Restos / Bars

Pasta Casareccia : La main à la pâte

Si l’immobilité en restauration est un signe de paralysie, trop de changements s’interprète vite comme de l’inconstance. On n’accusera pas Pasta Casareccia de s’être cantonné dans le premier, ni d’avoir sombré aveuglément dans le second, puisque la cuisine s’inscrit lentement mais sûrement dans l’air du  temps.

Si l’immobilité en restauration est un signe de paralysie, trop de changements s’interprète vite comme de l’inconstance. On n’accusera pas Pasta Casareccia de s’être cantonné dans le premier, ni d’avoir sombré aveuglément dans le second, puisque la cuisine s’inscrit lentement mais sûrement dans l’air du temps. Cependant, les plats restent sensiblement les mêmes, année après année. Ce restaurant du quartier Notre-Dame-de-Grâce fait presque partie du mobilier au même titre que le Cinéma V. Différence majeure: il n’est pas subventionné, ne fait pas perdre d’argent à la Ville, et n’a jamais fermé ses portes au nez et à la barbe de ses clients. À moins qu’ils ne se présentent après vingt et une heures la semaine, bien sûr.

L’idée derrière Casareccia – dont une succursale existe aussi à Ville Saint-Laurent – est bonne, mais n’est pas nouvelle: faire épicier fin et resto dans le même établissement. En tout cas, la famille marchese qui dirige ce restaurant assez unique en a été le pionnier. La salle divisée en deux parties (côté resto et côté épicerie) a subi assez peu de changements depuis l’ouverture: un décor vaguement sixties en rouge et en blanc disposé autour d’une longue banquette aux formes voluptueuses où règne la matière plastique. Il n’y a ni nappes ni serviettes de tissu; et sur chaque table ou presque, on a disposé une bouteille de vin (incitation?), plutôt qu’une bouteille d’huile d’olive comme c’est devenu la mode dans les établissements branchés. La faune n’a pas non plus les airs de diva de la Main, ni les tenues ni les parfums: on trouve là des habitants du quartier, jeunes et vieux, qui semblent ravis de s’y trouver. C’est donc un peu l’anti-fashion, davantage le resto d’habitués que le resto de frime. La carte décline les pâtes selon une mode ancienne: on choisit le type de pasta et le type de sauce dont on a envie ce soir-là. Si on ne connaît pas la règle cardinale qui veut que les pastas longues soient associées à des sauces lisses, et les pastas tubulaires à des sauces grumeleuses, on peut faire des erreurs. Ce qui ne semble troubler personne tant l’ambiance est informelle.

Et si la cuisine n’est pas d’une grande précision, elle fait dans un registre ménager tout à fait honorable. En table d’hôte, par exemple (16 $), on trouve une soupe aux crêpes, composée d’un bouillon simple mais pas fait maison, dans lequel flottent deux crêpes saupoudrées de parmesan frais; ou la pasta fagioli, comme son nom l’indique: une soupe aux pâtes et aux haricots, une version moins solide que l’habituel potage épaissi aux légumineuses réduites en purée. Les tortellinis au saumon sont farcis d’un appareil délicat qui, associé à une sauce à la crème, adoucit le goût assez gras du poisson. Les tagliatelles fraîches (une pâte aux oeufs) sont extraordinaires, vraiment succulentes. Nous avons choisi un pesto de tomates séchées, de noix et d’épices, allongé de beaucoup d’huile d’olive donnant une charpente un peu agressive à la sauce qui les nappe, mais qui convient assez bien les soirs de première fraîcheur.

Les desserts demeurent classiques: un tiramisù, inévitable, préparé avec rigueur selon la recette qui l’a rendu célèbre, c’est-à-dire avec des biscuits de Savoie, du mascarpone et du café. Ou un gâteau au fromage parfumé au zeste de citron. Habituellement, je déteste ce type de gâteau que j’associe souvent à une nuit sans sommeil ou, pire, à une digestion paresseuse; mais la version Casareccia est douce, et moins sucrée qu’il n’y paraît. En fait, ici, ce resto qui vieillit bien fait la nique aux restos branchés en proposant une cuisine simple et bonne, à des prix encore verrouillés. L’addition ne monte jamais plus haut que 60 $ à deux, incluant les taxes, service, et deux verres de vin.

PASTA CASARECCIA
5849, rue Sherbrooke Ouest
Tél.: 483-1588

CAFÉ CULTURE
Zanetti

Attention: ce nom-là est célèbre. C’est celui d’une compagnie italienne de café et de machines (Segafredo) connue dans toute la Péninsule (et au-delà) pour ses pistons à espresso de couleur vive. Mais l’union des deux dans un seul établissement au coin du Marché Jean-Talon est le fruit du hasard. Ce qui n’a pas empêché la famille Zanetti de Montréal de servir le café de Segafredo – pour le fun. Ouvert sur le grand marché et son activité, c’est une nouvelle halte ensoleillée et joyeuse où il fait bon s’installer durant quelques heures pour laisser passer le temps, si on l’a. La carte ne pétille pas d’idées, contrairement au joli décor moderne et un peu froid, mais propose un plat de pasta par jour, des sandwichs et des petits déjeuners copieux et très corrects.

ZANETTI
77, rue Shamrock
Tél.: 279-0444