Restos / Bars

Le Gavroche : Le boeuf ou la moule?

Une petite fausse note ne gâche pas tout un concert… Vraiment sceptique à l’arrivée, j’avoue n’avoir pas été trop déçu par cette "brasserie française".

En cette première soirée du Festival d’été, il n’y a pas foule dans les établissements situés un peu loin du "centre". Ajoutez à cela l’heure tardive à laquelle, inspirés par plusieurs apéros, nous avons finalement pensé qu’il était temps de souper. Nous voici donc à l’entrée du Gavroche, amenés là par les hasards de la circulation et le manque de parcomètres libres dans le Vieux-Québec. Entrerons-nous? Nous survolons d’un coup d’oeil le menu affiché dehors: grenadins de veau sauce Francesca, escalope de saumon en écaille verte, mignon de boeuf sauce aux trois poivres… Un ou deux pas de plus et c’est la mini-galerie de photos en couleur qui retient notre attention… Pas vraiment le temps d’admirer, car notre faim se met soudain à ruer. À l’intérieur, la musique du pianiste Marc Drolet nous accueille, de même qu’elle accompagnera tout notre repas, nous promenant de Fascination à Petite Fleur et de Piaf à Mike Brandt. Une multitude de miroirs répercute en tous sens l’image des quelques clients attablés dans un coin de la salle à manger éclairée par de nombreuses fenêtres donnant vue sur la rue Saint-Joseph. La pièce est vaste; tables et chaises s’alignent sagement devant de longues banquettes. À ma gauche, juché sur un bout de cloison, un petit clown de plâtre joue de la contrebasse. Sur les murs, partout, une profusion de photos en noir et blanc montrent sous leur plus beau jour les Louis Jourdan, Trenet, Girardot, Belmondo, Sapritch et bien d’autres, sans parler de ce Ferré méconnaissable de jeunesse. Quant à la carte, elle se révèle prolixe: mosaïque de volaille et sa vinaigrette aigre-douce, feuilleté aux Belles de Matane à la crème rocambole, médaillons de filet de porc sauce miel et moutarde, grenadins de veau sauce aux mousserons et basilic, filet de truite poêlé et pétoncles en escorte… D’abord, nous ne souhaitons commander qu’un seul plat. Nous trinquons trois ou quatre fois d’affilée pour nous en persuader – blanc contre rouge et rouge contre blanc. Mais qu’est-ce qui nous fait changer d’avis tout à coup et nous rabattre sur la table d’hôte? "Ministère et boule de rhum", comme dit un de mes amis. "Pour monsieur, le friand d’escargots au (sic) sambuca…" annonce le serveur en posant devant moi ce petit vol-au-vent débordant d’escargots et de champignons. Mes appréhensions (pour le moins incompréhensibles) s’envolent dès la première bouchée, et la sauce elle-même, semée de fins brins de carotte noués ou croisés, je la qualifierais d’apaisante, sans aucune insistance d’un ingrédient en particulier. Le "mais c’est bon!" de ma compagne me laisse deviner qu’elle partageait la même inquiétude que moi en ce qui concerne sa chiffonnade de jambon fumé et feuilles croquantes – en l’occurrence une fine tranche de jambon fumé, séché et pas trop salé, enroulé comme un turban et surmonté d’un oeuf de caille teint en rouge qui, à première vue, pourrait passer pour un radis ou une tomate cerise… Et tout cela – jambon, oeuf et mesclun -, tout cela a bon goût, avec une petite pointe d’assaisonnement évoquant la moutarde maison. Bavardant de tout et de rien, le temps qu’arrivent nos plats de résistance, nous finissons par identifier, croyons-nous, la raison de nos craintes: l’inévitable déception dont nous étions "punis" chaque fois que nous avions choisi un resto in extremis… On pourrait en discuter longtemps, mais voilà que se manifeste une imposante montagne de moules poulette. Mon amie mange et s’extasie. Que peut-il y avoir d’exceptionnel à des moules poulette? J’y ai goûté et j’ai compris. Les meilleures que j’aie mangées! Les mollusques eux-mêmes sont dodus et la sauce proprement divine, abondante, gouleyante comme un vin de choix. Hélas, mon émincé de mignon de boeuf sauce moutarde et miel me ramène brutalement sur terre, trop brutalement. D’une banalité, je vous dis! Accompagné d’une ratatouille qui aurait pu lui sauver la mise, mais j’ai horreur de la ratatouille. Je mange parce que j’ai encore faim; l’emballement n’y est plus, le sommeil me gagne et un café s’impose. Deux cafés, disons, et une salade de fruits frais.

Restaurant Le Gavroche
240, rue Saint-Joseph Est
Québec (Québec)
Tél.: (418) 524-5330
Menu du jour: 7,95 à 12,95 $
Tables d’hôte: 18,95 à 24,95 $
Souper pour deux (incluant taxes et boissons): 59,69 $