L’avantage d’un repas estival au Il Cortile, c’est sa terrasse, installée sur le pavé, coincée entre les murs d’un immeuble qui la cache entièrement de l’effervescence du centre-ville. Mais si l’on ne trouve pas de place à l’extérieur, qu’importe, la petite salle décorée avec une certaine élégance évoque un petit coin de Florence, presque plus vrai que nature. Encore plus si l’on considère sa cuisine qui va à l’essentiel et ne fait pas du vent. C’est l’une des préoccupations principales de son chef-propriétaire, Franco, qui ne sacrifie aucunement aux modes et pour qui le cour des choses, c’est le terroir et le retour aux sources. Audacieuse, mais sobre, sa cuisine est faite d’excellents produits travaillés d’une manière précise et dépouillée. Dans la meilleure tradition italienne.
Une entrée de bollito au raddichio _ du veau cuit dans un bouillon _ est servie froide sur un hachis de raddichio et nappée d’un filet d’huile d’olive. Ce plat, en apparence simple, incarne tout l’art de manger à l’italienne. Un chef m’a déjà dit d’ailleurs qu’une salade ou un plat de pasta qui contenait plus de trois ingrédients n’était pas italien. L’assiette de légumes grillés est à la mode ces temps-ci, en tout cas à la belle saison, et cela va de soi. Les légumes de primeur du marché ne sont jamais aussi bien traités que quand ils sont laissés à eux-mêmes, simplement arrosés d’un filet d’huile d’olive et de sel… quand on ne l’oublie pas. Il a fallu demander plusieurs fois que l’on nous en apporte, la salière ayant disparu. On nous l’a prestement réclamée pour une autre table une fois nos légumes saupoudrés. Les gnochetti au gorgonzola sont des petits dumplings bien dodus, cuits à la façon des Italiens du Nord, c’est-à-dire plus fondants que fermes. La sauce est crémeuse, mais aucunement lourde, et le chef a ajouté quelques feuilles de basilic à la toute fin. Tout à fait délicieux. Les excellents papardelle aux champignons sauvages sont aux épinards. De grands rubans, servis dans un fond de veau bien dense, garnis d’un peu de prosciutto et de champignons sauvages préalablement sautés. Les douceurs sont à la hauteur, un brin sucrées parfois, mais toujours raffinées, comme cette tarte aux abricots faite de fruits frais et bien caramélisés.
Le service pourrait être un peu plus policé: la brigade cafouille trop souvent et oublie des choses. Surtout quand il y a foule. Mais il ne faut pas oublier que la petite salle à manger du Il Cortile est multipliée par trois lors des beaux jours, la plupart des clients choisissant la terrasse pour dîner sous les étoiles. Cela demande au personnel une certaine habitude. Mais nous nous inclinons devant la rigueur et la belle simplicité de la cuisine, devant la préparation de chacun des plats et la belle carte des vins, un peu chauvine, mais qui garantit de belles découvertes. Voilà une enclave de classe dans un downtown mondain et bien pressé. Comptez 60 $ à deux, pour deux repas, avant le vin, mais avec les taxes et le service.
Il Cortile
1442, rue Sherbrooke Ouest
Tél.: (514) 843-8230