Restos / Bars

Yen Yen : Économiser sur le pho

L’expression "pas cher" sonne toujours bien à mes oreilles. Même si je n’aime pas la nourriture de chaînes, que le burger me fait autant d’effet qu’une parade de mode chez Wal-Mart, j’adore sortir d’un resto avec encore quelques billets au fond de mes poches.

L’expression "pas cher" sonne toujours bien à mes oreilles. Même si je n’aime pas la nourriture de chaînes, que le burger me fait autant d’effet qu’une parade de mode chez Wal-Mart, j’adore sortir d’un resto avec encore quelques billets au fond de mes poches. En autant que les patrons n’exagèrent pas sur les additifs.

Aujourd’hui, il ne reste que deux types de restaurants "pas cher" à Montréal: les chaînes de fast-food et les troquets ethniques. Les deux ont leurs vertus et leurs vices: le premier nous rassure par son côté clinique, la propreté immaculée et le menu perpétuel qui ne change jamais et dont tous les mets sont exac-te-ment les mêmes, jour après jour. À Paris ou à Hong Kong, on retrouve des menus identiques et la même ambiance. Il faut dire que sur une planète où les changements sont aussi rapides qu’une fusée, les chaînes nous rassurent par leur permanence.

Les bouis-bouis ethniques, eux, ont une vertu principale et ça se réduit généralement à une idée: la cuisine a bon goût. Alors, devant les budgets impressionnants des chaînes pour faire valoir leurs tacos usinés ou leurs sandwichs préfabriqués, les troquets de mamans asiatiques leur opposent une cuisine simple, qui pourrait tout simplement redéfinir ce qu’est la cuisine pas chère. Votre choix.

Le mien: les guinguettes à soupes phos qui ont poussé comme des champignons, pas après la pluie mais après la fin de la guerre du Viêt Nam. Des endroits qui proposent une cuisine souvent excellente et complètement naturelle, sans addition de produits chimiques et qui nourrit des milliers de personnes quotidiennement dans leur patrie d’origine. Dans tous les quartiers de la ville, on les trouve, sous exactement la même configuration qu’elles ont là-bas: quelques tables, un menu en papier, un air de buvette de gare, parfois la télé, parfois un éclairage de salon de coiffure. Yen Yen, installé à deux pas du métro Frontenac, trouve l’inspiration dans ce type de petits restos. Est-ce là le compromis idéal entre la nourriture de chaînes et l’exotique? En théorie certainement; en pratique, faut voir. Ceux qui ont le coeur fragile lui reprocheront un décor ordinaire où l’installation d’halogènes reste le seul accommodement à l’ère moderne, pour ne pas dire à l’Occident. Ce resto attire surtout une clientèle locale qui apprécie manifestement de ne pas payer bien cher ses bols de soupes pho fumantes, au boeuf cru, assaisonnées de haricots de soja germés et de basilic frais; le tout cuisant encore dans un bouillon d’assez bonne facture (qui n’est pas le meilleur en ville, qu’on se le dise); ses rouleaux impériaux bien croquants – sur le modèle chinois – ou de printemps, farcis avec beaucoup de chou et de carottes; ses petites galettes de crevettes embrochées sur un bâton de canne à sucre fraîche; ou des sautés de nouilles qui font paraître banals d’autres plats du même genre servis dans ces chaînes nouveau style, tenues par des businessmen de Hong Kong.

Quant à la qualité des plats, le problème est souvent le même et n’est pas insoluble: le bouillon est trop éthéré, et les garnitures trop parcimonieuses. Le pho parfait, selon une amie vietnamienne qui s’y connaît, commence par un bouillon parfumé, dense et robuste. Chez Yen Yen, les saveurs se cachent. Rien à dire du goût, seulement il n’y en a pas assez, voilà tout. En tout cas, il n’y a rien à reprocher à la facture: un repas coûtera moins de 30 $ à deux pour un dîner tout à fait copieux et sain. Avec les taxes et le service.

YEN YEN
2709, rue Ontario Est
Tél.: 523-5846

Amuse-gueule
Ces temps-ci, le cochon fait la première page presque aussi souvent qu’Oussama ben Laden. Coïncidence? Je parie cependant que le second n’aimerait pas être comparé au premier. Le porc fait partie de la culture québécoise depuis tant de siècles que nous devrions substituer l’expression pur porc à celle de pure laine. Et nous ne sommes pas seuls dans ce cas, les Italiens aussi (pour ne rien dire des Chinois et des Viêts) ont la passion du cochon, sous toutes ses formes. Pour en avoir un aperçu, la maison d’édition Könemann, qui publie toujours de beaux livres à prix modestes, inclut un titre essentiel dans sa collection sur la gastronomie. Le Cochon, un ouvrage collectif, est placé sous la direction de Daniella Garavini. C’est un livre grâce auquel on apprend l’histoire de l’élevage porcin en Italie, mais surtout les habitudes d’élevage fermier; soit la façon dont on gardait, nourrissait, engraissait et vendait les animaux avant l’avènement de l’industrialisation de la nourriture. En supplément, une centaine de recettes de 55 chefs réputés, la plupart faciles d’exécution et toutes assez modernes. Une lecture d’actualité qui contribuera sans doute à donner des arguments à plusieurs, tant ceux qui vouent au cochon un culte indéfectible que les inquiets… qui s’inquiètent.