Denis Marleau Photo: Gabor Szilasi |
Le directeur artistique du Théâtre français du Centre national des arts, Denis Marleau, conviait les médias à une rencontre intime mardi dernier pour parler de sa septième et dernière saison mais aussi pour revenir sur le travail accompli au fil des saisons qu'il nous aura concoctées.
Je vous mets ici des petits morceaux choisis de la rencontre.
«Il a été important pour moi de donner à voir au public du Théâtre français du CNA cette diversité de la pratique théâtrale. On parle souvent du théâtre qui est en crise. Je me dis, personnellement que le théâtre n'a peut-être jamais été en crise en fait! Il ne cesse d'alimenter et de nourrir les pratiques artistiques de la scène. On n'a qu'à penser à l'opéra qui est allé chercher de plus en plus des metteurs en scène de théâtre pour donner de nouveaux élans à cet art un peu moribond, qui répétait un peu les mêmes formes. On n'a qu'à penser aussi à la danse qui est allé aussi chercher ses impulsions dans le théâtre. [.] Il y a la musique aussi, avec les shows rock… Ça n'arrête pas! Pour le meilleur et pour le pire, on fait du théâtre de tout. La même chose s'est produite ces dernières années aussi avec le cirque qui est allé chercher des aspirations dans la dramaturgie, dans le théâtre. Ce qui était important pour moi c'était de faire voir comment le théâtre agissait sur le monde de la scène, de toutes ses façons, de toutes ses facettes. Ici au Québec et au Canada, on a la chance d'avoir des artistes fabuleux qui sont issus de partout et qui développent des visages, qui acceptent de se laisser contaminer par le théâtre.
Et je me sens relié à l'expérience théâtrale, à travers ces débordements. c'est relié à mon parcours. Ça me paraissait donc important d'offrir cette mosaïque de pratiques qui ouvrent parfois sur des radicalités, des choses surprenantes, que l'on n'attendait pas, qui développent aussi des horizons d'attente et qui sont parfois détruites. C'est la vie, c'est le théâtre aussi qui fait que parfois on est épatés, parfois on est déçus. Pour moi, ça a été quelque chose de vivant.»
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«Mes moments forts sont surtout reliés à des rencontres… avec des auteurs, des metteurs en scène. Par exemple, cette année avec Galin Stoev; il s'est passé une rencontre exceptionnelle. Je n'avais pas du tout planifié une rencontre avec lui. J'ai aussi appris au fil des années à me laisser un peu plus d'ouverture. Souvent les directeurs artistiques, on a tendance à tout bloquer parce qu'on a tellement peur. Si j'en avais sept autres saisons à faire, je crois que je résisterais à les faire un an à l'avance, je pense que je les ferais six mois à l'avance, juste pour garder le plus possible les ouvertures, les opportunités.»
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«Je ne prétends pas être un guide, je prétends être un professionnel qui voyage dans ce monde et qui a envie de le faire partager. De faire partager mes propres étonnements, mes découvertes, mes envies aussi de peut-être aller un petit peu plus loin que seulement un spectacle. Et ça se joue dans les deux sens. C'est pour le public, mais c'est aussi pour l'artiste. D'inviter trois spectacles de Wajdi Mouawad ou quatre de Brigitte Haentjens, ça prend aussi une importance pour l'artiste qui vient ici. Il le sent. Comme pour moi ça a été très important que je sois reçu, accueilli par le Théâtre français avant que j'y sois même directeur.»
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Les Aveugles de Denis Marleau (Céline Bonnier) |
«Je pars d'ici en me disait que je suis beaucoup plus confiant envers le public que je ne l'étais à mes débuts. Je ne suis pas laissé décourager. J'ai continué de développer, comme avec Les Aveugles qui est une radicalité. C'est ici à Ottawa que ça a le moins bien marcher! Il faudrait en voir plus que ça des spectacles de ce genre. qui viennent un peu nous bousculer dans les habitudes.»
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«Je suis un artiste. Ma responsabilité est d'aller au bout de ça et d'accepter le verdict du public et de vivre avec. Alors si je suis déjà d'accord avec tout ce que le public va me proposer, à me questionner, à me sonder, à lui donner ce qu'il veut, bien je ne suis pas un artiste, je suis un programmateur. Je suis ici comme artiste, je ne suis pas un programmateur. Je suis un artiste qui travaille avec d'autres artistes et qui a envie de partager ces expériences-là et puis c'est pour ça qu'on est venu me chercher aussi. Et c'est pour ça qu'on est allé chercher un type comme Wajdi Mouawad qui a ses visions du théâtre qui ne sont pas les miennes nécessairement, qui recoupent les miennes parfois et qui va offrir et développer quelque chose de très personnel. Mais Wajdi n'est pas un programmateur, c'est un artiste.»