Restos / Bars

Jardin de Chine : À part soie

D’un luxe un peu désuet, mais sans tape-à-l’oeil et sans clinquant, ce restaurant a le mérite de la constance. Ses spécialités sichuanaises et cantonaises sortent de l’ordinaire, et ce qu’on peut manger ailleurs n’a pas ici le même goût.

Je dois une fière chandelle à celui ou celle qui m’en a parlé, il y a environ quatre ans. Le nom du restaurant m’avait d’abord laissé perplexe, mais à aucune de mes visites je n’ai déchanté. Peut-être un peu moins éclairé, ce soir? Moins fastueux, les soirs de semaine? J’y suis: il y manque cette odeur qui, d’habitude, vous cible tout de suite, vous attrape et puis vous mène par le bout du nez – jusqu’aux places qu’on vous a réservées. En passant près des tables déjà prises, vous resquillez tout de même quelques fumets, vous zyeutez des plats de riz ou de légumes, et surtout ce boeuf à l’orange reconnaissable par les petits brins de zeste semés sur les cubes de viande nappés de sauce caramélisée… Et nous voici, comme d’habitude (eh oui!), dans la galerie latérale surélevée, du genre véranda, délimitée par des demi-cloisons à balustrades de laiton. L’empire des banquettes! L’autre partie de la salle à manger est meublée de chaises à haut dossier. L’apéro? Bien sûr. "Chin!" dit mon invitée. Je réponds "Tsing!" car nous trinquons à la Tsingtao. L’endroit est vaste, décoré de grands éventails, égayé de plantes vertes en pots et d’une longue file de jardinières suspendues. La carte nous propose sa ribambelle de crevettes "cristallines" ou épicées, ses soupes aux légumes, au poulet et maïs, wonton, fruits de mer, etc. Le poulet du général Tao y fait encore bonne figure, tandis que le boeuf s’accommode à toutes les sauces, de la Hunan à la sichuanaise. En fait de poisson, il n’y a que du doré – grésillant, à la sauce maison, aux épinards croustillants, etc. Et voici, les cuisses de grenouilles, les pétoncles, le crabe, le nid d’oiseaux aux fruits de mer et… Dilemme. Canard croustillant ou à la pékinoise? Ce dernier suppose une attente de 30 minutes: ma faim tranche, une faim des grands jours, celle des longues journées sans collation! Nous ne tergiversons pas longtemps. Bientôt arrivent nos soupes, chaudes mais pas brûlantes. La mienne, aux wontons farcis de crevettes, se mange comme… un simple préliminaire. Le point faible du repas, quoi! Celle de mon invitée, aigre et piquante, montre un peu plus de caractère. Du goût à revendre. Pour le second service, j’ai choisi des boulettes de crevettes croustillantes, et là, je m’emballe. Quatre grosses boulettes brunes, d’aspect rugueux, qui se révèlent pourtant moelleuses et bien assaisonnées au point de pouvoir se passer de leur sauce aux cerises piquante. Mon invitée, qui n’a eu droit qu’à un seul (et petit) "rouleau du printemps", se lance de bon gré dans la mêlée. Nous l’emportons haut la fourchette sur cette entrée plus que généreuse. Nos plats de résistance s’amènent, chacun orné d’une fleur ciselée à même un légume. À côté des carottes, brocoli, céleri, champignons et autres, cuits et relevés, des crevettes, des crevettes et encore des crevettes – toutes nappées d’une sauce sichuanaise savoureuse et fort épicée. Époustouflé que je suis, moi: j’avais demandé le canard croustillant, oui, mais je ne m’attendais pas à l’avoir entier… ou plutôt complet, car on me l’a déjà détaillé en plusieurs morceaux. La peau, grillée, croustille en effet sous la dent. Une sauce épaisse, à base de haricots rouges (et nuancée de hoisin, sans doute), répand sur chaque morceau d’indicibles bienfaits. Je goûte à peine au riz vapeur que j’ai commandé: il y a plus urgent. Une urgence qui s’amenuise d’une bouchée à l’autre. Une fois son assiette vidée et repoussée de quelques centimètres, mon invitée se met à tâter elle aussi du canard. Les commentaires, les compliments, c’est elle qui en a le privilège. Moi, je ne trouve à dire que "eh ben!" en hochant la tête. Quand je retrouve enfin l’usage de la parole, alors qu’il reste encore devant nous à peu près le tiers du volatile, je nous interroge avec l’air de ne pas y toucher: "Ça doit être aussi bon réchauffé, non?" J’en ai d’ailleurs fait l’expérience le lendemain midi.

Jardin de Chine
321, boulevard Sainte-Anne
Québec (Québec)
Téléphone: (418) 666-9314
Tables d’hôte: 23,95 et 41,95 $ (pour deux)
Souper pour deux (incluant boissons, taxes et service): 47,97 $

Heureux gagnants
Le Festival de la gastronomie de Québec – Coupe des nations 2002 a pris fin, le 26 avril, par la remise des prix et trophées dans les diverses catégories proposées. Du côté des compétitions culinaires froides, ces distinctions ont honoré MM. Claude Godbout, Jean-Luc Piquemal et Jonathan Marois, trois chefs de Québec, ainsi que les chefs Otto Daniels (Montréal), Niel Becker et Michael Vignapiano (États-Unis). Le trophée de la catégorie "plateau de buffet" a été remporté par Lucie Dufresne et Mélissa Lavallée, deux étudiantes du Centre de formation professionnelle Fierbourg, tandis que le plus prestigieux, la "Coupe du président", est allé au membre du Big Apple Culinary Team M. Neil Becker. En ce qui concerne les compétitions culinaires chaudes, la médaille d’or (catégorie individuelle) a été attribuée à Louis-Pierre Lalande (CFP Fierbourg), tandis qu’Alain Lamoureux (École Jacques-Rousseau, Longueuil) a remporté l’argent. Les compétions régionales individuelles ont distingué Diane Tremblay, du restaurant Le Privilège, à Chicoutimi (médaille d’or), Manuel Morin, du Bas-Saint-Laurent (argent), et Christian Laroche, de Québec (bronze). Tous les détails du Festival et des différentes compétitions figurent dans le site abondamment documenté de la Coupe des nations: www.coupedesnations.com.