour sur le jour #2 demain
matin… Aujourd'hui, mes incontournables sont le guitariste Nels Cline et le retour de Wolf
Eyes, groupe bruitiste que j'ai vu en 2006, accompagné d'Anthony Braxton (que j'ai hâte de voir
samedi). Cette fois, les gars de WE seront sur scène avec Richard Pinhas et Merzbow.
Venez faire votre tour! Vous ne le regretterez pas.
D'ici là, vous pouvez me
suivre sur Twitter (@matthieu_petit), en direct de Victo…