Le solo Rearview de Gilles Poulin-Denis était présenté hier soir à la Cour des Arts dans le cadre de Zones théâtrales. De loin le spectacle le plus réjouissant au programme de la biennale jusqu'à maintenant! Le jeune comédien éblouit par la qualité de sa plume et de son jeu, toute en subtilité. Avant la représentation, le directeur artistique des Zones, Paul Lefebvre, avançait qu'on assisterait là à la naissance d'un dramaturge de talent. J'abonde en ce sens! D'un dramaturge certes prometteur (cette pièce, sa première, a fait l'objet d'un processus d'accompagnement dramaturgique étalé sur trois ans), mais aussi d'un interprète au naturel et au charme distinct. Les lumières s'ouvrent sur une chambre d'hôtel crade et à la déco beurk… Un jeune homme est assis dans sa chambre et commence à faire le récit de sa soirée où il a perdu son sang froid, a tabassé un homme sans raison et a pris la poudre d'escampette à bord de Manu, sa bagnole, en direction du nord de l'Ontario. The objects in the mirror are closer than they appear. Une fois derrière le volant, il entame une conversation avec sa fidèle automobile, en proie à la rage, la peur, la douleur. Il regarde ni plus ni moins dans le rétroviseur cette soirée qui a dégringolé. Grâce à la magie de l'éclairage (magistrale!), le lit devient la voiture, l'habillage sonore provient soudainement de sa radio… Et que dire de l'habillage sonore: toujours présente, mais jamais lourde, toujours au service du texte et de l'action…
Très court, le spectacle dure à peine plus d'une heure, mais Gilles Poulin-Denis aura réussi pendant ces minutes qui filent à toute allure, à nous faire part du désarroi d'une jeunesse en quête d'un sens à la vie… Il aura réussi à y saupoudrer un peu de poésie qu'il fait naître au beau milieu du chaos dans lequel est plongé son personnage… Il aura réussi à nous faire rire et à nous émouvoir aussi.
Une réussite.
photo: Yvan LeBel