Restos / Bars

Ristorante Elio : Cuisine d'avant… garde!

Il y avait une cuisine de bûcherons chez les francophones et une cuisine de briquetiers chez les italophones. Deux cuisines frustes dont la principale qualité est d’être économiques et  bourratives.

Il y avait une cuisine de bûcherons chez les francophones et une cuisine de briquetiers chez les italophones. Deux cuisines frustes dont la principale qualité est d’être économiques et bourratives. Deux cuisines en voie de disparition en quelque sorte. Certains diraient: tant mieux!

Chez les Francos, on a le Laurier BBQ, un lieu intemporel qui résiste au passage du temps, un resto nostalgique qui attire ceux qui sont allés manger là dans leur enfance et qui essaient, parfois avec succès, parfois sans, d’y emmener leur progéniture. Populaire auprès d’une certaine clientèle italienne, Elio, lui, prépare sensiblement la même tambouille populaire depuis 37 ans, dans une ambiance comparable à celle d’il y a 40 ans, pour une clientèle qui a vieilli avec lui. À une époque où la cuisine italienne était cette grande inconnue exotique, Elio, qui proposait des petits plats napolitains, s’attirait les éloges. Aujourd’hui, des émules d’Elio, il y en a encore dans quelques vieux quartiers de Manhattan ou de Baltimore, des restos qu’on voit apparaître dans les films de Scorsese comme un élément-clé de la narration au même titre que la bouille vaguement menaçante de Robert DeNiro. Chez Elio est devenu un endroit qui s’est incrusté dans la mémoire et qui a refusé de changer. Certains diraient: tant mieux!

Ce qu’on y mange? Tout ce qui apparaît au menu des restos italiens économiques avec des menus plastifiés – ce qui indique qu’ils changent peu – et dont la cuisine a deux impératifs: rapide et pas chère. Cela dit, la cuisine banale ou, pire, pas bonne reste toujours trop chère. Et comment y mange-t-on? La pizza, en version fine ou épaisse, est plus chère que chez les concurrents (et ils sont nombreux), et montre des signes de monotonie évidents: des tomates en boîte, des champignons en boîte, des olives de qualité inférieure, du saucisson industriel, de l’huile d’olive plus très très vierge, des légumes sans goût et un assaisonnement quelconque (lisez: pas assez de sel). Les pâtes – nous avons choisi les spaghettis à l’ail et à l’huile, un classique que les Italiens apprennent à préparer dès le berceau – sont trop cuites et saupoudrées d’ail rôti plutôt que pilé à cru, une version dont j’ignorais l’existence et qui n’a d’intérêt que celui d’être inédite. Mais la surprise passe et nous nous lassons vite de ce plat lourd et sans saveur que nous laissons figer dans son magma agglutiné. Le melon et le prosciutto servis l’un sur l’autre agacent: le prosciutto a les bords racornis et le melon n’est pas mûr. La salade de tomates et de boconcini est faite de dés de tomates ternes, d’une version industrielle inodore et insipide du fromage napolitain, et de la même huile d’olive faiblement rance qui a un goût "térébenthiné". La focaccia, généralement offerte en amuse-gueule, est facturée au même prix qu’une pizza.

La carte des vins est insignifiante; et au verre, on vous impose du vin d’épicerie. Bref, si vous y tenez ou si vous êtes nostalgique; mais à 35 $ à deux pour une cuisine mémoire, avant le vin mais avec les taxes et le service, je recommande plutôt la lecture du dictionnaire à la rubrique "Italie" ou le livre de Bugialli, Cuisine italienne.

Ristorante Elio
351, rue de Bellechasse
Tél.: 276-5341

Laurier BBQ

Étonnante, quand même, cette rôtisserie populaire, devenue pour les uns un cauchemar du passé et pour les autres, une incursion dans la mémoire d’une époque où l’on se contentait d’une cuisine préfabriquée, servie par des petites madames en tablier avec une résille dans les cheveux. Ce temps-là est révolu? Pas tout à fait. Devanture de maison de campagne, banquettes de bois alignées, odeurs de friture. Et surtout un menu tout à fait banal: du poulet industriel, en salade, en version hot entre deux tranches de pain Bimbo, en pâté ou en vol-au-vent, ou simplement grillé, avec choix de viande blanche ou brune comme chez Ma Tante, sauce épaisse et farineuse et salade de chou, un peu rance, "on ze side". Comme c’est drôle de voir les yuppies – épaules couvertes de cachemire – s’entasser dans ce troquet. Car le Laurier ne ressemble plus à son quartier; contrairement à ce dernier, il est resté populaire, convivial et surtout très économique: à peine 15 $ par personne, avec la soupe, une grillade et un dessert. Nous avons volontairement boudé le café de couleur grise qui cuit sur une plaque chauffante depuis on ne sait quand.

Rôtisserie Laurier
381, avenue Laurier Ouest
Tél.: 273-3671

Amuse-gueule
Jusqu’au 19 novembre, le Beaver Club de l’Hôtel Reine-Élizabeth propose la gastronomie et les vins du Languedoc-Roussillon avec surtout l’exceptionnelle cuisine des frères jumeaux Jacques et Laurent Pourcel, propriétaires du Jardin des Sens de Montpellier, trois étoiles au Guide Michelin, un resto tout à fait remarquable qui fait courir le monde entier. Pour avoir mangé de cette cuisine il y a quelques années, je ne saurais la recommander suffisamment. L’événement met aussi en vedette les vins de Fortrant, qui ont révolutionné le monde vinicole français en misant sur les vins de cépages dans les années 80.

Réservations: 861-3511.