Restos / Bars

La patate chaude de Rosemont : La Tomate chaude

La Tomate chaude qui doit son nom à l’habitude d’offrir une tomate cerise en guise de mise en bouche. Or, c’est une tomate "froide" qui nous arrive, servie avec un peu d’huile d’olive, quelques gouttes de balsamique et un soupçon de poudre de Parmesan Reggiano (qui n’en est pas), tomate qu’on doit écraser sur le dos de la fourchette et qu’on tartine sur un bout de baguette chaude.

On dit souvent que l’habit ne fait pas le moine. Pourtant, Oscar Wilde lui, qui n’était pas réputé pour son manque de discernement, disait que "seuls les aveugles ne pouvaient juger par ce qu’ils voyaient". Ainsi, dans l’univers très plastique de la restauration, chaque décor cache un dessein.

Prenons La Tomate chaude qui doit son nom à l’habitude d’offrir une tomate cerise en guise de mise en bouche. Or, c’est une tomate "froide" qui nous arrive, servie avec un peu d’huile d’olive, quelques gouttes de balsamique et un soupçon de poudre de Parmesan Reggiano (qui n’en est pas), tomate qu’on doit écraser sur le dos de la fourchette et qu’on tartine sur un bout de baguette chaude. Malgré les risques d’éclaboussures, l’idée est excellente en soi; c’est à peu près la seule!

Installé dans une sorte de chalet suisse qui hébergeait autrefois un fleuriste et avant cela un garage, ce nouveau resto a un décor d’un tel kitsch qu’on se demande si le patron a le sens de l’humour ou de la dérision. À l’intérieur règne la confusion esthétique la plus totale: beaucoup de verre; de fausses peaux de zèbre et de tigre; des salles de toilette aux murs presque transparents, contenant un lavabo transparent et un pommeau de douche en guise de robinet; des murales dépeignant une scène de jungle, un frigo à vin… inaccessible sur un second palier. Bref, un décor qui n’a ni sens du design ni sens pratique. Ajoutez à cela un choix musical qui hésite entre la musique de rave et le heavy rock et vous avez le topo. Quel genre de cuisine trouve-t-on dans un tel espace? Un menu embrouillé, une cuisine qui s’en va dans toutes les directions sans but précis (poutines, salade César et hamburger aux côtés de poisson grillé et de pousses de jeunes bok choi en salade), dans le désordre; et qui propose des plats faits de produits de qualité ordinaire servis dans de la faïence aux formes géométriques complètement ridicules ou, pire, transparente. Sans parler d’une technique mal maîtrisée et de prix assez excités.

La soupe andalouse est chaude, un velouté de type méditerranéen habituellement fait de tomates fraîches, converties ici à la boîte de conserve, et de poivrons, mais qui révèle une forte acidité et une absence de parfum. On n’a pas corrigé l’acidité de ce plat par une pointe de sucre. Les petites fritures de poulet à la noix de coco, des finger food à l’américaine, sont assez goûteuses mais servies avec une sauce au yaourt, au miel et… à la marmelade! Avec pour résultat, une catastrophe en bouche, des goûts qui s’annulent les uns les autres, des produits incompatibles, une envie de retourner la préparation en cuisine. En plat, les pastas sont un meilleur choix, par exemple ces cappellini, un choix populaire de ce temps-là, des rubans minces et à peine cuits, sautés avec des artichauts en boîte, des tomates séchées, des noix de pin, et des tomates fraîches cette fois. Il manque un peu de sel et d’huile qu’on nous apporte précipitamment; mais c’est une bien mince faute en regard du suprême de poulet sauté servi avec une sauce au chèvre chaud et au thym. Accompagné de tranches d’aubergines insuffisamment cuites, et d’un sauté de courgettes et d’oignons, et de quelques tranches de pommes de terre passées trop longtemps en friture, le poulet de facture industrielle sans aucun arôme et sans aucun assaisonnement est d’une fadeur consternante et sa sauce, presque insipide. Ça ne s’arrange pas côté dessert: un gâteau praliné de chez Kilo, sans aucune finesse, gras et lourd, et servi sur une assiette… transparente entouré d’une crème anglaise de commerce. Comment pardonne-t-on à ce Kilo de produire des desserts aussi inintéressants et soporifiques quand on sait ce qui peut se faire avec des fruits frais par exemple. Seul facteur de rédemption, sur une carte des vins où les prix sont nettement au-dessus de la moyenne (37 $ pour le vin le moins cher) pour ce type de resto, on offre un bon vin de la maison facturé à 14 $ le demi-litre. Quant au service, il est courtois et attentionné, même s’il ignore tout de l’art culinaire. Mais c’est trop peu et surtout trop tard en regard des erreurs que l’on commet en cuisine. Comptez 78 $ pour deux repas, avec les taxes et le service et un demi de rouge.

La Tomate Chaude
2346, rue Beaubien Est
Tél.: 729-2636

CAFÉ CULTURE
Les points communs à tous les cafés en ce moment: la musique cubaine, la cigarette (son dernier refuge) et les grands miroirs. Rigolo et sympa, l’Alchimiste est un café de quartier "années 70", décoré avec des trucs vaguement exotiques et peint aux couleurs du Sud. Mais on y parle davantage de grossesses et de divorces que d’indépendance ou d’existentialisme. Or, le registre culinaire bistro avec son menu de salades, de hamburgers, et de pastas (spaghetti… gratiné?) est tout à fait prévisible et pas exotique pour un sou. Les jus sont frais, les burgers délicieux et le café, honnête; mais les soupes sont faites à partir de poudres industrielles et servies avec des biscuits soda. Si ce café n’a pour but que de nourrir rapidement, il réussit. S’il cherche à ne pas lasser l’aficionado, il aurait intérêt à s’améliorer quelque peu. Une vingtaine de dollars à deux avec les taxes et le service.

Café l’Alchimiste
5866, rue DeLorimier
Tél.: 271-7128