N’étant pas, comme ma compagne, un fana des sushis, j’exige beaucoup de ces petits bibelots comestibles. Et, au risque de sidérer les vrais amateurs, il suffit que les sushis et sashimis me plaisent vraiment pour que je néglige autant la sauce au soya (sho-yu) que les lamelles de gingembre et le wasabi, cette pâte de raifort qu’on a pris l’habitude d’appeler moutarde.
À mon arrivée, j’ignore encore que ce sera le cas, ce soir, dans une sourde rumeur bientôt promue brouhaha par la bonne humeur ambiante. Le vin stimule les décibels, c’est connu. On fête. Un 10e anniversaire, mais aussi les rénovations qui avaient pour but de japoniser davantage le décor. Du sushi bar jusqu’aux dernières tables alignées près des fenêtres, invités, habitués, amis et collègues des médias s’apprêtent à découvrir quelques éléments d’un nouveau menu encore plus ou moins secret. Aux spéculations se mêlent trois certitudes: tartare de saumon, boeuf sashimi et saumon tempura. Il est aussi question d’une "assiette-surprise" qui ne figurera pas au menu, puisqu’il dépendra chaque jour des "arrivages du marché" et de l’inspiration du chef. Les tempura de crevettes, le poulet teriyaki, les brochettes et les rouleaux impériaux ont été jugés dignes de rester sur la carte, tout comme les nombreux sashimis, makis et temakis à l’anguille d’eau douce, au maquereau, à la pieuvre, aux oeufs d’éperlan ou de saumon, au saumon frais ou fumé.
Une bouteille de pinot noir (Laroche, 2000) trône sur la table, devant moi. Nous trinquons joyeusement, mon verre de Tsingtao contre quatre verres de vin rouge. Au premier service, une soupe au miso. Son goût ne peut être prévisible, quand on sait combien il existe de variétés de miso. Le "hmm!" des autres précède le mien, tout aussi sincère. Cubes de tofu fondants, champignons aussi languides que croquants, bouillon délicatement parfumé: voilà remplies toutes les conditions pour que je me sente bien et le dise à mes voisins de table. On nous amène nos entrées – celles-là mêmes que nous avons vu servir autour de nous – et deux voix s’exclament tout bas: "Il n’y a pas de rouleaux?" Ce double cri du coeur se confond bientôt avec les commentaires mêlés de curiosité dont nous encensons tous le tempura de saumon – une fine croûte de pâte si rapidement cuite que le saumon, à l’intérieur, reste moelleux, à peine tiédi dans l’ensemble et mi-cuit aux extrémités. La garniture est constituée d’une salade de wakame (algue verte) détaillé en fines lanières et de longues "ficelles" de betteraves crues. L’ensemble vaut autant le coup d’oeil que le coup de fourchette. "Il n’y a pas de rouleaux?" demande-t-on encore à ma table. Un serveur, qui a entendu, nous promet d’en apporter. Promesse tenue dans un délai record. Je m’abstiens, ce dont je me félicite quand arrive le plat principal – accueilli d’un "Je s’rai jamais capable!" Autre cri du coeur de ceux qui réclamaient des rouleaux. L’assiette en impose drôlement. Douze bouchées de format plus que respectable: thon rouge, saumon, crabe et pétoncles sous forme de sashimis, maki sushis, etc. Une deuxième Tsingtao s’impose pour moi.
On trinque mollement à ma table. Je devine quelques appétits en déroute et je rigole en moi-même. Pas très longtemps, puisque je dois déclarer forfait après avoir plus que goûté un peu, beaucoup et passionnément à tout – particulièrement apprécié le maguro si moelleux qu’il semble n’être qu’une saveur sans texture. Un peu de crabe ici, quelques pétoncles là. À ma table, quelqu’un se fait servir d’autres rouleaux. Digne d’un Guinness! Nos bombances s’achèvent sur quelques notes de fraîcheur et de couleur, sous la forme de sorbets maison à la mangue et aux fruits des champs.
Restaurant Le Métropolitain
Eddie Sushi Bar
1188, avenue Cartier
Québec (Québec)
Menu du jour: 8,95 à 14,95 $
Table d’hôte à partir de 15 $
Téléphone: (418) 649-1096