Restos / Bars

Biscotte : Opération de charme

Le Biscotte a tout pour plaire: on y mange bien, le service est courtois, l’ambiance est cosy, et la musique est de bon goût… Jusqu’au nom qui est sympa!

On peut être sûrs que certains restaurants du Plateau ne s’étendront jamais. C’est le cas de ce nouveau venu baptisé La Biscotte – jusqu’au nom qui est sympa! C’est que l’endroit, qui occupe moins de soixante mètres carrés, se trouve borné par une église d’un côté et un salon de coiffure de l’autre. Alors, à moins que la vanité ou la foi ne périclitent…
Cependant, cette Biscotte a tous les ingrédients de la réussite: on y mange fort bien; le service est courtois; l’ambiance, cosy; le décor, juste assez branché; et la musique, de bon goût. Ce mignon petit bijou occupe les locaux d’un troquet ayant appartenu à une tribu de krishnas – qui ont fait une overdose de camomille. Il est pourtant difficile d’imaginer cette vie antérieure une fois qu’on a pris place à l’une des six tables qui entourent le comptoir servant de cuisine, de bar et de caisse. Loin de l’Inde végétative ou de l’Occident confus, le menu, plein de jolies petites idées, s’inspire de la rive sud de la Méditerranée. De jour, on annonce une carte légère composée de sandwichs froids ou chauds, d’omelettes, de pastillas et de petits tajines; des propositions simples mais convenablement maîtrisées. Le soir, les trois plats de la table d’hôte – une viande, une volaille, un poisson -, annoncés sur un grand tableau noir, étaient peaufinés avec un soin d’horloger et servis avec une soupe ou une salade, un dessert et le café pour moins de 17 $.
Le velouté d’épinards, de cresson et de brocoli annonçait le printemps, matérialisé ce soir-là par de lourds flocons. Cela ne l’a pas empêché d’être succulent, et il convenait bien mieux au climat que la salade de jeunes pousses printanières, nappée d’une émulsion crémée, sans huile, parfumée, mais à la texture trop légère pour nous tapisser les flancs d’une couche de tissus adipeux. En plat, une excellente casserole de lapin servie avec des poires caramélisées affichait une association salée-sucrée d’ascendance typiquement marocaine. Le tajine d’agneau aux cardons (un parent de l’artichaut), qui n’étaitpas servi en tajine, montre qu’on peut faire preuve d’invention dans les plus modestes établissements. La viande, juteuse et tendre, était parfaitement assaisonnée de cannelle et de cumin. Et, bien qu’elle manquât d’un peu de sauce, elle n’était nullement sèche. Ces plats s’accompagnaient d’un couscous aérien ou de riz sauvage; de patates sucrées moelleuses et saupoudrées de cannelle; et d’une tranche de courge cuite à la vapeur. Comme quoi on peut très bien se passer du trio carottes-brocoli-courgettes, surtout en cette saison. Excellent dessert, un gâteau de semoule parfumé à la fleur d’oranger, un peu dévalorisé par une sauce au chocolat avec laquelle il n’a rien en commun. Le vin est facturé raisonnablement, au verre ou à la bouteille. Comptez donc 60 $ à trois, avec taxes, service et trois verres d’un Corbières musclé qui convient parfaitement à la cuisine de ce bistro de charme. Au-delà de quelques minuscules bévues sans conséquence, j’ai beaucoup aimé!
La Biscotte
421, rue Marie-Anne Est
282-8008

Juste Nouilles
Assistons-nous à la naissance d’un empire? Quatrième franchise pour ce repaire des amoureux des nouilles, qui aiment faire tournoyer leurs rubans de farine de riz ou aspirer avec grand bruit leurs vermicelles, le Juste Nouilles de Rosemont vient initier l’Orient montréalais à l’Orient tout court. Nous y avons mangé de très bonnes nouilles de riz sautées au poulet, au chili et au basilic; un plat de chow mein; et des nouilles épaisses aux oeufs, façon Shanghai, avec plein de légumes mal taillés mais bien sautés et des crevettes au goût fumé tout à fait délicieux.
Pour la plus nette, la plus belle des succursales, la seule où il y ait un souci d’apparence, on a choisi le Vieux Rosemont. Ceci constitue presque un acte de foi (et de bravoure), considérant qu’il n’y a dans ce très mignon quartier à quelques encablures du Plateau qu’un seul bistro qui soit digne de mention. Ça en fera deux! Ce n’est pas cher – à peine hui dollars par personne, tout compris -, si vous résistez aux gâteaux commerciaux qu’on vous propose en conclusion. Aucun amant de la nouille ne devrait habiter à plus de quelques minutes d’un resto de ce genre.
Juste Nouilles
3244, rue Masson
725-3747

Amuse-gueule
Je ne parle jamais de livres publiés en anglais dans cette chronique mais je dois faire entorse à la règle pour un livre d’exception. Rien de tel n’existe encore en français: oeuvre de Terry Durack, le formidable critique gastronomique australien du Sydney Morning Herald, Noodles pourrait bien devenir un classique. Il en a toutes les qualités! C’est un ouvrage tout simplement stupéfiant, tant pour ses qualités esthétiques que pour son contenu. Passionné d’Asie, Durack décrit toutes les nouilles du continent, de tous les pays, explique pourquoi et comment on les mange, attribue à chacune une carte d’identité, et propose des recettes faciles et succulentes. De plus, la mise en pages, le graphisme et la photographie se rapprochent du livre d’art. En vente chez Indigo et Chapters.