Restos / Bars

Le Brûlé : Les feux de la rampe

Sur un coup de tête, qui deviendra peut-être un coup de cour, nous avons déserté la ville: cap sur ce petit restaurant qui vient de faire… table neuve. «Petite bâtisse coquette, terrain surélevé et planté de conifères dont l’ombre se garde bien d’obstruer les fenêtres»: ce que j’en disais la dernière fois reste encore valable aujourd’hui. Le soleil lui-même est encore au rendez-vous. Peu avant l’entrée, un laurier-rose vous sourit de toutes ses fleurs. À l’intérieur, pas de grands bouleversements, sinon un léger rafraîchissement du décor, le bleu soutenu du plafond et de très courts rideaux tendus à mi-hauteur des fenêtres. Le vénérable piano tient encore la forme, dirait-on. Nous ressortons aussitôt… par l’autre porte, celle qui donne sur la terrasse. Et là, paradoxalement, l’odeur des cuisines se révèle un tantinet plus insistante que dans la salle à manger. Le vent, bien sûr, nous amène cette rumeur de poissons et de grillades qui ne concerne pas l’ouïe. Mes papilles réagissent au quart de tour; c’est le plus souvent bon signe. Il n’y a pas que la Corona dans la vie, je le sais bien, mais j’en commande tout de même une, tandis que mon amie décide d’essayer une Mick’s Red, rousse de belle allure qui nous surprend par sa quasi-absence d’amertume. Jusqu’à présent nous n’avons fait que tourner autour du pot… je veux dire de la carte. Dès lors qu’on s’y élance vraiment, nos dialogues deviennent une succession de petits «oh» et de petits «ah». Imaginez: fricassée de gros pétoncles grillés et son beurre fumé aux herbes; brochette de volaille aux ananas, sauce poivrade; filet mignon de bouf premier choix à la ficelle, jus léger au miel et poivrons; cassolette de rognons de veau façon Collioure et fine Champagne… Sans parler du braisé de ris de veau de lait aux raisins frais et vin de muscat, du grillé au foie gras poêlé de nos fermes ou du dos de flétan frais braisé au gingembre et saumon fumé. Ponctuel et prévenant, celui qui nous sert répond avec courtoisie à chacune des questions qui l’attendent dès qu’il s’approche de notre table. Mon amie et moi trinquons derechef à la vue de nos premiers plats. Le goût délicat de mes tartelettes aux fruits de mer fait l’unanimité à notre table. Pas grand-chose à reprocher à la salade au chèvre et noix de Grenoble servie à ma compagne, sauf que la saveur du chèvre, vraiment peu prononcée, suggère (à tort ou à raison?) un certain apport de lait de vache. En attendant nos plats de résistance, nous avons tout loisir de détailler les bacs à fleurs entourant de loin en loin la terrasse. Pas seulement pour des raisons esthétiques: le chef y fait aussi pousser diverses fines herbes – thym, ciboulette, persil plat – et même de vigoureux céleris. J’ai droit à une escalope de veau de lait façon piccata. Brocoli, pommes de terre rissolées et tranches de courgettes accompagnent les fines tranches de viande mouillées de sauce claire, acidulée, et semées de fines herbes et d’oignons hachés. Quelques bouchées plus tard, mon amie et moi troquons nos plats. J’hérite de son copieux feuilleté de crevettes de Matane au pistou (léger), assorti de la même garniture que les escalopes, à une différence près: un peu de riz blanc remplace les pommes de terre. Pourquoi servir du riz avec un feuilleté? Quelques légumes auraient suffi, je crois. Ce détail mis à part, nous ne sommes déçus ni l’un ni l’autre. Je dois même me faire violence pour résister à la tentation des tartelettes aux fraises que nous avons vu servir à une table voisine. J’exhorte mon amie à céder, elle, pour pouvoir me raconter comment ces grosses fraises bien rouges vous fondent dans la bouche, fraîches, juteuses, sucrées, désaltérantes… Encore! Encore!

Restaurant Le Brûlé
1021, boulevard du Lac
Lac-Beauport (Québec)
Tél.: (418) 849-6678
Plat du jour: 5,99 $
Menu du jour: 7,95 à 13,95 $
Table d’hôte: 14,95 à 26,50 $

Gastronomie jazzée
Eh oui, c’est bien aujourd’hui. Dès 18 h 30. La soirée commence par les «mises en appétit», formule hexagonale fort prisée, depuis quelque temps, quand on ne veut pas dire prosaïquement «amuse-gueules». Quoi qu’il en… soif, l’apéro vous aura été servi à l’oil. Alors que Lucy Roy et son orchestre se chargent de vous jazzer l’ambiance, le chef Christophe Delcourt vous régale d’un menu gastronomique de sept services: salade délice du Grand Ténor (truffes d’Italie et foie gras); bonbons de ris de veau de lait au cidre et graine de vanille; coupe glacée au calvados; rosace d’autruche aux griottes et scampis grillés aux herbes… Vous avez deviné juste: cela a lieu au Brûlé et ne coûte que 65 $ par personne (taxes incluses). Renseignements et réservation: (418) 849-6678