Vous connaissez l’auteur BD Seth?
Si vous répondez par la négative, j’aurais envie de vous dire : vous devriez. L’un des plus brillants bédéistes canadiens. Rien de moins.
Une opinion que je partage avec le cinéaste Luc Chamberland, qui a décidé de lui consacrer un documentaire, Le Dominion de Seth, produit par l’ONF.
Et si vous ne connaissez pas l’univers créatif de l’auteur torontois à qui l’on doit (entre autres) Palookaville, l’ouvrage de Chamberland peut constituer une fort belle porte d’entrée. Et si vous le connaissez? L’originalité du regard proposé, la variété des méthodes de mise en image explorée, le dynamisme de l’ensemble, saura vous séduire.
J’ai eu l’occasion, vous l’aurez compris, de visionner ce film tout récemment. En amont, en fait, de deux présentations à Québec, au Cinéma Le Clap, présentées à l’initiative d’Antitube les 6 et 9 novembre prochain, à 19h (en programme double avec un autre documentaire à saveur BD, Un chemin avec Edmond Beaudoin, coréalisé par Jacques Samson (qui, aux côtés de M. Chamberland, sera sur place pour la représentation du 6 novembre).
Pour son film, Chamberland a pris le pari de s’effacer. Jamais on n’entend sa voix. En fait, la seule qu’on entendra, de séquence en séquence, c’est celle de Seth. D’une certaine manière, ce film devient « son » film. Par la variété des facettes de la mise en image, on met en exergue la variété des approches narratives préconisées par Seth : de ces journaux intimes, à ses albums et illustration, en passant par son travail de marionnette ou encore par cette ville, Dominion (qui donne le titre au film), qu’il construit, peu à peu, au fil de maquettes et de chroniques écrites, dans son sous-sol. Le réalisateur exploite ainsi séquences animées, film traditionnel et super 8, extraits d’entrevues… Un clin d’œil nécessaire à un artiste au champ d’exploration plus large qu’on aurait pu le croire et qui, ainsi, vient rythmer le film, découper et structurer la parole de Seth.
Les scènes d’animations sont tirées des journaux intimes de Seth, des œuvres jusqu’à présent non publiées… Véritables courts-métrages dans le moyen-métrage. Une manière fort agréable de plonger dans l’autobiographique… Et, de ce fait, de prolonger aussi ce qui pour Chamberland (et Seth) semble être la vraie nature de ce film : un regard sur la mémoire, sur les souvenirs… Intrinsèque aux questionnements existentiels et poétiques du bédéiste. Et donc ce film se fait le porteur.
Autour de mon visionnement, j’ai eu l’opportunité, également, d’échanger une quinzaine de minutes avec le réalisateur, question, justement, de l’entendre m’expliquer un peu plus avant sa démarche sur ce projet qui l’anime depuis 2006, sur ces premiers contacts avec Seth et ceux qui suivirent, sur la pression qu’il s’est donné à mettre ainsi en scène cet artiste qu’il estime…
À écouter, en attendant les séances du 6 et du 9 à Québec. Ou l’éventuelle sortie DVD.