Avec la fin annoncée de l’année 2015 viens le temps des bilans et des recommandations. Quels ont été – pour moi – les titres marquants au fil des douze derniers mois?
D’emblée : une petite précision. Ce premier « top 5 » s’attaquera aux publications réalisées par des auteurs hors-Québec. Et, en ce sens, je dois préciser que ce survol n’est le reflet que d’un échantillon des publications écrites au fil de 2015 (il y a tout de même eu près de 4000 bandes dessinées publiées en France cette année!). Je n’ai pas tout lu. Il y a des titres incontournables – selon la critique – sur lesquels je n’ai pas (encore) eu l’opportunité de mettre la main et, parallèlement, certains autres titres sont toujours sur mon petit bureau, en attendant leur tour.
Mais bon, cela étant dit, passons au vif du sujet.
On commence avec quelques mentions honorables – dans lesquels j’en profiterai pour faire mention de titres que vous allez assurément voir, çà et là, dans les palmarès de fin d’année :
- Les équinoxes, de Cyril Pedrosa (Dargaud)
- Le sculpteur, de Scott McCloud (Rue de Sèvres)
- Le rapport de Brodeck T1 : L’autre, de Manu Larcenet (Dargaud)
Et en ce qui concerne mes coups de cœur?
Zaï zaï zaï zaï
Fabcaro
(6 Pieds sous terre)
Décidément, un album BD surprenant. L’histoire d’un auteur qui, un beau jour, se rend à l’épicerie pour y faire ses emplettes et qui, une fois à la caisse, réalise qu’il n’a pas en main sa carte Fidélité – il l’a oublié « dans l’autre pantalon ». Sans autre moyen, il s’enfuit. S’ensuit une véritable chasse à l’homme, au travers d’une France lourdement divisée face à ce méfait : les uns souhaitent voir les frontières fermées aux auteurs BD, les autres dénoncent ceux qui dénoncent les auteurs BD. En résulte un ouvrage dynamique, surprenant, amusant, aux fortes tendances absurdes et aux connotations évidentes avec l’actualité. Un récit qui fut pour moi une réelle surprise, et que, sans crainte, je vous recommande chaleureusement.
Trashed
Derf Backderf
(Ça et là)
Si vous êtes des lecteurs réguliers de ce blogue, vous savez que j’apprécie la plume et le travail de Derf Backderf. Punk Rock and Mobile Homes et Mon ami Dahmer ont trouvé, ces dernières années, leur place dans mes palmarès de fin d’année. Et, indubitablement, c’est encore le cas pour son dernier-né Trashed, dans lequel l’auteur s’inspire de ses années de travail comme éboueur pour imaginer une fiction à saveur quotidienne autour de ce métier. Riche en anecdotes, fort d’une belle galerie de personnages, le récit entraîne joyeusement son lecteur au fil d’une série de journées de travail, réparties sur diverses saisons. Un regard très personnel, chargé d’humour sur ce métier, tout autant qu’un commentaire critique sur nos habitudes de consommation.
Joker
Benjamin Adam
(La Pastèque)
J’ai été séduit par cet album. Le genre d’ouvrage qu’on commence à feuilleter « juste pour voir » et qu’on dépose sur la table seulement lorsque celui-ci est terminé, quitte à mettre de côté certaines responsabilités, le temps d’une lecture. Un récit riche en rebondissements, racontés en une série de points de vue, montrant la vive capacité de scénariste de Benjamin Adam qui entraîne son lecteur – sans jamais le perdre – au fil de ce récit à l’allure de montagnes russes. Le point de départ? Trois frères, qui, en fonction du résultat d’une partie de cartes, échangent leurs vies chaque semaine selon le choix du gagnant. Le tout, avec parfum d’adultère et de mort. À lire absolument.
Undertaker T1 et T2 (Le mangeur d’or et La danse des vautours)
Xavier Dorison et Ralph Meyer
(Dargaud)
Vous aimez les Western? Alors, vous risquez fort bien d’être séduit par cet Undertaker. En un sens, ce diptyque (deux albums parus en 2015) est un retour aux classiques – ceux du cinéma autant que ceux de la bande dessinée. Le trait maîtrisé, les choix de mise en scène autant que sur le plan du scénario sont en filiation avec les Leone ou Blueberry, tout en gardant un aspect résolument moderne. À l’avant-plan? Un personnage habitué à jouer les seconds violons ou les figurants : le croque-mort. L’antihéros de Meyer et Dorison et charismatique et cynique. Mis aux côtés de sa petite troupe, formée d’une bourgeoise anglaise et d’une servante asiatique, la chimie fonctionne pleinement sur les planches, au fil d’une histoire riche en action qui nous donne l’excuse de replonger, une nouvelle fois, dans l’Ouest sauvage.
What A Wonderful World
Zep
(Delcourt)
L’autofiction et le blogue BD restent bien présents dans l’univers de la bande dessinée. Avec What A Wonderful World, c’est le tour de Zep, connu notamment pour sa série Titeuf, de passer du Web vers le papier, au fil d’une série d’anecdotes et d’instantanés qui font sourire, réfléchir – ou les deux. Une grande variété de sujets. Un traitement bien senti, juste assez gentil, juste assez naïf, pour bien servir ce qui est raconté au fil des planches. Amplement pour faire que le lecteur ne s’y ennuie pas, passant de la vie sexuelle des superhéros au passage des années. On se dit que, décidément, Zep sait manier le style et tirer le maximum du ton « blogue BD », ce qui fait que – si vous avez envie de plonger une nouvelle fois dans le genre au terme de 2015 – cette proposition saura assurément vous satisfaire.