Il y a quelques semaines était publié le recueil Du sang et de l’encre chez Perro Éditeur. Une collection e quelques 128 planches réalisés par Serge Gaboury au fil de ses « années Croc ». Et une occasion pour lecteur de s’y replonger puisque, en dehors de recueils publiés entre 1982 et 1996 et aujourd’hui écoulés ou des magazines originaux, il n’y avait que trop peu (voire pas) d’occasion de se replonger dans une part importante du travail de ce tout aussi important artisan de la bande dessinée québécoise.
Quelque 128 planches, disais-je, mettant de l’avant certes cette explosion d’hémoglobine et de violence caricaturesque qui fut la signature de Gaboury dans le contexte de son travail pour Croc, mais aussi les commentaires sociaux, la réflexion et le propos sous-jacent à ces planches. Une juxtaposition fort efficace entre style cartoon un brin naïf détourné par coups – sexe, violence, entre autres – sans tabous, doublé d’une volonté justement de faire réagir, de faire réfléchir, face aux enjeux, débats et réflexions indissociables de la vie québécoise des années 1980, ou précurseur à des enjeux clés à venir (comme la question environnementale).
J’ai profité, justement, de la parution de ce recueil pour rencontrer et échanger avec l’auteur, pour revenir sur sa participation, certes, au 189 publications de Croc, mais aussi pour élargir la réflexion, au fil des (très, très nombreuses) collaborations de Gaboury à de multiples publications, de Safarir à Délire aux Débrouillards ou encore à La Terre de chez-nous, sans oublier ses animations télévisées ou Web.
Avec pour prémices son travail au sein de Croc et les échanges et le travail ayant mené à la parution de Du sang et de l’encre, on a eu l’occasion d’aborder, au fil d’une discussion d’un peu plus de 45 minutes, autant ces « années Croc » que celles qui ont suivi, le développement de son style visuel autant que narratif, les défis de création et de mise en scène de ces gags, allant de 4 cases panoramiques à 48 cases (et parfois plus!) sur une même planche, sans oublier ses réflexions sur la « mécanique du gag » et les défis de bien faire de l’humour (en BD ou ailleurs), de la critique et de la censure (avec la récente mise de côté de Maüs en Russie comme trame de fond), entre autres sujets.
Et en fin de parcours, Gaboury se laisse aller à un plaidoyer pour les publications périodiques, parfois oubliées du « milieu de la BD », parfois mésestimée ou mise de côté, alors qu’elles ont (et qu’elles hébergent toujours) le travail de nombreux artistes talentueux : une réflexion capitale pour cet artiste qui, au fil de 30 ans de carrière, se sera consacré presque entièrement à ce médium, à cet outil de diffusion, qui y aura fait son nom autant que d’y avoir inspiré (aux côtés de ses collègues de Croc notamment), une génération de lecteurs autant que d’auteurs.
Bref, la discussion est ici :
À écouter avec attention, l’humour qui ne tue pas même si on est mort de rire !!!