La première lecture s’était faite dans sa jeunesse : le roman inachevé de Franz Kafka, L’Amérique, avait alors fait une forte impression sur le dessinateur et scénariste Réal Godbout (à qui l’on doit notamment les séries Michel Risque et Red Ketchup).
Au fil des dernières sept dernières années, à temps partiel, l’auteur s’est attardé à l’adaptation BD de ce récit. Une opération pas nécessairement facile : question de combler les vides, question de s’assurer que l’ensemble se transpose bien à son nouveau médium.
Il faut le spécifier : à la source, le roman est imagé, humoristique, absurde. Parfois entre la caricature ou un film de Charlie Chaplin. Plus souriant donc que pourraient nous faire croire les stéréotypes qu’on peut avoir face à l’œuvre de Kafka… Au fil des pages, Réal Godbout offre une transposition solide du récit : il en garde l’essence, il en capte les forces, les transpose.
L’Amérique, c’est l’histoire d’une quête impossible, le rêve américain du jeune Karl Rossman, 17 ans. Du jour où il débarque d’un transatlantique à Manhattan jusqu’à celui où, quelques États plus loin, il se joint à un théâtre ambulant, on suit son parcours aux accents surréalistes. À la manière d’un road movie, il va de rencontre en rencontre, à la découverte d’un univers loin d’être sombre, cherchant, au final, à comprendre tant bien que mal ce qui lui arrive, emporté par les flots mêmes de son existence, mené par les états d’âme de ceux qu’il croise. Le récit est rapide, dynamique, bien appuyé par un trait réaliste en noir et blanc.
La lecture du roman de Kafka met bien en exergue le défi qu’a dû représenter son adaptation en bande dessinée: un pari qu’a su relever, avec succès, Réal Godbout.
Et, au-delà de ce bref commentaire, si vous souhaitez, justement, approfondir un peu la démarche de l’auteur, le défi qu’a représenté ce travail, j’ai eu l’occasion, récemment, de discuter avec lui, d’échanger autour de ce travail d’envergure. Et, également, de faire un petit clin d’œil aux rééditions de la série Red Ketchup qui se poursuivent, chez La Pastèque…