BloguesLa vie en BD

Lectures récentes (1)

David B.
Les incidents de la nuit 1 : N
(L’Association)

Une superbe BD, à découvrir, si ce n’est déjà fait. L’Association propose, depuis peu, une réédition de la série Les incidents de la nuit de David B. Le premier tome, intitulé N est arrivé tout récemment sur les étals des libraires et mérite amplement le détour. L’ouvrage est à saveur de thriller mythologique, historique, fantastique et littéraire

L’auteur, inspiré par un rêve, est mis sur la piste d’une mystérieuse parution, Les incidents de la nuit. Cette découverte l’amène sur la trace d’un non moins mystérieux protagoniste, Émile Travers, un ancien soldat défiguré de Napoléon ayant réussi à se jouer d’Azrael, dieu de la mort, depuis longtemps déjà… Ce faisant : rencontres diverses, visite de la mine livresque de Mr Lhôm, découverte d’un culte au chaotique dieu grec Enn… Et bien plus. Je n’ose pas en dire trop, d’un côté, de peur d’en dévoiler en excès, et, de l’autre, parce que le récit de David B ne me semble pas fait pour bien se résumer (ce qui n’est pas, avouons-le, un défaut!).

D’une page à l’autre, le récit fait mouche. Le dessin, en noir et blanc, en appui. David B nous propose avec Les incidents de la nuit un univers improbable, voire impossible, mais qui, grâce à sa plume et à la force de sa narration, réussie à le rendre probable et possible. Sans question. Et sans hésitation. À la mesure de l’œuvre bédéesque de David B, on l’imagine bien.

La réédition de cette série est une belle excuse pour replonger dans cet univers trouble offert par David B et se nourrir d’impatience en attendant la suite (ou en la retraçant sur le Web!).

 

Nicolas Debon
L’invention du vide
Dargaud

À ma connaissance, il y a peu de bandes dessinées qui s’intéressent, pleinement et simplement, à l’alpinisme. Et, force est d’admettre que les amateurs risquent d’être intrigués par ce one-shot offert par Nicolas Debon : L’invention du vide. L’histoire, oscillant entre réalité et fiction, s’inspire des écrits d’Albert Frederick Mummery, considéré (si l’on se fie aux notes de fin de volume) comme l’un des pionniers de l’alpinisme moderne.

Avec un trait efficace, Debon nous présente donc une série de récits et d’anecdotes liés à la conquête des Alpes, en parallèle avec un récit principal : la conquête de la plus haute et la plus inaccessible des aiguilles de Chamonix. On y voit donc leurs tribulations. Leurs réflexions. Leurs stratégies. Leurs approches. Comment contourner telle façade, comment conquérir telles parois. Avec ce qui semble être une belle recherche historique, on y fait une forée vers les manières de faire du 19e siècle, bien différentes, il faut l’avouer, de l’alpinisme d’aujourd’hui. Avec des équipements qui nous semblent aujourd’hui désuets, ces hommes ont accompli maints exploits!

Pour faire vivre aux lecteurs les grands espaces, il faut, évidemment, être capable de les rendre en image, BD oblige. Et, comme on le mentionnait tout à l’heure : Nicolas Debon s’en sort fort agréablement bien. Le dessin semble ancré dans l’époque qu’il représente. Une esthétique délavée qui nous rappelle les tonalités qui ressortent des photos d’antan. Certaines cases, vertigineuses, réussissent à nous faire ressentir, le temps d’un instant, l’impression de vide. Et, surtout, une palette et une technique qui sied à la représentation des grands espaces.

Une bande dessinée tendance sportive qui vient apporter un éclairage intellectuel, parfois presque philosophique, à la discipline. Et qui plaira, on l’imagine, à tout amoureux de la montagne.

 

Valérie Vernay & Mathieu Reynès
La mémoire de l’eau, seconde partie
Dupuis

Deuxième partie du diptyque La mémoire de l’eau, qui nous entraîne dans un village côtier chargé (évidemment!) de mystères. On y suit une adolescente qui réussira à percer le secret d’un mystérieux gardien de phare qui, depuis une trentaine d’années, s’est éloigné de la communauté suite à un incident malheureux. Deux destinées, unies, on le devine bien, qui seront appelées à jouer un rôle majeur lors d’une effroyable tempête qui risque, si l’on ne fait rien, de détruire le village…

Si le tome 1 nous laissait sur la disparition de l’héroïne, le tome 2 nous la ramène, fort simplement. Et, s’efforce, au fil du récit, de répondre aux questions laissées en suspends dans le premier opus. Un dénouement plutôt verbeux, au niveau scénaristique, qui sans se perdre dans les détails, doit tout de même expliquer les tenants et aboutissants de la mythologie entourant le village au fil de longues pages dialoguées. Peut-être y aurait-il eu moyen de raconter le tout autrement? De mieux l’imager?

Malgré cette faiblesse, il n’en reste pas moins que le tout est bien dessiné, agréable à regarder. Les ambiances de cette mer, omniprésente, sont bien captées par Valérie Vernay. Calme. Houleuse. Orageuse. Le tout bien appuyé par un style semi-réaliste qui est de mise dans le contexte de ce récit quasi mythologique. Les personnages sont ronds, expressifs. L’image, facilement lisible.

On déplorera donc le côté « pédagogique » de cet opus, aux longues explications. Par contre, ceux qui avaient apprécié le premier tome y trouveront une conclusion fort correcte.