Hier soir, je me suis rendue au Centre national des Arts pour voir la pièce Bashir Lazhar, écrite par Evelyne de La Chenelière. Ce show solo est porté par le comédien français Denis Gravereaux. Je ne me doutais pas qu'en me rendant au Studio du CNA, j'allais me retrouver en pleine salle de classe. Le spectacle s'amorce ainsi: Bashir Lazhar se présente à nous, ses élèves, comme le remplaçant de feu notre ancienne institutrice qui a mis fin à ses jours. Peu à peu, il nous donnera la leçon, corrigeant notre orthographe, oui, mais transmettant surtout ses valeurs, que ce soit sur les notions de courage, de justice, de violence… On découvre aussi, en filigrane, le sort qui a amené cet Algérien dans la Belle Province, laissant femme enseignante et enfants derrière lui. Pour son plus grand malheur, on le craint. Nous sommes aussi témoins des difficultés rencontrées par les immigrants, tant sur le plan de l'intégration parmi ses pairs, que sur les maux de tête occasionnés par le ministère de l'immigration. Par ses observations, son bagage et son enseignement, Monsieur le professeur entame aussi une réflexion sur le système d'éducation lui-même, sur l'enseignement du français plus précisément. Evelyne De La Chenelière présente ici un texte fort documenté voire documentaire, mais qui n'est en rien alourdi par un quelconque aspect pédagogique. Il en émane ainsi une grande douceur, une grande humanité que Denis Gravereaux traduit avec tant que justesse qu' «on aurait envie de le ramener à la maison», comme s'est plu à illustrer Paul Lefebvre quelques minutes avant le spectacle. La scénographie d'Oum-Keltoum Belkassi, avec caméra et projections est des plus ingénieuses, servant tantôt de tableau de classe, tantôt de carte du monde ou alors de méthode de communications avec des personnages absents. J'ai aussi apprécié que la pièce traite de sujets aussi délicats tels le deuil, l'intégration, le racisme, la violence, sans pour autant tomber dans l'épanchement dramatique, les cris et les larmes. Plutôt que d'utiliser un gros crayon feutre noire, elle y est plutôt aller de petits traits de craie lumineux…
La pièce est présentée jusqu'au 29 mars à 20h au Studio du CNA. www.nac-cna.ca