Je ne sais trop pourquoi : je suis incapable de faire ce genre de liste avant la fin de l’année… Mais bon, comme on le dit si bien, « mieux vaut tard que jamais. » Je me permets donc, comme un peu tout le monde avant moi, de vous proposer quelques petits coups de cœur de 2014.
Pour cette note de blogue : mes sept coups de cœur tirés de la production québécoise – donc des livres de scénaristes ou de dessinateurs québécois, publiés au Québec ou hors Québec.
Et toujours des choix difficiles…
Allons-y, donc, sans ordre particulier.
Promise T2 – L’homme-souffrance
Dessin : Mikaël. Scénario : Thierry Lamy (Glénat)
J’avais mis le tome 1 dans mes coups de cœur de 2013. Redite pour 2014? Non. Peut-être simplement l’opportunité d’avaliser la qualité de cette série, la force de ses ambiances, de ses personnages. Le premier tome était porteur de belles promesses. Le second tome a confirmé que ce n’étaient pas, justement, que des promesses. Que la qualité était là, toujours au rendez-vous. Et nous a donné de vifs espoirs pour le troisième – et ultime – tome de cette série, finale de ce crescendo sombre qui nous sera proposé au fil de l’automne 2015.
Dessin et scénario : Zviane (La Pastèque)
Parce qu’on aime bien passer d’un genre à l’autre : après un petit clin d’œil à l’univers horrifique de Promise, on saute vers l’album « didactique » de Zviane sur les fruits exotiques. Sans contredit l’album québécois qui m’aura fait le plus sincèrement rire et sourire au fil de 2014. D’un segment à l’autre, l’auteure expérimente, pour nous (oui, oui) des fruits exotiques connus et méconnus, les évalue. Le tout ponctué de monologues, d’anecdotes, de joyeux délires qui amène l’ouvrage à éviter la redite, à faire que chaque dégustation soit aussi, pour le lecteur, une expérience unique.
Dessin et scénario : Diane Obomsawin (L’Oie de cravan)
Au fil de 2012, 2013 et 2014, j’avais surtout eu l’occasion de découvrir la pratique d’Obom dans l’univers des Arts visuels. Symposium d’art contemporain de Baie-Saint-Paul, Manif d’art, installation vidéo à La Bande vidéo. Une occasion, pour moi, d’explorer plus avant le travail vidéo, justement, de l’artiste – façon fort agréable de combler l’attente d’un nouvel album. En 2014, elle nous est arrivée avec un album personnel, J’aime les filles. Un regard sympathique et réflectif, poétique et naïf, intime et collectif autour de « premières fois » liées à l’amour entre femmes. Premier baiser. Première sortie. Premier kick. Première trahison… On est séduit par sa capacité de conter, simplement, efficacement. Et on reçoit cette série de témoignages, regard sur une époque, une réalité. Et aussi regard sur l’humain.
L’Abominable Charles Christopher T2
Dessin et scénario : Karl Kerschl (Studio Lounak)
Le Studio Lounak nous a proposé 2014 le deuxième tome de L’Abominable Charles Christopher de Karl Kerschl. D’abord un Webcomic anglophone (récompensé ça et là d’ailleurs). J’avais omis (oublié?) de vous le mentionner l’an dernier, mais je ne veux pas manquer de le faire cette année. Une histoire riche, présentée en strips, certes, mais qui offre une narration plus large. Un monstre de type « Yéti », muet, qu’on suit au fil de ses pérégrinations dans « sa » forêt. Tous ces animaux parlant pour lesquels il agit un brin, à sa façon, comme esprit protecteur… Le côté sombre de l’humanité exprimé en certains épisodes. Je n’en dirai pas plus, sinon que Charles Christopher mérite largement le détour.
Dessin et scénario : Richard Suicide (Éditions Pow Pow)
Ça faisait un bon bout de temps qu’on n’avait pas eu le plaisir de lire Richard Suicide en format album. Porté par une esthétique touffue, qu’on peut sans heurts mettre en parallèle d’une certaine bande dessinée indépendante américaine, il nous entraîne dans un quartier où il a vécu : le Centre-Sud, à Montréal. Il nous fait part de ces moments, passés sur son balcon, assis dans son escalier, à observer la faune qui l’entoure. Dans sa tristesse comme dans sa grandeur. Et parfois dans les deux, en même temps. Un regard sur un univers, sur une réalité, qu’on a tous été appelé à côtoyer, raconté avec humour, mais sans mépris.
Dessin et scénario : Régis Loisel et Jean-Louis Tripp (Casterman)
Parce qu’il faut le mentionner. La série Magasin général a lancé son dernier titre, en 2014. Une série qui s’est offert un luxe peu fréquent en bande dessinée : celui de la lenteur. Une série qu’on a, certes, découverte de tome en tome, année après année, mais qui prend toute sa saveur dans une lecture successive, en périodes plus rapprochées. Question de prendre conscience de l’arc narratif qui nous y est offert. De mieux apprécier ces « temps morts », pauses de quelques planches, voire d’un album (Charleston) et de mieux les replacer dans l’esprit global de la série. Alors que la série se termine cette année, si vous n’avez pas eu l’occasion d’y jeter un coup d’œil, c’est l’occasion. Profitez-en. Tout est là. Plus besoin d’attendre.
Dessin: Cathon. Scénario: Alexandre Fontaine-Rousseau (Éditions Pow Pow)
Et allez hop! On termine avec un fort sympathique pastiche, Les Cousines vampires de Cathon et Alexandre Fontaine-Rousseau. Un album bien ficelé, bien rythmé. Et que tout amateur de film d’horreur (tout particulièrement les classiques) ne pourra qu’apprécier. Parce que, après tout, on fait des clins d’oeil au genre, on intègre des passages obligés. Et, surtout, on s’amuse aussi à les détourner, question de créer un récit qui, justement, n’est pas que basé sur ces clins d’oeil, mais arrive aussi à les dépasser. Une lecture légère et sympathique, dont je vois difficilement des raisons de se priver, alors qu’on débute à peine 2015.
Seulement pour vous mentionner que « Magasin Général » n’est d’aucune façon québécois outre le sujet. Il me semble qu’il existe bon nombre de bonne publication ici.
A vos devoirs monsieur.
Bonjour à vous,
Merci pour votre commentaire. J’imagine, évidemment, que chacun à ses critères. Pour ma part, bien que MM. Loisel et Tripp ne soient pas de citoyenneté canadienne, j’ai pris la décision d’intégrer cette excellente série dans mon palmarès québécois, puisqu’il s’agit, tout de même, d’un album réalisé au Québec, au-delà de sa thématique québécoise.
Si je ne m’abuse, M. Loisel réside en terre québécoise depuis 2003. Et c’est le cas également de M. Tripp, qui, dans le passé, a d’ailleurs occupé une fonction professorale à l’ÉMI, du côté de l’UQO. Par ailleurs, l’album est colorié par le talentueux François Lapierre (et, en bonus, Jimmy Beaulieu intervient côté « langage », pour s’assurer de la justesse de l’accent utilisé au fil des dialogues).
Pour ces raisons, j’ai choisi de l’intégrer dans mon palmarès Québec. Ça, et pour souligner – évidemment – l’excellence de cette série.