La Fin de Casanova Photo: Marlène Gélineau-Payette |
Je vous avoue candidement mon scepticisme lorsqu'on avait annoncé quevPierre Lebeau allait remplacer Gabriel Gascon dans La fin de Casanova qu'allait mettre en scène Denis Marleau. Pas que je n'apprécie pas l'acteur, je crois qu'il a une belle personnalité, qu'il rend habituellement bien les textes par son souci de compréhension et qu'il rend généralement bien ses rôles. Mais voilà, j'avais été plutôt déçue par sa performance dans La Chambre # 13, je trouvais qu'il était un peu trop bien installer dans ses bonnes vieilles chaussures et qu'il faisait son «Pierre Lebeau». Vous savez, le regard oblique, la voix bien enraillée, le ton aride. Mais bon, après nous avoir fait rire dans les deux premiers (j'ai bien dit les deux premiers!) Les Boys, je trouvais qu'il tombait encore une fois dans la caricature dans La Rage de l'ange, Les Dangereux, mais bon. Il a aussi fait de grandes interprétations: on n'aurait pas pu trouver meilleur Séraphin au Québec et j'appréciais beaucoup son jeu dans Fortier.
Bref, je suis allé voir la pièce en tentant de me défaire de mes idées préconçues, autant que possible, surtout que j'avais lu la critique de mon collègue Christian Saint-Pierre de Montréal qui était des plus positives.
Et je fus enchantée! Ce rôle – qu'il a repris haut la main avec moins de semaines (!!) pour le préparer, faut-il le rappeler – lui sied à merveille! Il est touchant, profond, humain, senti. Bref, je n'ai rien à redire. Il s'est mis en bouche les mots de la poétesse Marina Tsvetaïeva en un rien de temps! Il n'a peut-être pas toujours réussit à nous faire «entendre» sa langue fluide, foisonnante, surtout au début lorsqu'il débite des bribes de lettres d'amour, mais n'était-ce pas un peu l'intention que de brouiller les mots d'amour et de haine de toutes ces femmes qui ont aimé Casanova? Cette partie est un peu plus lourde, mais lorsque la jeune fille entre, l'intérêt reprend d'un seul coup! Est-ce le fruit de son imagination cette «survenante» jeune fille qui se meurt d'amour pour lui? Ou est-ce bien réel? Qu'adviendra-t-il alors?
Je m'en voudrais de passer sous silence la scénographie des plus grandioses! Denis Marleau a d'ailleurs visité le château où aurait vécu Casanova dans ses dernières années, et a tenté de reproduire le plus possible sa chambre (jusqu'au parquet qui est une reproduction exacte). Ainsi, on se trouve dans un grand salon, éclairé aux chandelles, le public encercle la scène, créant une intimité toute charmante.
En moins d'une heure vingt, Denis Marleau a réussit à nous emmener très loin avec cette histoire d'amour impossible, traitant de l'éveil à la vie comme de la mort. Je terminerai en disant qu'un des plus beaux passages est lorsque Casanova décrit sa Venise natale à Francesca: il m'y a transporté! J'y étais, de tout coeur avec lui!
Dernier mot: la jeune actrice qui incarne Francesca, Éliane Préfontaine, est sublime et candide à souhait!