2014, l’année des contradictions pour la BD francophone? C’est le constat qui ressort du rapport 2014 de Gilles Rathier, secrétaire général de l’Association des critiques et journalistes de bande dessinée (ACBD). Entre nombre de publications et tirages, entre économie du milieu et conditions de vie des auteurs, entre les joueurs majeurs et la balance des éditeurs.
En bref? « Après la décélération constatée l’an passé, la production de bandes dessinées est de retour à la hausse, mais les tirages moyens sont une nouvelle fois en baisse; l’économie générale du secteur se maintient, mais le niveau de vie des auteurs professionnels est préoccupant; le nombre d’éditeurs ne cesse de s’accroître, mais les groupes leaders du marché se démarquent de plus en plus; la diversification du secteur reste dynamique, mais la vigilance et la prudence plus que les innovations dominent dans un marché en manque de visibilité : en 2014, la bande dessinée, sur le territoire francophone européen, s’est confrontée à toutes ces contradictions. »
On parle ainsi, pour 2014, de 5410 BD publiées dans le spectre européen, avec, parmi elles, 3946 nouveautés, 2007 traductions et 1058 rééditions. Donc, face à 2013, une hausse de 4,64%. Avec des tirages évidemment fort variables. Avec un blitz de publications au fil de l’automne, entre septembre et décembre. En fait, au fil de ces quatre mois, c’est 37,19% de la production annuelle qui est mise en place (2012 albums).
Comme à l’habitude, trois groupes (Delcourt, Média-Participations et Glénat) se partagent l’essentiel (36,23%) de la production. Et si on élargit à un « top 15 » des éditeurs, on en arrive à 69,15% de la production BD de 2014. Cela dit : au total, c’est 349 maisons d’édition qui ont offert des bande dessinée au fil de l’année qui vient de se terminer. Ça peut paraître beaucoup, mais reste que le marché BD en France représentait, en 2014, 6,9% de la production éditoriale globale…
Et les ventes?
Selon le rapport Rathier, « les ventes en nombre d’exemplaires se sont tassés d’environ 0,7% sur les 9 premiers mois de 2014, par rapport à la même période l’année précédente. » Une année un brin moins bonne qui s’annonce, il faut l’avouer – tout particulièrement en l’absence d’un grand moteur comme l’a été le nouvel Astérix en 2013. « Seuls quelques titres, la plupart du temps des séries ou des œuvres indépendantes d’auteurs bien installés, réalisent l’essentiel du chiffre d’affaires sur ce secteur. »
En 2014, on comptabilise 98 titres tirés à plus de 50 000 exemplaires, soit 19 de moins qu’en 2013. Les tirages les plus importants de 2014? Blake et Mortimer, Le Chat, Joe Bar Team, Largo Winch, Lucky Luke, Happy Parents de Zep, XIII et Les Légendaires. Du côté des comics, Walking Dead représente le tirage le plus important de l’année (entre 100 000 et 120 000 par tome), suivis par les adaptations BD des Simpsons et la série Garfield. Pour les mangas? L’habituel trio de tête : Naruto (180 000 par tome), One Piece (165 000 par tome) et Fairy Tail (entre 80 et 90 000 par tome). « Les chiffres de tirage des locomotives du secteur sont tous en baisse », indique toutefois le rapport.
Le numérique, de son côté, ne lève pas particulièrement… « Dans une conjoncture économique toujours difficile, le numérique, quant à lui, peine à trouver ses marques dans la bande dessinée. L’enthousiasme des premiers moments est un peu retombé et la plupart des professionnels s’accordent à reconnaître qu’il n’existe pas, aujourd’hui, de schéma économique viable », explique Gilles Rathier, dans son rapport.
De cette industrie, ils seraient 1411 auteurs à réussir à vivre de leur création sur le territoire francophone, et ils sont 1589 à avoir réussi à publier au moins un album en 2014. En fait, selon le Syndicat national des auteurs et des compositeurs (SNAC), « 50% de la profession, en France, gagnerait moins que le salaire minimum. »
Voilà pour les grands constats. Pour la balance, je vous incite à jeter un coup d’œil à l’intégrale du rapport Rathier 2014, disponible sur le site de l’ACBD : www.acbd.fr.